Le Parlement européen adopte des règles pour encadrer les cryptomonnaies

Les eurodéputés ont approuvé, jeudi 20 avril, le règlement MiCA pour réguler les cryptomonnaies. Une législation prévue pour mieux protéger leurs utilisateurs et lutter contre les flux illicites, dont bénéficient notamment les réseaux criminels et terroristes.

Le secteur des cryptoactifs a connu des chamboulements les derniers mois, avec notamment la faillite de la plateforme FTX

Le secteur des cryptoactifs a connu d’importantes turbulences ces derniers mois, avec notamment la faillite de la plateforme FTX – Crédits : salarko / iStock »Il était temps« , commente Le Point. Jeudi 20 avril, les eurodéputés ont adopté avec « une écrasante majorité de 573 voix pour (38 voix contre et 18 abstentions) » le règlement MiCA (Markets in Crypto-Assests), rapporte l’hebdomadaire. Proposé par la Commission européenne en septembre 2020, celui-ci vise à « encad[rer] le secteur des cryptoactifs (cryptomonnaies, stablecoins, jetons utilitaires…) » [Les Echos].

Un tournant pour le Vieux Continent, puisque « jusqu’à présent, les transferts d’actifs virtuels, tels que les bitcoins, échappaient à législation européenne sur les services financiers » [BFM TV]. La législation permettra notamment de « lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme et protéger les consommateurs« , explique Le Monde.

L’essor du secteur des cryptomonnaies

« Il s’agit de poser les bases d’une régulation sur un secteur en plein essor« , résume La Tribune.Avec l’adoption du règlement MiCA, « réputé s’inspirer largement de la loi Pacte française« , l’Union européenne devient « la première grande juridiction à définir un cadre spécifique pour réguler l’industrie des cryptoactifs » [Les Echos]. Une « première étape à un moment où plusieurs régulateurs dans le monde tentent d’encadrer ce secteur« , note Le Télégramme. Pour le rapporteur du texte, l’eurodéputé Stefan Berger (PPE), MiCA permet à « l’industrie européenne des cryptoactifs [de disposer] d’une clarté réglementaire que des pays comme les Etats-Unis n’ont pas » [Le Monde]. Il estime ainsi que le règlement apporte « un avantage concurrentiel à l’UE« , cite le quotidien.

À LIRE AUSSIEconomie : face aux risques de dérives, comment l’Union européenne tente-t-elle de réguler les cryptomonnaies ?« 

Fin du Far West« Le secteur des cryptomonnaies, « encore en pleines turbulences » [Les Echos], est en effet très peu règlementé à l’échelle mondiale. Celui-ci a connu une hausse des transactions illicites des cryptoactifs en 2022 : celles-ci ont « plus que doublé sur un an à près de 21 milliards de dollars (19 milliards d’euros) malgré un marché qui s’est réduit, selon la plate-forme de données Chainalysis« , relate Le Monde. « Les faillites et arnaques retentissantes des derniers mois, à commencer par le scandale FTX (évalué à 32 milliards de dollars), ont largement terni la réputation d’un secteur qui échappe, depuis ses débuts, à de trop pointilleux contrôles » [Le Point].

Devant encore être formellement adopté par le Conseil, le règlement MiCA « entrera en vigueur progressivement à partir de juillet 2023 » [L’Echo]. « A la différence d’une directive, il n’a pas besoin d’un vote en France ou dans les autres parlements nationaux pour s’appliquer« , rappellent Les Echos.

À LIRE AUSSICybersécurité : que fait l’Union européenne ?

Concrètement, « les fournisseurs de services de cryptoactifs (CASP) devront s’enregistrer [dans un des Etats membres de l’UE] et fournir des données précises sur leur identité s’ils souhaitent opérer dans l’UE« , indique Le Monde. Trois axes prédominants entourent le règlement : « la transparence, la publication d’informations, et l’autorisation et la surveillance des transactions » [Les Echos].

Par exemple, MiCA va « permettre le blocage des transactions financières suspectes » émanant des cryptoactifs [L’Echo]. Pour l’eurodéputé Ernest Urtasun (Verts), co-rapporteur du règlement sur les transferts de fonds (TFR) adopté le même jour, ces deux textes marquent « la fin du Far West non réglementé de la crypto » [Les Echos]. Avec la nouvelle législation, « la ‘Travel Rule’, déjà existante dans la finance traditionnelle, s’appliquera à l’avenir aux transferts de cryptoactifs « [BFM TV]. « Les informations sur la source et les bénéficiaires de l’actif devront ‘voyager’ avec la transaction », explique L’Echo. Mais avec une nouveauté : la règle, qui s’applique à partir de 1 000 euros dans le secteur bancaire, « s’imposera au premier euro échangé » dans le secteur des cryptoactifs [Le Point].

Tous les micropaiements, qui ont par exemple « servi à financer Daech« , pourront être tracés, indique l’hebdomadaire.Passeport européenEn outre, le règlement MiCA « va rendre possible la délivrance d’un passeport européen permettant aux entreprises cryptos enregistrées auprès des superviseurs nationaux d’opérer dans l’ensemble de l’Union européenne« , notent Les Echos. Une sorte de licence en échange du respect des normes européennes. Autre évolution notable : l’introduction d’une règle pour « réduire l’empreinte carbone élevée des cryptomonnaies« , ajoute L’Echo.

« Les fournisseurs de services le plus importants devront publier leur consommation d’énergie« , détaille le quotidien belge.Avec ce cadre juridique uniformisé pour les marchés de cryptoactifs au sein de l’UE, « la marche sera donc très haute […] pour les nouveaux entrants dans la crypto » [Les Echos].

L’Autorité bancaire européenne et l’Autorité européenne des marchés financiers « seront chargées de s’assurer que les plateformes respectent les règles, y compris la mise en place de processus de gestion des risques et de gouvernance« , rapportent Les Echos.Le journal note qu’elles devront « mettre en place un registre public pour les prestataires de services de cryptoactifs non conformes opérant dans l’UE sans autorisation« . Un contrôle sera également possible pour les utilisateurs, qui pourront désormais accéder à « une procédure transparente et gratuite pour introduire une plainte » [Les Echos].

Si ces nouvelles normes constituent une évolution importante, « des voix ont tempéré leur impact« , relate Le Monde. Le délai d’application de la législation a notamment été pointé par l’eurodéputée Aurore Lalucq (S&D). Elle explique en guise d’exemple « que la plus grande plate-forme d’échange de cryptomonnaies au monde, Binance, ‘pourra se mettre en conformité avec MICA seulement dans dix-huit mois, dix-huit mois pendant lesquels les épargnants n’auront donc aucune protection’ » [Le Monde].

Autre limite, « la finance décentralisée (DeFi) et les NFT (jetons non fongibles) ne rentrent pas dans la réglementation MiCA » [Les Echos]. « Des angles morts qui ont conduit certaines personnalités, dont la présidente de la Banque centrale européenne Christine Lagarde, à lancer des appels pour un MiCA 2« , indique le quotidien économique