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Le Parlement européen s’est doté, le 31 janvier, de nouvelles règles de transparence. Les parlementaires en première ligne sur les textes de loi devront désormais publier l’ensemble de leurs rencontres avec les lobbys. Une avancée significative que la droite a failli empêcher. Toute l’Europe fait le point avec Jo Leinen, eurodéputé allemand (SPD).
Transparence : quelles sont les nouvelles règles du Parlement européen ?
Le Parlement européen a adopté, le 31 janvier, des règles contraignantes de transparence s’agissant de ses relations avec les lobbys. Dorénavant, les eurodéputés détenteurs de postes clés dans l’examen d’un texte de loi européen – à savoir les rapporteurs, rapporteurs fictifs et présidents de commissions parlementaires – devront publier toutes leurs rencontres avec les groupes d’intérêt. Les informations seront ainsi accessibles aux citoyens sur le site internet de l’institution.
Pareille décision avait été adoptée fin 2014 par la Commission européenne. En effet, depuis maintenant quatre ans, les commissaires européens ainsi que leurs chefs de cabinet ont l’obligation de rendre compte de leurs rendez-vous avec les lobbys.
Bruxelles est en effet avec Washington la capitale mondiale du lobbying, un terme vaste désignant l’action d’influence des Etats, collectivités locales, entreprises, syndicats, ou ONG sur la législation. Au total, 11 000 lobbys employant 80 000 personnes sont inscrits sur le registre de transparence créé en 2011 et sur lequel il est nécessaire de figurer pour avoir accès au Parlement. Et à en croire Ouest-France, un milliard d’euros serait dépensé chaque année par les groupes d’intérêt, dont les deux tiers par ceux représentant des entreprises.
« Maintenant on a des bases claires« , se félicite Jo Leinen, eurodéputé allemand membre du Parti social-démocrate. Avec le registre de transparence déjà existant et le code de conduite incluant désormais l’obligation, pour les députés en première ligne sur les textes de loi, de lister publiquement leurs rencontres avec les lobbys, « on sait ce qu’on peut et ne peut pas faire« .
Or ces nouvelles règles de transparence ont bien failli ne pas voir le jour. La majeure partie de la droite et de l’extrême droite européenne étaient en effet hostiles à ces dispositions. A l’initiative de l’Allemand Manfred Weber, chef de file des conservateurs pour la campagne des européennes, un vote à bulletins secrets a ainsi été organisé s’agissant de la publication des rencontres avec les lobbys. Un paradoxe dans la mesure où l’objectif était justement de gagner en transparence, ce que n’auront pas manqué de condamner la gauche européenne et les ONG. La tactique a d’ailleurs presque fonctionné : les règles ont été approuvées avec une majorité de seulement 4 voix.
« Un vote secret, cela va contre la nature du Parlement, qui doit rendre des comptes aux électeurs. A quatre mois des élections européennes, une telle attitude est incompréhensible« , déplore Elisabeth Morin-Chartier, membre française de la droite européenne, qui s’est désolidarisée de son groupe sur ce vote. C’était « un moment bizarre« , ajoute Jo Leinen. « Les conservateurs (…) se sont cachés derrière la liberté de mandat ». Probablement car « la droite est plus proche des industries et la gauche plus proche des syndicats et des ONG« .
Il reste désormais au Conseil de l’Union européenne, qui partage le rôle de législateur avec le Parlement européen, de se doter à son tour de telles règles de transparence. Son opacité a d’ailleurs été encore une fois dénoncée dans un rapport sans équivoque intitulé « Les Etats captifs » et publié le 6 février par le think tank Corporate Europe Observatory. Selon ses auteurs, « les Etats [membres de l’UE] sont devenus des véhicules de l’influence des multinationales » et « la situation tend à empirer« .
Jo Leinen se veut néanmoins positif, estimant que « la pression » va monter sur le Conseil. « Il n’est pas acceptable que le Conseil, en tant que législateur – le Parlement est la chambre des citoyens et le Conseil la chambre des Etats – ne vote et ne travaille pas en transparence. Il se comporte comme le congrès de Vienne avec des diplomates qui peuvent agir derrière des portes fermées« .
Outre les règles de transparence, les eurodéputés ont également modifié leur code de conduite. Les eurodéputés devront désormais éviter de tenir un « comportement inapproprié » et de recourir à un « langage offensant« . Ils devront être attentifs à ne pas commettre de harcèlement moral ou sexuel. Un engagement à respecter ces dispositions devra pris par écrit par les parlementaires, au risque de ne pouvoir obtenir un poste de présidence ou un rapport et de ne pouvoir représenter le Parlement européen face aux autres institutions ou à l’étranger. En revanche, la nécessité de suivre une formation de sensibilisation au harcèlement moral ou sexuel, demandée par la gauche européenne, n’a pas été approuvée par une majorité des eurodéputés.