Contrôle du lobbying au Parlement européen – le Parquet européen alternative plus efficace ?

Après des accusations infondées dans l’affaire Huawei, le Parlement européen révise ses règles. Le Parlement européen a récemment réagi aux accusations de lobbying abusif liées à Huawei en révisant ses règles internes. Cette décision fait suite à des enquêtes sur des pratiques de lobbying controversées, notamment des soupçons de cadeaux et d’invitations à des événements sportifs, visant à influencer les législateurs européens. En réponse, le Parlement a suspendu l’accès de certains lobbyistes de Huawei à ses bâtiments et a renforcé ses procédures de transparence et de contrôle des activités de lobbying. Cette révision vise à restaurer la confiance du public et à assurer l’intégrité des processus législatifs européens.

Lorsque l’eurodéputée Giusi Princi (Parti populaire européen, PPE) a appris qu’elle était recherchée dans le cadre d’une enquête pour corruption liée au géant chinois de la technologie Huawei, elle a été « sidérée ».

Elle a été victime d’une erreur, qui a poussé le Parlement européen à revoir son règlement afin de protéger les eurodéputés des accusations infondées.

« Je ne comprends toujours pas comment ils ont pu commettre une erreur aussi flagrante », a déclaré à l’AFP l’eurodéputée italienne à propos des enquêteurs belges.

Sollicité par l’AFP, le parquet fédéral n’a pas répondu dans l’immédiat.

Comme quatre autres eurodéputés, Giusi Princi, 52 ans, membre du parti Forza Italia et du groupe PPE au Parlement européen, a été ciblée par une demande de levée d’immunité parlementaire formulée par la justice belge mi-mai.

On la suspectait d’avoir participé à un dîner à Bruxelles en juin 2024, avec des représentants de Huawei cherchant à s’attirer les faveurs de parlementaires européens.

Mais à l’époque, elle ne siégeait pas encore comme eurodéputée.

En outre, elle ne se trouvait pas en Belgique ce jour-là, mais dans sa région natale du sud de la Calabre, où elle assistait au spectacle de fin d’année de sa fille, déguisée pour l’occasion en Alice au pays des merveilles.

« Têtue comme une mule »

Se qualifiant elle-même de « têtue comme une mule », l’eurodéputée a pris un avocat, constitué un dossier de « près de 100 pages » comprenant des photos géolocalisées de sa fille en déguisement, et l’a transmis au parquet.

Mais elle n’est pas parvenue à faire reconnaître son innocence avant que l’affaire ne soit rendue publique.

Car le 21 mai, lors d’une séance plénière à Bruxelles, la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a cité son nom parmi ceux d’eurodéputés visés par les autorités belges.

Une étape requise avant de transmettre la demande de levée d’immunité à la commission des Affaires juridiques (JURI) du Parlement, compétente pour ces questions, comme le stipule le règlement du Parlement.

Mais dès le lendemain, les autorités belges ont rétropédalé, retirant leur demande de levée d’immunité de l’eurodéputée.

Une volte-face gênante qui a poussé le Parlement européen à revoir les règles.

« Je n’accepterai pas qu’on cible et qu’on ternisse l’image d’eurodéputés sans fondement solide », a déclaré Roberta Metsola fin juin lors d’une conférence de presse, annonçant ces changements.

Ses services ont indiqué qu’à l’avenir, le Parlement exigera que les demandes de levée de l’immunité d’un député comprennent des « éléments essentiels », tels qu’une description claire des faits et de l’infraction reprochée.

« Si les demandes n’apportent pas un minimum d’éléments, l’autorité requérante sera invitée à les compléter » avant toute annonce, ont indiqué les services de Roberta Metsola.

Bien que de courte durée, la mise en cause de Giusi Princi dans cette affaire a été source de stress, lui causant quelques « journées d’enfer » — et lui attirant des regards noirs de ses collègues.

« Interrogations »

Ce fiasco a relancé le débat sur la question de savoir si les autorités belges sont les mieux placées pour enquêter sur la corruption au sein de l’Union européenne.

Daniel Freund, ancien responsable de l’ONG Transparency International devenu eurodéputé écologiste, est de ceux qui souhaiteraient que le Parquet européen, qui enquête déjà sur les détournements de fonds européens, soit chargé de ces affaires.

« Le contribuable belge n’a pas particulièrement intérêt à consacrer des ressources importantes pour garantir l’intégrité des institutions européennes. Mais comme les institutions européennes sont situées en Belgique, cela relève en quelque sorte de leur compétence », a-t-il déclaré à l’AFP.

C’est la deuxième fois en moins de trois ans que le Parlement européen, seule institution élue de l’UE, est éclaboussé par un scandale de corruption.

Le scandale du Qatargate, qui avait éclaté en 2022 lorsque des perquisitions policières à Bruxelles avaient permis de découvrir 1,5 million d’euros en espèces au domicile de plusieurs eurodéputés, fait toujours l’objet de contestations devant la justice, sans procès en vue.

S’il devait se dégonfler, « cela remettrait sérieusement en question le rôle de la justice belge », a déclaré Daniel Freund, ajoutant que « des interrogations » planent également sur l’enquête Huawei.

L’enquête ciblant l’entreprise chinoise Huawei pour des soupçons de corruption au sein du Parlement européen avait éclaté en mars après des perquisitions policières en Belgique et au Portugal.

Les enquêteurs soupçonnent les lobbyistes de Huawei d’avoir offert des cadeaux, notamment des repas et des invitations à des matchs de football, à des parlementaires pour qu’ils défendent leurs intérêts à Bruxelles.

Huit personnes ont été inculpées, notamment de corruption, de blanchiment d’argent et de participation à une organisation criminelle.

Les quatre eurodéputés cités en même temps que Giusi Princi ont nié tout acte répréhensible.

A lire aussi :
«Qatargate» : le Parlement européen revoit ses règles de transparence

Comment le Parlement européen renforce ses règles de transparence depuis le scandale du Qatargate

Source :

Affaire Huawei : après des accusations infondées, le Parlement européen révise ses règles – Euractiv FR