Ukraine – production alimentaire – une aide de l’UE attendue – EURACTIV.fr

L’Ukraine a besoin d’aide de toute urgence pour garantir la production alimentaire tandis que des pénuries mondiales se profilent, avait averti Roman Leshchenko, ministre ukrainien de l’Agriculture, dans un discours devant les législateurs de l’UE où il a dénoncé les grandes entreprises qui continuent à travailler avec la Russie tout en faisant peu pour soutenir l’Ukraine.

Un jour seulement après que M. Leshchenko se soit adressé par vidéoconférence à la commission de l’agriculture du Parlement européen (AGRI), mardi 22 mars, le gouvernement ukrainien a annoncé mercredi dans la soirée qu’il avait démissionné. Selon les médias nationaux, il a invoqué des problèmes de santé pour justifier sa démission et a déjà été remplacé par Mykola Solsky, qui préside la commission parlementaire ukrainienne sur la politique agricole et foncière depuis deux ans et demi.

Son intervention de mardi et celle de lundi devant les ministres de l’Agriculture de l’UE ont été interrompues par des alertes de raid aérien. Les participants à la réunion de lundi racontent que M. Leshchenko a confié aux ministres que deux de ses amis, qui étaient agriculteurs, venaient d’être tués.

« Aujourd’hui, nous avons une guerre, une invasion à grande échelle, brutale et cruelle du territoire de l’Ukraine — le grenier de l’Europe qui s’est avéré être un garant de la sécurité alimentaire mondiale », a souligné M. Leshchenko devant les législateurs.

La guerre de la Russie contre l’Ukraine intervient alors que la saison des semailles de printemps est sur le point de commencer. Cependant, dans de grandes parties du pays, le travail dans les champs et dans les étables est devenu extrêmement dangereux à cause des bombardements et les exploitations agricoles souffrent d’un manque de produits essentiels, a averti le ministre.

La Russie « exporte l’Holodomor »

« Les courageux agriculteurs ukrainiens commencent [leurs] semis partout où ils le peuvent. Ils sèment sous les bombardements, dans des zones dangereuses, occupées et minées, au péril de leur vie », a-t-il déclaré.

Comme la guerre menace la production alimentaire en Ukraine, un exportateur majeur de denrées alimentaires essentielles telles que le blé et les oléagineux, elle n’entraîne pas seulement une hausse des prix des denrées alimentaires en Europe, mais aussi un risque élevé de pénurie alimentaire mondiale qui toucherait plus durement certains des pays les plus pauvres du monde, a averti M. Leshchenko.

« C’est exactement ce que veut la Russie », a-t-il affirmé, ajoutant qu’elle « a fait en sorte que l’Holodomor, la grande famine des années 1930 en Ukraine, se produise ». « Maintenant, elle exporte l’Holodomor dans le monde entier », a-t-il poursuivi.

La référence à l’Holodomor, la famine intentionnellement provoquée en Ukraine par le gouvernement soviétique de 1932 à 1933, a également été reprise par le commissaire à l’Agriculture Janusz Wojiechowski lors d’une conférence de presse mercredi.

Les entreprises internationales poursuivent leurs échanges avec Moscou

Le discours émouvant de M. Leshchenko a secoué de nombreux eurodéputés qui ont eu du mal à retrouver leur calme. « Que peut faire l’UE pour aider ? », ont alors demandé plusieurs coordinateurs de partis au sein de la commission parlementaire.

Pour le ministre ukrainien, un domaine clé où les agriculteurs ukrainiens ont besoin d’aide est la protection des cultures.

Alors que le pays dispose encore de stocks relativement importants de semences et de céréales, les herbicides et les fongicides disponibles dans les entrepôts sont quant à eux à des niveaux « dangereusement bas », a-t-il annoncé, critiquant les actions d’un certain nombre de grandes entreprises dans ce domaine.

« De nombreuses sociétés internationales qui commercialisent ces produits continuent de travailler avec le pays agresseur, alors qu’elles imposent des conditions sévères pour les expéditions vers l’Ukraine et n’expédieront leurs produits ici que moyennant un prépaiement de 100 % », a-t-il déclaré.

Cela signifie que les compagnies d’assurance ne sont plus disposées à assurer les expéditions, a averti M. Leshchenko.

« Pour la protection des cultures, cela signifie : nous sommes à zéro, nous n’avons rien. »

Parallèlement à cela, la pénurie de carburant pose elle aussi de gros problèmes aux agriculteurs.

« Le carburant que nous avions stocké pour nos travaux de printemps, nous l’avons en réalité donné à l’armée », a expliqué le ministre. « Un autre problème est que les bassins pétroliers où les agriculteurs conservaient leur carburant ont déjà été bombardés dans différents oblasts », a-t-il ajouté.

Entre-temps, l’UE s’est engagée à intensifier son aide pour sécuriser la production et l’approvisionnement alimentaires en Ukraine.

« La sécurité alimentaire dans l’Ukraine déchirée par la guerre est très préoccupante », a admis la Commission européenne dans sa nouvelle communication sur la sécurité alimentaire publiée mercredi (23 mars)

La communication décrit la manière dont l’UE aide l’Ukraine à « élaborer et mettre en œuvre une stratégie de sécurité alimentaire à court et moyen terme pour faire en sorte que les intrants parviennent aux exploitations agricoles dans la mesure du possible » et que l’Ukraine reste en mesure de nourrir ses citoyens et de regagner à terme les marchés d’exportation.

Il y a près de trois semaines, l’Ukraine avait décidé d’interrompre les exportations de denrées alimentaires essentielles telles que le blé et l’huile de tournesol afin de garantir l’approvisionnement national.

En outre, la Commission européenne travaille avec l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dans l’ouest de l’Ukraine « pour soutenir les petits exploitants et sécuriser la production agricole », tandis que les organisations agricoles de l’UE fournissent une assistance aux agriculteurs ukrainiens, peut-on lire dans la communication.

La Commission estime également que « la Russie semble cibler et détruire délibérément les stocks de nourriture et les lieux de stockage », une idée que partage M. Leshchenko, qui cite en exemple le sabotage délibéré des élevages.

« Nous savons que dans certains des territoires déjà occupés, ils sont en train d’affamer les animaux », a-t-il déclaré, ajoutant que les forces d’occupation coupaient le courant et l’approvisionnement en nourriture.

« 3 millions de poules sont déjà mortes — c’est une catastrophe écologique, une catastrophe alimentaire », a-t-il conclu.

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