A dix jours du Brexit, l’option d’un court report de la date de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne semble s’éloigner. Le président de la Chambre des communes interdit un troisième vote sur l’accord de retrait négocié par Theresa May avec Bruxelles, si celui-ci n’est pas modifié. De quoi aggraver la crise politique outre-Manche… et ouvrir la voie à un report plus long du Brexit, le temps de trouver un autre « deal » ?
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Pas de nouveau vote sans modification de l’accord
John Bercow, le président (speaker) de la Chambre des communes, va-t-il empêcher les députés britanniques de revoter sur l’accord du Brexit, négocié « dans la douleur » par Theresa May avec l’Union européenne ? C’est ce qu’il a annoncé lundi 18 mars, si des « changements substantiels » n’y sont pas apportés, rapporte Courrier international.
A 10 jours de la sortie du Royaume-Uni de l’UE, et après deux rejets de cet accord à la Chambre des communes, le 15 janvier et le 12 mars, la Première ministre britannique n’exclut toujours pas de faire revoter Westminster, si un nombre suffisant de députés finit par se ranger de son côté [Le Point]. Sa stratégie : en cas de ratification in extremis de l’accord du Brexit, elle demanderait alors aux dirigeants de l’UE, qui doivent se réunir lors du Conseil européen des 21 et 22 mars, un report « court, limité et technique » de la date de sortie, du 29 mars au 30 juin. A défaut, c’est un report plus long qui pourrait s’imposer, a-t-elle prévenu, impliquant dès lors que le Royaume-Uni participe aux élections en mai.
Mais arguant d’une jurisprudence parlementaire remontant au XVIIe siècle et qui n’avait plus été utilisée depuis 1912, « John Bercow a annoncé que le gouvernement ne pouvait pas représenter un texte déjà rejeté lors de la même session parlementaire« , fait savoir Le Télégramme. « Si le gouvernement veut présenter une nouvelle proposition qui n’est pas la même ou substantiellement la même, alors tout est en ordre« , poursuit le président de la Chambre, cité par le journal. Mais suite au dernier vote, qui portait sur un texte effectivement amendé et accompagné de trois nouveaux documents après d’ultimes discussions avec l’UE [Le Point], les négociations avec l’UE se sont désormais arrêtées, note Le Monde. « Le problème est que le gouvernement n’a plus aucune marge pour modifier les termes de l’accord« , Bruxelles ayant déjà exclu à maintes reprises une renégociation, relève Danielle Haralambous, analyste chez The Economist Intelligence Unit, citée par Le Télégramme.
Dès lors, selon une source gouvernementale interrogée par l’AFP, « il semble évident que le speaker a voulu écarter la possibilité d’un vote cette semaine » [BFM Business].
Cet énième rebondissement “plonge les plans du Brexit du Royaume-Uni plus loin dans la confusion”, écrit la chaîne britannique BBC.
Une crise politique qui s’aggrave
Le Brexit s’est transformé en « crise politique ouverte« , abonde Le Monde. Le camp de la cheffe du gouvernement, Theresa May, n’a pas tardé à faire savoir son indignation, tandis que l’opposition s’est félicitée de la prise de position du « speaker ».
« Nous traversons une crise constitutionnelle majeure« , a estimé Robert Buckland, un député conservateur et également conseiller juridique du gouvernement, relate Le Point. Selon lui toutefois, des « moyens de contourner ce problème » existeraient. « Y compris la possibilité de mettre fin de façon anticipée à la session parlementaire en cours, une mesure qui mènerait à la tenue d’élections générales », relate la BBC. Ce qui est problématique selon l’entourage de la Première ministre, c’est de ne pas avoir été tenus au courant : « Nous n’avions pas été informés par avance de la déclaration de M. Bercow et de son contenu« , a ainsi reconnu le porte-parole de Theresa May, en précisant qu’il préparait une réaction [Le Monde].
L’énervement du côté des pro-Brexit est d’autant plus grand que le ministre des Affaires étrangères, Jeremy Hunt, avait affirmé depuis Bruxelles avoir vu des « signes prudemment encourageants » [BFM Business] dans les récentes déclarations de plusieurs conservateurs. Theresa May a en effet entamé ces derniers jours une ultime campagne de persuasion auprès des unionistes nord-irlandais et des hard-Brexiters, dans l’intention de convaincre les 75 députés manquants de ratifier son accord.
Les exigences de M. Bercow « se mettent en travers d’un court report » du Brexit, déplore ainsi une source gouvernementale interrogée par l’AFP [BFM Business]. Contre son gré, « la Première ministre devra probablement demander une longue prolongation de l’article 50 après l’intervention de M.Bercow« , explique The Guardian.
Le Royaume-Uni pourra demander un report jusqu’à la toute dernière minute
Lundi 18 mars, des précisions ont aussi été apportées quant à la manière d’obtenir un report, une option qui devient de plus en plus probable. Selon des sources européennes, le Royaume-Uni pourrait, en théorie, demander un report du Brexit jusqu’au tout dernier moment, même « dans l’heure précédant » le divorce programmé à minuit le 29 mars, a ainsi affirmé un haut responsable européen [Le Figaro avec AFP].
Même si les 27 dirigeants devront se prononcer à l’unanimité sur une éventuelle prolongation, « il n’est pas nécessaire pour cela qu’ils se réunissent » car il existe des « procédures écrites« , poursuit le quotidien.
Pour l’heure, des bruits circulent sur un report de neuf mois qui pourrait être accordé par les Vingt-Sept à Londres (avec la tenue d’élections européennes outre-Manche). Les chefs d’Etat et de gouvernement pourront « refuser d’accorder une prorogation au Royaume-Uni, offrir une prorogation fixe de trois mois, une prorogation fixe de neuf mois ou, enfin, un arrangement plus souple, trois mois pouvant être prorogé à neuf mois, ou jusqu’à ce qu’un accord soit conclu”, énumère ainsi le quotidien The Telegraph, traduit par Courrier international.
Pour l’heure, des bruits circulent sur un report de neuf mois qui pourrait être accordé par les Vingt-Sept à Londres (avec la tenue d’élections européennes outre-Manche). Les chefs d’Etat et de gouvernement pourront « refuser d’accorder une prorogation au Royaume-Uni, offrir une prorogation fixe de trois mois, une prorogation fixe de neuf mois ou, enfin, un arrangement plus souple, trois mois pouvant être prorogé à neuf mois, ou jusqu’à ce qu’un accord soit conclu”, énumère ainsi le quotidien The Telegraph, traduit par Courrier international.
Mais « si le gouvernement ne parvient pas à présenter de nouveau l’accord de Mme May aux députés, alors les runes présagent de plus en plus une extension longue de l’article 50”, ajoute-t-il [The Telegraph].
Photo : John Bercow, président de la Chambre des communes – Crédits : Ieva Ābele, Saeima / Flickr CC BY-SA 2.0