Brexit : que se passera-t-il après le vote des députés britanniques ?

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Synthèse

18.10.2019

Léo Lictevout

A moins d’un nouveau report, le Royaume-Uni doit sortir de l’Union européenne le 31 octobre. A l’issue de deux ans et demi de négociations entre Londres et Bruxelles, et plus de trois ans après le référendum, le Brexit marquera un tournant majeur dans les relations entre l’UE et les Britanniques. Toutefois, de nombreuses étapes restent à venir… que le divorce ait lieu avec ou sans accord.

Les drapeaux britannique et européen - Crédits : Basia Pawlik / Commission européenne

Les drapeaux britannique et européen – Crédits : Basia Pawlik / Commission européenne

La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, initialement prévue le 29 mars 2019, a été repoussée au 31 octobre compte tenu des difficultés des Vingt-sept à parvenir à un accord de retrait avec le gouvernement britannique.

Un accord a été conclu entre les négociateurs européens et britanniques jeudi 17 octobre. Validé par les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE, il doit encore être approuvé par le Parlement européen mais surtout par le Parlement britannique, exceptionnellement convoqué le 19 septembre.

Au moment du vote des députés britanniques, les trois principales options sont les suivantes : soit ils valident l’accord et une sortie ordonnée du Royaume-Uni de l’UE sera possible le 31 octobre, soit ils le rejettent et un no deal (une sortie sans accord le 31 octobre) se profile, soit ils le rejettent et Boris Johnson accepte, conformément au Benn Act voté par la Chambre des communes en septembre, de demander un report du Brexit aux Européens.

Avec ou sans accord et en l’absence de report de la sortie, les représentants britanniques ne siègeront plus dans les institutions européennes à compter du 31 octobre.

Le commissaire britannique Julian King quittera son poste, tout comme les 73 eurodéputés britanniques élus en mai 2019, qui seront partiellement remplacés par 27 députés issus d’autres Etats membres (déjà élus en mai 2019). Ainsi, même si le Royaume-Uni s’engageait à rester aligné sur certaines règlementations européennes, il ne prendrait plus part à leur élaboration.

Option 1 : l’accord du 17 octobre est définitivement adopté

En cas d’adoption du nouvel accord par les parlements britannique et européen, voici les prochaines échéances :

  • 31 octobre 2019 (ou peu de temps après si un délai technique est nécessaire) : sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne et début de la période de transition

Les dernières négociations – menées en octobre 2019 par les Européens et le gouvernement britannique – portaient essentiellement sur l’épineuse question de l’île d’Irlande après le Brexit : comment maintenir la fluidité des échanges entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande (toujours membre de l’UE), y éviter la résurgence de troubles identitaires et maintenir l’intégrité du marché unique européen ?

Brexit : quelles conséquences pour les deux Irlande ?

Les modalités du divorce entre le Royaume-Uni et l’Union européenne ont été présentées dans le projet d’accord de sortie dévoilé par Bruxelles et le Premier ministre Boris Johnson jeudi 17 octobre.

Brexit : un nouvel accord de sortie a été trouvé, à quelques heures du Conseil européen

En se tenant à cet accord, le Royaume-Uni sortirait donc de l’Union européenne dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre. A minuit, il cesserait d’être membre à part entière de l’UE : il y perdrait son pouvoir décisionnel, mais resterait membre du marché unique et lié aux politiques européennes.

La sortie complète des traités n’aurait lieu qu’à l’issue de la période de transition, le 31 décembre 2020. Censée courir jusqu’à cette date mais renouvelable pour une durée maximum de deux ans, cette période doit permettre aux Vingt-Huit de préparer l’après-Brexit.

Le Royaume-Uni aurait alors quatorze mois pour négocier de nouveaux traités de libre-échange avec des pays tiers et avec l’Union, afin de compenser la sortie du marché commun. Ce serait également l’occasion pour le pays de définir les orientations futures de sa politique et de nouer de nouveaux accords diplomatiques. Il lui faudrait enfin se préparer à reprendre en main les domaines de compétence qu’il avait transférés à l’échelon européen depuis 1973, année de son adhésion à l’UE.

Au cours de cette période, les Britanniques devraient, conformément à la déclaration politique qui accompagne l’accord de retrait adopté le 17 octobre, nouer un accord de libre-échange avec l’Union, sans droit de douane ni quota.

Dans l’attente de ce nouveau traité, quelle serait la relation commerciale du pays avec l’UE pendant toute la période de transition ? Le Royaume-Uni continuerait de suivre l’ensemble des politiques européennes, sans pour autant avoir son mot à dire dans les instances représentatives de l’UE. Le pays aurait donc pleinement accès au marché unique, de la même manière que lorsqu’il était encore membre de l’UE.

La liberté de mouvement serait à ce titre elle aussi maintenue pour l’ensemble des citoyens européens et britanniques : les Européens installés au Royaume-Uni (de même que les Britanniques établis dans le reste de l’UE) ne seraient pas inquiétés avant le 31 décembre 2020. Ils pourraient continuer à vivre, travailler ou étudier comme avant.

  • 31 décembre 2020 (au plus tôt) : fin de la période de transition

Si les deux parties (UE et Royaume-Uni) le souhaitaient, une prolongation de la période de transition pourrait ensuite être mise en œuvre, jusqu’au 31 décembre 2022 au plus tard.

A défaut, la période de transition prendrait fin le 31 décembre 2020, et le Royaume-Uni quitterait cette fois complètement l’Union européenne. Le droit européen cesserait de s’y appliquer ; les relations extérieures du pays seraient désormais régies par les nouveaux accords signés au cours de la période de transition ou, à défaut, par les règles internationales (par exemple, celles de l’OMC pour les affaires commerciales).

En l’absence d’accord d’ici la fin de la période de transition, un statut spécial serait appliqué à l’Irlande du Nord, ce qui a été la principale source de blocage dans la négociation de l’accord de sortie.

Afin d’éviter le rétablissement d’une frontière avec la République d’Irlande, l’Irlande du Nord continuerait d’appliquer un certain nombre de normes européennes pour les marchandises produites sur son territoire. Ce qui lui permettrait de pouvoir continuer à échanger ses produits avec l’UE, et notamment le reste de l’Irlande, sans contrôles douaniers et ainsi maintenir la fluidité des échanges. En revanche, des contrôles auraient lieu et des droits de douane seraient appliqués pour les produits arrivant en Irlande du Nord depuis la Grande-Bretagne s’ils sont susceptibles d’être commercialisés dans le marché unique européen. Pour les  marchandises en provenance de pays tiers, les  normes et droits de douane britanniques s’appliqueraient si elles sont uniquement destinées à l’Irlande du Nord. Mais si ces marchandises ont vocation à rejoindre l’UE, les tarifs européens en la matière s’appliqueraient.

Un système qui semble complexe, notamment pour déterminer quels produits devront être contrôlés et taxés, et qui devra être opérationnel avant la fin de la période de transition.

  • 2025 (au plus tôt) : vote de l’Assemblée législative nord-irlandaise sur la reconduction des règles européennes

Dans le cas où aucun accord ne serait trouvé à l’issue de la période de transition, l’Irlande pourrait toutefois renoncer, quatre ans après la fin de la période de transition, à appliquer les règles européennes et rejoindre le même régime réglementaire et douanier que le reste du Royaume-Uni.

L’accord de retrait conclu entre le Royaume-Uni et l’Union européenne prévoit que tous les quatre ans à partir de son entrée en vigueur, l’Assemblée législative d’Irlande du Nord serait amenée à se prononcer sur cette question, tant qu’un accord UE-Royaume-Uni ne serait pas ratifié.

Et aussi…

6 mai 2021 : élections parlementaires écossaises

Un peu plus de quatre mois après la fin prévue de la période de transition devraient se tenir les élections parlementaires écossaises. Alors que la Première ministre indépendantiste Nicola Sturgeon a renouvelé depuis 2016 ses appels à un second référendum sur l’indépendance de l’Ecosse, qui avait voté contre la sortie de l’UE au référendum de 2016, elle avait toutefois assuré qu’une telle procédure ne serait enclenchée qu’après la sortie effective de l’Union. Les indépendantistes écossais, anti-Brexit, pourraient voir leur majorité renforcée au Parlement écossais pour obtenir un second référendum.

5 mai 2022 : élections générales britanniques et élection de l’assemblée d’Irlande du Nord

En 2022 sont prévues les prochaines élections générales britanniques. Toutefois, il n’y a que peu de chances que la Chambre des communes attende cette date pour convoquer un nouveau scrutin : en effet, les conservateurs comme les travaillistes (bien qu’ils attendent d’y voir plus clair sur l’issue du Brexit pour enclencher la procédure) réclament déjà un retour aux urnes.

De plus, les différentes échéances à venir (ratification de l’accord de sortie de l’Union, période de transition, nouveaux accords bilatéraux) sont très susceptibles d’être bloquées par un Parlement divisé, où aucun parti ne dispose de la majorité absolue. Ainsi, le Premier ministre pourrait être contraint d’appeler à des élections anticipées rapidement après le Brexit.

Le 5 mai 2022 marque aussi la date prévue du scrutin pour élire l’assemblée d’Irlande du Nord. Toutefois, les difficultés des partis nationaliste (Sinn Féin) et unioniste (Demoratic Unionist Party) à s’entendre privent l’Ulster d’un gouvernement depuis l’élection de 2017. Une élection anticipée est donc là encore probable, et ce d’autant plus si la différenciation réglementaire de l’Irlande du Nord ne faisait pas l’unanimité, ou si l’idée d’un référendum sur la réunification de l’île venait à émerger.

Option 2 : l’accord du 17 octobre n’est pas validé, le report n’est pas demandé / accepté

En cas de rejet du nouvel accord par les parlements britannique ou européen, voici les prochaines échéances :

  • 31 octobre 2019 : sortie « dure » du Royaume-Uni de l’Union européenne

En cas de « no deal« , le Royaume-Uni sortirait de l’Union le 31 octobre et serait immédiatement considéré comme un Etat tiers.

En matière de commerce, il serait soumis aux normes internationales de l’Organisation mondiale du commerce, sans bénéficier d’accord de libre-échange avec d’autres puissances économiques. Toutes les frontières seraient rétablies, y compris entre l’Ulster et le reste de l’île d’Irlande. Des contrôles douaniers et réglementaires seraient donc remis en place, freinant les échanges du Royaume-Uni avec les autres Etats.

S’agissant des résidents de part et d’autre de la Manche, des dispositions d’urgence ont été prises pour limiter les conséquences d’un Brexit sans accord. Les citoyens britanniques établis en Europe devraient, néanmoins, se soumettre à la réglementation de leur pays d’accueil, impliquant éventuellement la demande d’un titre de séjour. De même pour les Européens installés au Royaume-Uni, qui devraient faire la demande d’un statut de résident pour pouvoir y rester.

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Option 3 : accord ou non, un nouveau report est demandé

La contrainte de calendrier faisant de l’accord entre les Européens et les Britanniques un compromis de dernière minute, un report technique du Brexit pourrait encore être décidé pour avoir le temps d’enregistrer juridiquement ce dispositif.

Mais à l’inverse, il est théoriquement envisageable qu’en cas de rejet de l’accord par l’un des deux parlements, britannique (possible) ou européen (improbable), Boris Johnson demande à ses partenaires un report. Imposé par le Benn act voté par les députés britanniques en septembre, cette mesure n’a pas les faveurs du Premier ministre mais il y serait légalement contraint. Dans ce cas, le report serait soumis à l’acceptation des chefs d’Etat et de gouvernement, et potentiellement plus long.

Si l’accord du 17 octobre est donc rejeté, les négociations se poursuivraient jusqu’à la nouvelle date du Brexit. Ce qui ne manquerait pas d’avoir des conséquences sur les relations du Royaume-Uni avec l’UE, de même que sur les affaires internes du pays.

  • Un nouveau commissaire britannique pour l’UE ?

Le Brexit du 31 octobre 2019 devait permettre au Royaume-Uni de sortir de l’UE avant la prise de fonctions de la nouvelle Commission européenne, initialement prévue au 1er novembre avant d’être reportée au 1er décembre.

Toute nouvelle extension de l’Article 50, qui repousserait le Brexit au-delà de cette date, forcerait ainsi le pays à nommer un commissaire européen provisoire. L’actuel commissaire britannique Julian King pourrait cependant être maintenu à son poste le temps que le Royaume-Uni quitte l’Union.

  • De nouvelles élections générales au Royaume-Uni

Le Parlement européen a d’ores et déjà conditionné l’octroi d’un report du Brexit à des « raisons valables« , parmi lesquelles la tenue d’élections générales au Royaume-Uni.

De telles élections pourraient faire émerger une coalition d’opposition et déboucher sur un second référendum, comme proposé par le Labour, voire un arrêt pur et simple du Brexit comme réclamé par les Libéraux-démocrates. A l’inverse, elles pourraient également redonner aux conservateurs de Boris Johnson leur majorité et leur permettre de faire valider une sortie sans accord (no deal), ou encore le nouvel accord obtenu avec les négociateurs européens le 17 octobre…

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