La panique du Brexit est en train de traverser la Manche

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Les Français ont enfin réalisé que le Brexit se fera sans accord. Le Medef assure que les entreprises ne sont pas prêtes, l’agriculture est dans l’expectative et les transporteurs sont en panique.

À l’optimisme bienveillant qui a longtemps primé à propos du Brexit est en train de succéder un début de panique en France. Les derniers soubresauts de la politique britannique sont suffisamment clairs pour ce sénateur, qui assure : « on est clairement partis pour un Brexit sans accord ».

La France, qui souffre d’un lourd déficit de sa balance commerciale, a justement un excédent avec le Royaume-Uni. Et aimerait bien le garder. Si les pouvoirs publics français sont donc sur le pont pour prévenir d’éventuels problèmes, le tissu de PME français n’a pas encore pleinement conscience des enjeux.

Alerte du Medef

« Les entreprises françaises ne sont pas prêtes pour un Brexit dur », a déclaré le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, mi-février, assurant que la grande majorité des entreprises qui exportent (environ 30 000), ne sont pas prêtes, parce que c’est très compliqué d’être prêts.

Ce à quoi une source gouvernementale rétorque : « c’est vrai, et c’est de sa faute ! Ca fait des mois qu’on leur demande d’appeler les PME, sur la TVA, sur les règles d’exportation, et il ne se passe rien ! » grogne ce responsable haut placé, jugeant que le Medef fait partie de ces « corps intermédiaires qui disparaissent ».

Le gouvernement français a multiplié les rendez-vous auprès des fédérations professionnelles, a créé plusieurs sites d’informations pour les entreprises. Mais l’information aurait surtout touché les plus grosses entreprises, pas les petites. Et un grand flou continue de planer.

Droits de douanes, le retour

L’enjeu concerne principalement l’export des entreprises françaises vers le Royaume-Uni. En l’absence d’accord, le Royaume-Uni deviendra un pays tiers. Il faudra donc se conformer aux normes britanniques et non européennes pour exporter des pommes, des boulons ou des médicaments, voire s’acquitter de droits de douane.

En l’absence d’accord, ce sont en effet les règles générales du commerce définies par l’OMC qui s’appliqueront à partir du 30 mars, soit la règle de la Nation la plus favorisée.  Le Royaume-Uni se retrouvera dans la situation des Etats-Unis, par rapport à l’UE, et devra s’acquitter de droits de douane équivalents pour exporter ses denrées. Dans cette situation le Royaume n’a pas intérêt augmenter ses propres barrières douanières, car le pays se retrouverait contraint d’aller renégocier auprès de l’OMC toutes ces relations commerciales.

« On rentre dans un monde assez inconnu : les Britanniques sont entrés dans l’UE avant le développement du commerce international » rappelle Cécila Bellora, chercheur au CEPII qui s’est notamment penchée sur les conséquences pour l’agriculture du Brexit.

Selon le modèle Mirage, les droits de douanes risque de pénaliser l’agriculture française, sauf pour la filière viande française, qui pourrait facilement reprendre des marchés européens aux éleveurs britanniques et donc profiter du Brexit au final. « Mais ce sont des perspectives assez théoriques, qui ne prennent pas en compte les coûts de l’incertitude et de la réorientation des flux », prévient la spécialiste.

Les médicaments bien préparés, le transport aux abois

Dans certains secteurs les entreprises sont bien préparées. C’est le cas des entreprises du médicament par exemple, qui se sont préparées au « hard Brexit ».

« Le médicament est un secteur stratégique dont la logistique est cruciale. Comme l’agence du médicament était à Londres, près de 3000 médicaments disposaient d’une AMM (autorisation de mise sur le marché) faite au Royaume-Uni. Il a fallu les rapatrier au sein de filiales européennes, tout comme les essais cliniques, dont les responsables doivent être sur le territoire européen », explique Philippe Lamoureux, directeur général du LEEM, qui ne se dit pas inquiet à court-terme.

Reste un risque sur le moyen-terme, notamment d’approvisionnement : si l’UE et le Royaume-Uni ne signent pas un accord de reconnaissance mutuelle rapidement, des lenteurs de livraison risquent de s’installer, même si la France n’importe que 4,7 % de ses médicaments du Royaume-Uni.

En matière de transport en revanche, la fédération nationale du transport routier est sur les nerfs. 60 % des tonnages échangés entre l’UE et le Royaume-Uni passent par des infrastructures françaises.

« Le chaos est possible du jour au lendemain »,  a résumé Isabelle Maître, directrice de la FNTR, qui représente à 80 % des PME, lors d’une audition au Sénat.

« Quelle responsabilité réelle va reposer sur le conducteur ? Est-ce qu’il sera payé s’il y a un temps d’attente ? », s’interroge Thierry Grumiaux, délégué de la commission transports de la FNTR.

Pénurie de compétence sur les questions douanières

Avec la disparition des frontières dans l’UE, certaines compétences ont tout simplement disparu, y compris du côté des transporteurs. Or, le Royaume-Uni deviendra un pays tiers le 30 mars, avec ou sans accord : les déclarations en douanes seront donc indispensables.

Ce qui promet d’être compliqué. « On n’a pas suffisamment de déclarants en douanes, il en faudrait 1000 supplémentaires. Or on ne peut en former qu’entre 100 et 150 par an » assure Thierry Fremiaux.

La déclaration en douane envers un pays tiers peut comporter un nombre impressionnant d’informations en fonctions des produits et des normes auxquels ils répondent.

Ainsi pour la pêche, toute marchandise importée dans l’UE doit faire l’objet d’un contrôle spécifique concernant le lieu de capture des poissons ; en l’absence du certificat de douane, les poissons, couteaux et autres coquilles St Jacques risquent d’être bloqués.

A moins d’un mois et demi du Brexit, la probabilité de maintenir la fluidité des échanges entre la France et le Royaume-Uni s’amenuise. Seule porte de sortie, la prolongation des négociations entre Londres et Bruxelles est une option régulièrement évoquée dans les pourparlers du Brexit.

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