OMC : un lent déclin – EURACTIV.fr

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L’Organisation mondiale du commerce (OMC) risque de passer en mode maintenance, avec des règles peu contraignantes et largement inapplicables, tandis que les hégémons régionaux s’efforceront d’assurer leurs intérêts commerciaux de manière unilatérale. C’est ce que révèle un nouveau document d’orientation de l’influent groupe de réflexion sur les questions économiques Bruegel.

L’ordre commercial multilatéral a connu une longue stagnation et, plus récemment, un déclin. Depuis 1995, aucun accord multilatéral impliquant une libéralisation majeure du commerce n’a été conclu dans le cadre de l’OMC.

Pendant longtemps, le système de règlement des différends de l’OMC a au moins été fonctionnel, défendant les principes de non-discrimination dans le commerce mondial.

Le changement de rôle des États-Unis

Toutefois, le Président américain Donald Trump a ensuite désactivé l’organe d’appel de l’OMC, sans lequel le système de règlement des différends est devenu largement dysfonctionnel.

Il s’en est suivi une guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis, avec une augmentation mutuelle des droits de douane. Selon le document de Bruegel, cela a conduit à des droits de douane additionnels de 20 % sur environ 500 milliards de dollars d’échanges bilatéraux.

Selon Uri Dadush, chercheur pour Bruegel, maître de conférences en politique commerciale internationale et auteur du document, il est peu probable que l’OMC retrouve son statut passé.

L’une des raisons à cela pourrait être que, aujourd’hui, le pouvoir mondial est plus diffus et que le rôle des États-Unis a changé.

« Un pays puissant comme les États-Unis guidant le système rendait les choses plus faciles », a déclaré M. Dadush à EURACTIV, faisant référence aux périodes passées de développement du commerce multilatéral.

« De la même manière, si le fait que les États-Unis prennent leurs distances avec l’OMC nuit énormément à l’organisation, l’importance des États-Unis a diminué », a-t-il ajouté.

Par exemple, sans les États-Unis, de nombreux membres de l’OMC, dont la Chine et l’UE, ont convenu d’un mécanisme de règlement des différends distinct qui fonctionne pour les différends commerciaux entre eux.

Trois hégémonies régionales

Selon le document, le scénario le plus probable pour l’avenir est un système commercial articulé autour de la Chine en Asie, de l’Allemagne et de la France en Europe, et des États-Unis sur le continent américain. « Au sein de ces blocs, le commerce sera largement ouvert et prévisible », indique le document.

« Aucun des trois blocs commerciaux n’est cohésif, mais au sein de chaque bloc, il existe des accords commerciaux régionaux majeurs », a confié le chercheur à EURACTIV.

De plus, selon lui, l’accord États-Unis-Mexique-Canada et l’UE ont rendu les blocs commerciaux en Amérique du Nord et en Europe plus cohésifs que le bloc commercial asiatique, qui souffre de tensions internes plus importantes.

« L’OMC végétera dans une sorte de mode de maintenance », indique le document d’orientation, estimant que l’organisation pourrait rester un cadre de référence et un forum de discussion avec de faibles pouvoirs d’exécution.

Les grands conflits commerciaux, en revanche, ont plus de chances d’être résolus de manière bilatérale, selon le document. Le différend sur l’acier entre l’UE et les États-Unis, qui a récemment été résolu, du moins partiellement, par un accord entre les deux puissances commerciales, en est un exemple.

Bien que la Commission européenne reprenne officiellement le flambeau de l’ordre commercial multilatéral libre, elle a elle-même commencé à se préparer à un monde dans lequel les conflits commerciaux ne pourront pas être résolus à l’OMC.

En décembre 2021, la Commission européenne a proposé un instrument anti-coercition qui lui permettrait de prendre des contre-mesures économiques coercitives à l’encontre d’entreprises étrangères au cas où un État membre de l’UE serait contraint économiquement par un pays tiers.

En voici un exemple concret : le gouvernement chinois fait actuellement pression sur l’économie lituanienne parce que le gouvernement lituanien a accepté d’ouvrir un bureau de représentation taïwanais dans sa capitale, Vilnius, ce qui constitue un important signal d’alarme pour Pékin, qui insiste sur la politique de la « Chine unique », qui empêche notamment de reconnaître Taïwan comme une entité indépendante de la République populaire de Chine.

Pour l’instant, l’UE ne peut pas faire grand-chose d’autre que de porter l’affaire devant l’OMC, dont la résolution peut alors prendre plusieurs mois, voire plusieurs années.

Des temps difficiles pour les pays des périphéries

Dans le scénario exposé par le document d’orientation, les petites et moyennes puissances comme le Maroc, le Brésil, l’Inde ou le Royaume-Uni se retrouvent avec peu de moyens de défense en cas de différends commerciaux.

« Dans un système où les règles ne sont pas appliquées, les pays puissants seront mieux lotis », a confié M. Dadush à EURACTIV.

Le document affirme que ces petits pays « seront soit forcés de conclure des accords asymétriques avec des hégémons régionaux », soit qu’ils « tenteront de monter les hégémons les uns contre les autres, renforçant ainsi la politisation du système commercial ».

Selon M. Dadush, l’UE ne peut pas, à elle seule, arrêter le déclin de l’OMC et de l’ordre commercial multilatéral qui y est attaché.

«Cependant, l’UE peut jouer un rôle constructif pour amener les autres acteurs à la table des négociations », a-t-il estimé.

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