Immigration : renforcement des contrôles aux frontières

Jeudi 23 novembre, la Finlande a fermé de nouveaux postes-frontières avec son voisin russe, qu’elle accuse de laisser passer des migrants afin de la déstabiliser. Le jour même, l’agence européenne Frontex a annoncé soutenir Helsinki en envoyant du personnel et du matériel.

1. La Finlande renforce les contrôles à la frontiere de Russie

Depuis « la fin août« , les relations entre la Finlande et la Russie se dégradent un peu plus : Helsinki accuse Moscou d’orchestrer un « afflux de migrants sans visa » à sa frontière pour la déstabiliser, résume RFI. Au total, « près de 700 demandeurs d’asile sont entrés en Finlande sans visa par la frontière avec la Russie depuis [l’été], un chiffre en nette augmentation« , indique L’Express.

Des migrants originaires « du Yémen, de Somalie et de Syrie » notamment, précise Ilta-Sanomat. Certains portent d’ailleurs des vêtements « un peu légers » pour faire face aux « gelées finlandaises » et plusieurs ont été pris de « nausées » ou ont eu des « engelures mineures« , bien que la plupart soient « en bonne santé« , remarque le journal finlandais.

En réaction, la Finlande a fermé « 8 de ses 9 postes-frontières avec son voisin russe » [RFI]. Le 18 novembre, le pays avait d’abord clos tous ses « points de passage frontaliers du sud-est« , quatre au total, rappelle L’Express. Puis « trois autres points de contrôle » du nord jeudi 23 novembre. Il ne reste plus qu’un seul poste ouvert, « Raja-Jooseppi, dans l’extrême nord de la Laponie finlandaise » [YLE].

Le dernier point de passage étant réservé au fret ferroviaire. La Finlande se veut ferme. Comme le constate Le Figaro, ces tensions surviennent « après l’adhésion de la Finlande à l’Otan« . Moscou avait qualifié celle-ci d' »atteinte à sa sécurité » et avait promis de prendre des « contre mesures« , poursuit le quotidien. RFI établit d’ailleurs un parallèle entre la situation actuelle et une opération similaire « orchestrée par la Biélorussie aux frontières de la Lituanie, de la Lettonie et de la Pologne » en 2021.

Une « manœuvre d’attaque hybride« , résume le ministre de l’Intérieur estonien en évoquant la situation vécue par son voisin finlandais [L’Indépendant].La Finlande craint pour sa sécurité. Selon une note de la police finlandaise, reprise par le gouvernement, « les personnes traversant la frontière pourraient en comprendre certaines qui constituent une menace pour la sécurité intérieure« , relate le Helsinki Times.

Plus précisément : « des personnes ayant des antécédents de guerre ou d’autres crimes, des militaires déguisés en civils et des personnes radicalisées« , détaille le journal. « Notre tâche principale est d’assurer la sécurité du peuple finlandais« , a déclaré le Premier ministre Petteri Orpo, cité par la chaîne de télévision YLE.Le gouvernement finlandais se veut ferme mais n’envisage pas de fermer le dernier poste-frontière encore ouvert. « La possibilité de déroger au droit de demander l’asile est une option exclue, car elle irait à l’encontre des obligations internationales« , indique Iltalehti.

Selon le gouvernement finlandais, « la capacité des gardes-frontières à enregistrer les demandes de protection internationale a diminué à la frontière. Les procédures standards ne suffisent plus« , rapporte le Helsinki Times. « Si la situation devait perdurer, elle aurait probablement également un impact sur la capacité du service finlandais de l’immigration« , estime le journal. Comme le précise Le Figaro, « jusqu’à présent, 10 fonctionnaires de Frontex étaient déployés sur les 1 300 kilomètres de frontières que la Finlande partage avec la Russie« .Ce jeudi 23 novembre, « l’agence européenne de garde-côtes et de garde-frontières Frontex » a apporté son soutien à la Finlande, écrit L’Express.

FRONTEX à la rescousse

A partir du « mercredi 29 novembre« , Frontex prévoit de déployer « 50 gardes-frontières et d’autres membres du personnel, ainsi que des équipements tels que des voitures de patrouille, afin de renforcer les activités de contrôle des frontières de la Finlande« , indique son communiqué repris par Le Figaro. La veille de l’annonce, Helsinki avait elle-même demandé l’envoi d’une « force auxiliaire de 60 fonctionnaires » de Frontex [Helsinki Sanomat].

Les annonces combinées de la Finlande et de Frontex ont aggravé l’ire de la Russie. Sur Telegram, le gouverneur de la région frontalière de Mourmansk a dénoncé des « actions provocatrices » de la part d’Helsinki, rapporte RFI. La Russie a par ailleurs « réagi [le jour-même] en annonçant renforcer la sécurité dans la région » [Le Figaro].

2. L’Allemagne durcit ses contrôles aux frontières

Mercredi 27 septembre, la ministre de l’Intérieur Nancy Faeser a annoncéle renforcement des contrôles de personnes en provenance de Pologne et de République tchèque. Des mesures mises en place dès cette semaine et qui prendront la forme de contrôles de police “flexibles et mobiles dans des lieux changeants”, explique-t-elle. L’objectif affiché par le gouvernement allemand est le suivant : “exercer une pression maximale dans la recherche des passeurs” tout en “[protégeant] les personnes qui traversent souvent clandestinement les frontières, sans eau et presque sans air”, détaille la ministre.

Depuis plusieurs mois, l’Allemagne est confrontée à une double hausse. D’une part, les demandes d’asile ont augmenté de 78 % sur les sept premiers mois de l’année 2023, selon les statistiques du ministère de l’Intérieur. D’autres part, 14 701 franchissements illégaux de frontières ont été recensés en aout dernier, soit 66 % de plus que l’année dernière à la même époque.

Avec ces mesures, l’Allemagne veut également faire passer un message aux autres Etats membres de l’Union européenne. “Si nous ne parvenons pas à mieux protéger les frontières extérieures […], les frontières ouvertes au sein de l’UE sont en danger”, a ainsi déclaré Nancy Faeser.

Depuis quelques semaines, les relations avec l’Italie se sont particulièrement tendues autour de la question migratoire. Berlin reproche à Rome de ne pas appliquer les procédures européennes et l’appelle à “mieux protéger les frontières” extérieures de l’UE. Mi-septembre, l’Allemagne avait déjà renoncé à accueillir les migrants arrivés sur l’île italienne de Lampedusa.

Le sujet est particulièrement sensible en Allemagne, à quelques jours d’élections régionales (Bavière, Hesse) dans lesquelles l’extrême droite pourrait tirer son épingle du jeu en exploitant la situation migratoire. Certaines municipalités ont récemment demandé davantage de fonds pour proposer des hébergements et des services dignes aux réfugiés arrivés récemment sur le territoire.

Depuis le début de l'année, plus de 130 000 migrants sont arrivés en Italie par la mer, contre 70 000 pour la même période en 2022
Depuis le début de l’année, plus de 130 000 migrants sont arrivés en Italie par la mer, contre 70 000 pour la même période en 2022 – Crédits : ChiccoDodiFC / iStock

Mercredi 27 septembre, l’Allemagne a décidé de renforcer les contrôles mobiles à ses frontières avec la Pologne et la République tchèque “où les flux de migrants sont en forte hausse”, explique Courrier International. La mise en place de contrôles renforcés “vise notamment à lutter plus sévèrement contre les passeurs”, détaille Der Spiegel.

Changement d’approche allemande sur l’immigration

Longtemps, l’Allemagne a accepté d’ ”accueillir les migrants et les réfugiés arrivant en Italie”, rappelle BFTMV. La décision annoncée mercredi “marque un changement par rapport à l’époque d’Angela Merkel”, note le New York Times. En témoignent les déclarations du ministre des Finances Christian Lindner à la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Ce dernier estime que son pays “ne peut plus accepter que, depuis la politique d’accueil des réfugiés du gouvernement Merkel, le contrôle de l’accès à [leur] société ait été perdu”.

Le choix de Berlin est dicté par la situation en Italie. Le nombre d’exilés arrivants sur des bateaux en provenance d’Afrique du Nord y a fortement augmenté, conduisant à une situation inédite : “plus de 130 000 migrants enregistrés jusqu’à présent cette année, contre 70 000 pour la même période en 2022″, rapporte Le Parisien. De plus, le gouvernement allemand reproche à Rome de ne pas appliquer les procédures européennes et l’appelle à “mieux protéger les frontières” extérieures de l’UE [France info].

Selon Politico, cette décision radicale relève également de la politique intérieure. Profitant de la crise migratoire, “le parti d’extrême droite AfD a bondi dans les sondages” alors que “des élections se profilent dans plusieurs régions allemandes comme […]  en Hesse, d’où est originaire la ministre allemande de l’Intérieur Nancy Faeser”.

L’espace Schengen et ses frontières en crise

D’autres Etats membres intensifient les contrôles à leurs frontières. “Un quart des pays de l’espace Schengen [a] mis en place des contrôles aux frontières affectant la moitié de la population de l’espace Schengen”, détaille Euractiv.

Après la décision de Berlin, la Pologne a “renvoyé l’ascenseur” en instaurant également des contrôles à ses frontières allemande et slovaque, relève Euractiv. En voyant les images des migrants arrivés à Lampedusa, l’Autriche n’a quant à elle “pas tardé à déclarer qu’elle commencerait à effectuer des contrôles à sa propre frontière avec l’Italie” [Euractiv].

En France également, les contrôles se sont multipliés et ont “abouti à de nombreuses interpellations : 32 000 depuis le début de l’année, 1 400 pour la seule semaine écoulée”, détaille France 3. Le 21 septembre dernier, la Cour de justice de l’Union européenne s’est d’ailleurs opposée à la stratégie française, se prononçant “contre le refus systématique d’entrer sur son territoire”, poursuit le média.

Au menu des discussions des Vingt-Sept

Dans ce contexte, “les ministres de l’Intérieur des 27 pays de l’UE se réunissent aujourd’hui à Bruxelles pour trouver un compromis sur l’une des lois les plus controversées du paquet migratoire de l’UE”, rapporte Politico.

Le gouvernement allemand ne s’opposera plus aux éléments controversés du pacte européen sur la migration et l’asile, malgré l’opposition farouche des Verts au pouvoir, qui affirment que cette décision menacerait l’‘État constitutionnel’ de l’Europe”, résume Euractiv. Les tensions allemandes mises de côté sur le sujet, il y a “de fortes chances qu’un accord soit conclu aujourd’hui”, estime Politico.

Rome et Paris sont également très attentifs à l’issue des discussions sur le pacte. Mardi dernier, le président Emmanuel Macron et la Première ministre italienne Gorgia Meloni avaient souligné ensemble “la nécessité de trouver une solution européenne à la question migratoire”, indique l’Elysée [BFMTV]. “Nous ne pouvons pas laisser les Italiens seuls”, avait pour sa part affirmé le chef d’Etat français quelques jours plus tôt [France 24].

Immigration : à l’image de l’Allemagne, les Etats membres renforcent leurs contrôles aux frontières intérieures de l’UE – Touteleurope.eu

Immigration illégale : l’Allemagne renforce le contrôle de ses frontières avec la Pologne et la République tchèque – Touteleurope.eu

Effet domino en Europe centrale : les pays réintroduisent des contrôles aux frontières – EURACTIV.fr