COHESION – Les gouvernements enfreignent les règles de consultation des parties prenantes – EURACTIV.fr

Plusieurs gouvernements européens enfreignent les règles de l’UE qui exigent des consultations significatives avec les autorités locales et la société civile dans la planification des dépenses en matière de cohésion. C’est ce que déplorent les parties prenantes, alors que la Commission européenne affirme quant à elle que tout est, en règle général, en ordre.

Avec un budget de 330 milliards d’euros, la cohésion constitue le deuxième plus gros budget après celui de la politique agricole commune, si l’on exclut l’argent emprunté aux marchés pour la relance liée à la crise engendrée par la pandémie de Covid-19. Toutefois, la planification de la période budgétaire 2021-2027 du programme d’investissement structurel de longue durée de l’UE, qui vise à réduire les disparités entre les niveaux de développement régional au sein de l’Union, est maintenant considérablement retardée parce que l’argent de la relance a déjà atteint la capacité administrative maximale dans de nombreux États membres. En outre, les autorités locales et régionales, ainsi que les ONG, tirent désormais la sonnette d’alarme, affirmant qu’elles sont illégalement mises sur la touche par leurs gouvernements nationaux. Depuis 2014, l’inclusion de parties prenantes telles que les syndicats, les collectivités locales et la société civile dans l’élaboration de programmes dans le cadre de la politique de cohésion, ce que l’on appelle le principe de partenariat, n’est plus une simple pratique établie de longue date mais bien une obligation légale. Cependant, des acteurs de tous horizons affirment aujourd’hui que les gouvernements européens se dérobent à cette responsabilité.

Selon de nouvelles données compilées par les ONG Climate Action Network (CAN) et CEE Bankwatch Network, sur les dix États où elles ont des membres actifs, seuls deux ont pleinement respecté les exigences des règles de l’UE en matière de processus de consultation publique lors de la préparation de leurs accords de partenariat, les documents-cadres de base. En outre, la conformité globale ne s’améliore pas même lorsque l’on examine les consultations entourant les plans spécifiques qui détaillent les investissements soutenus par l’UE, appelés programmes opérationnels. Les gouvernements locaux et régionaux ont également déclaré qu’ils ne sont pas suffisamment impliqués dans le processus. Lors de sa plénière d’octobre, le Comité des régions, une institution consultative de l’UE comptant 329 membres et composée de politiciens élus au niveau régional ou local, a mis en garde contre la faible implication des régions et des villes dans les nouveaux programmes de la politique de cohésion. Ce sentiment est également partagé par le Conseil des communes et régions d’Europe (CCRE), une association représentant les autorités infranationales.

Les fonds structurels devront être mis en œuvre parallèlement à la Facilité pour la reprise et la résilience (FRR), d’un montant de 672,5 milliards d’euros, pièce maîtresse du robinet de trésorerie de l’UE dans le cadre de la pandémie de Covid-19, qui débloquera 312,5 milliards d’euros de subventions à elle seule d’ici 2026, une somme comparable à l’ensemble du budget de la politique de cohésion.

Dans le même temps, les instruments de cohésion classiques ne doivent être dépensés que d’ici 2029, ce qui conduit à ce que les critiques craignent, à savoir une priorisation des dépenses du fonds de relance et des filières de projets de cohésion vides de sens. « Le respect du principe de partenariat est peut-être encore plus important cette année avec la programmation parallèle du FRR pour laquelle les États membres n’ont pas consulté les parties prenantes concernées telles que les municipalités et les régions », a indiqué le CCRE à EURACTIV dans des commentaires envoyés par courriel.

« Les accords de partenariat pourraient contribuer à assurer la cohérence entre le FRR et le fonds de cohésion, mais la principale difficulté est qu’ils ne sont pas mis en œuvre par les mêmes ministères/autorités de gestion », a ajouté l’association.

Le CCRE a déclaré que dans certains cas, les acteurs locaux étaient impliqués dans la planification de certains programmes de fonds mais pas d’autres, et qu’il n’y avait pas de cohérence même au sein des mêmes États, car le degré d’implication effective dépendait souvent de chaque ministre.

Dans le même temps, les ONG écologistes ont prévenu que ce secret conduirait à une utilisation moins efficace de l’argent de la cohésion en matière de climat, puisqu’au moins 30 % des 242,9 milliards d’euros du Fonds européen de développement régional et du Fonds de cohésion (FEDER/FC) devront être consacrés à l’écologie. « Les fonds de la politique de cohésion représentent la deuxième plus grande partie des fonds de l’UE et pourraient jouer un rôle clé dans la lutte contre la crise climatique et pour assurer une transition juste et durable de l’économie européenne. Pourtant, ils sont planifiés à huis clos », a constaté Olivier Vardakoulias, coordinateur de la politique des finances et des subventions chez CAN Europe, un groupement d’ONG actives dans le domaine du climat.

Respect du principe ou trajectoire de collision ?

Christophe Jost, responsable des politiques européennes à CEE Bankwatch, a déclaré que les États membres de l’UE « sont sur une trajectoire de collision avec la Commission en ce qui concerne la cohésion, car les parties prenantes ont été mises à l’écart et tenues dans l’ignorance pendant la phase de programmation. Il s’agit d’une violation flagrante du droit européen ». Parallèlement, la Commission a dressé un bien meilleur tableau de la situation. L’exécutif européen a expliqué à EURACTIV qu’il venait juste de commencer à recevoir officiellement les documents pertinents, « il est donc trop tôt pour juger de la qualité du processus dans son ensemble, car dans certains États membres, le processus de consultation doit encore être mené à bien ». Cependant, « une évaluation préliminaire suggère que le principe de partenariat a été généralement respecté jusqu’à présent, même si, dans certains États membres, l’approche peut encore être améliorée ». Néanmoins, la Commission a promis qu’elle allait « s’assurer elle-même que le principe de partenariat a été respecté avant d’approuver les programmes soumis » par les États membres.

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