La ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser, a déclaré jeudi 5 septembre que l’Allemagne envisage de nouvelles mesures pour refouler les exilés en situation irrégulière en provenance d’autres pays de l’UE. Ses propos interviennent alors que la pression exercée sur le gouvernement pour lutter contre l’immigration clandestine ne cesse de s’accroître.
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L’Allemagne sous la pression de la CDU
Suite à un attentat terroriste commis par un demandeur d’asile syrien le mois dernier, le gouvernement allemand a entamé cette semaine des négociations avec les gouvernements régionaux et le principal parti d’opposition de centre droit, la CDU, afin de sévir contre l’immigration irrégulière.
Alors que la CDU insiste pour refuser systématiquement l’entrée aux exilés en situation irrégulière provenant d’un autre État membre de l’UE, même si cela reste controversé au regard de la législation européenne, le ministère de l’Intérieur du pays a fait savoir qu’elle était de plus en plus ouverte à l’idée d’envisager cette option.
« J’ai toujours dit que j’étais très ouverte à tout », a réaffirmé Nancy Faeser (SPD/S&D) jeudi à Berlin.
« Si nous pouvons trouver de [nouveaux] moyens de refoulement, c’est une bonne chose », a-t-elle ajouté.
Actuellement, la police allemande ne peut refuser l’entrée à ses frontières terrestres européennes que si des passages illégaux sont détectés lors des contrôles, qui ne sont effectués qu’à quelques frontières en tant qu’exception aux règles de l’espace Schengen.
Selon la ministre de l’Intérieur, environ 30 000 exilés ont été refoulés depuis l’introduction de ces contrôles l’année dernière.
Si des exilés d’autres pays de l’UE parviennent à entrer sur le territoire allemand ou à demander l’asile, ils restent temporairement en Allemagne, même si les pays dont ils proviennent sont légalement responsables de leur traitement.
Les tentatives d’organiser des expulsions en temps utile se sont avérées problématiques dans la pratique, le gouvernement n’ayant réussi à renvoyer qu’environ 5 000 exilés vers d’autres États de l’UE l’année dernière. Quelque 28 000 personnes devaient être renvoyées dans le cadre de ce système au début de cette année.
Dans le cas de l’attaque au couteau du mois d’août, le terroriste présumé devait également quitter le pays après le rejet de sa demande d’asile.
L’unité de l’espace Schengen menacée par la multiplication des contrôles frontaliers
L’espace Schengen est censé être une zone de libre circulation. Ces dernières années cependant, certains États membres de l’UE multiplient les opérations de contrôle à leurs frontières nationales, au risque de fragmenter l’espace sans frontières.
Comment faire respecter les règles de l’UE ?
Les Verts craignent néanmoins que le refoulement systématique à la frontière n’enfreigne le droit européen.
« Le refoulement des demandeurs d’asile à la frontière n’est pas autorisé par le droit européen, car le règlement de Dublin s’applique et l’État membre légalement responsable doit être déterminé [en premier] », a rappelé Irene Mihalic, chef de file des Verts, au Rheinische Post, en réponse aux demandes de la CDU.
Outre le fait qu’il est pratiquement impossible de le faire à la frontière, cela pourrait également nécessiter davantage de contrôles pour détecter les passages illégaux.
Ces nouvelles considérations pourraient exacerber les inquiétudes des voisins européens de l’Allemagne quant à la volonté parallèle de la CDU de renforcer les contrôles aux frontières.
Toutefois, Nancy Faeser a insisté sur le fait que le refoulement systématique pourrait au contraire être un moyen de « progresser plus rapidement » en poussant les autres pays de l’UE à reprendre les exilés dont ils sont responsables.
Bien qu’elle ait noté que des pays comme la Pologne ont déjà assumé leurs responsabilités, les relations avec l’Italie sur cette question sont notoirement tendues.
L’année dernière, l’Allemagne a suspendu l’acceptation volontaire d’exilés en situation irrégulière en provenance d’Italie après que Rome a refusé à plusieurs reprises de reprendre d’autres exilés en provenance d’Allemagne.
Mais pour l’Allemagne, il est hors de question de réformer la législation européenne au-delà du champ d’application de la dernière réforme migratoire de l’Union.
« Le gouvernement se concentre sur la mise en œuvre de ce qui a été obtenu en dix ans de négociations et non sur le déliement », a assuré le porte-parole du ministère de l’Intérieur aux journalistes mercredi 4 septembre.