Sécurité alimentaire : position commune de l’UE et de l’UA – EURACTIV.fr

L’Union européenne et l’Union africaine (UA) se sont accordées sur un message commun concernant la sécurité alimentaire qui fait porter la responsabilité des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire sur les épaules du président russe Vladimir Poutine, alors que des craintes de famine « catastrophique » se font entendre.

« Le message clé est que nous nous exprimons d’une seule voix », a confié une source de l’UE présente dans la salle du sommet à EURACTIV, ajoutant que cela est essentiel s’il y a un espoir de débloquer les couloirs pour les céréales et d’éviter une famine de masse en Afrique.

La Russie responsable des périls sur la sécurité alimentaire

L’objectif clé est de continuer à faire passer le message que la Russie est la seule responsable de la situation actuelle, plutôt que les sanctions imposées au pays.

« Ce qui est important, c’est que nous soyons totalement alignés sur le message, que ce ne sont pas les sanctions qui mettent à mal le déblocage des grains et des céréales en provenance d’Ukraine, ou des ports, comme celui d’Odessa », a indiqué la source.

L’UA tiendra une réunion avec le président russe Vladimir Poutine dans les prochains jours, a précisé la source, ce qui signifie qu’il est particulièrement important de faire front commun.

Cette nouvelle intervient après que le président du Sénégal et de l’Union africaine, Macky Sall, se soit adressé aux dirigeants de l’UE mardi (31 mai) au nom de l’UA, soulignant la gravité de la situation actuelle.

Si la crise a un impact mondial, de nombreux pays d’Afrique sont particulièrement vulnérables en raison de leur dépendance à l’égard des exportations de denrées alimentaires russes et ukrainiennes et de la situation déjà instable de la sécurité alimentaire.

Avant même le conflit en Ukraine, les données de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sur l’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde en 2020 révélaient que 282 millions de personnes, soit plus d’un tiers des personnes sous-alimentées dans le monde, vivaient en Afrique. Parallèlement, la pandémie de Covid-19 a plongé 46 millions d’Africains supplémentaires dans le risque de faim et de sous-alimentation.

« Cela signifie que la situation est préoccupante et que le pire reste peut-être à venir si la tendance actuelle se poursuit », a averti M. Sall, ajoutant que, selon certaines estimations, les rendements céréaliers en Afrique chuteront de 20 à 50 % cette année.

Lors de la conférence de presse qui a suivi la réunion, le président du Conseil européen, Charles Michel, a souligné que la guerre en Ukraine avait « des ramifications potentiellement sérieuses » tant pour l’UE que pour le continent africain.

M. Sall a exhorté les dirigeants du bloc à faire « tout leur possible » pour débloquer les stocks de céréales disponibles et assurer le transport et l’accès au marché afin d’éviter le « scénario catastrophique de pénuries et de hausses de prix généralisées ».

Cela passe par la mise en commun des moyens d’action pour « éviter les chevauchements et avoir un impact plus significatif », a-t-il déclaré.

Plus précisément, le président a proposé que l’UE et la Banque africaine de développement (BAD) examinent comment l’initiative FARM (Food & Agriculture Resilience Mission) du président français Emmanuel Macron et le plan d’urgence de la BAD pourraient soutenir au mieux des investissements massifs dans l’agriculture.

L’objectif serait d’utiliser ces outils pour moderniser et mécaniser le secteur avec les dernières techniques innovantes pour assurer une utilisation appropriée des engrais et des pesticides et améliorer les capacités de stockage.

« Ce qui nous manque, et que vous pouvez fournir, c’est l’investissement financier et technologique nécessaire pour produire plus et mieux, et créer une prospérité partagée », a expliqué M. Sall.

Pour sa part, M. Michel a salué l’idée, affirmant que l’UE était « prête à prendre des mesures de soutien dans un esprit de partenariat » pour contribuer à améliorer et à renforcer les capacités de production en Afrique.

Les dirigeants européens restent discrets sur les détails des couloirs de solidarité

Toutefois, les dirigeants de l’UE ont été moins loquaces sur les aspects pratiques de la proposition de la Commission européenne visant à créer des « couloirs de solidarité », dont l’objectif est d’établir des liaisons logistiques alternatives pour le transport du blé ukrainien en utilisant tous les modes de transports appropriés.

« Il n’a pas été discuté en détail de ce à quoi ressembleraient ces couloirs de solidarité — c’est à la Commission que revient la tâche d’aligner les messages et de faire circuler le grain », a déclaré une source, ajoutant que cela doit être fait d’une « manière sûre et productive » pour l’Ukraine.

De même, il n’y a pas eu de discussion sur des propositions spécifiques, comme la création d’un corridor via la Biélorussie ou l’offre du Premier ministre bulgare Kiril Petkov d’utiliser le port maritime bulgare de Varna comme itinéraire alternatif, a confirmé la source.

Elle a toutefois souligné que les ministres étaient bien conscients qu’ils étaient tenus par des délais serrés. « Si nous ne voulons pas que les stocks soient gâchés, cela doit être fait de toute urgence », a ajouté la source.

Une autre source européenne a confié à EURACTIV que la question était susceptible d’être relancée pour le sommet de juin, bien que l’ordre du jour de ce dernier ne soit pas encore déterminé.

https://www.euractiv.fr/section/agriculture-alimentation/news/risque-de-famine-lua-et-lue-adoptent-une-position-commune-sur-la-securite-alimentaire/