Schengen : vers l’entrée de la Croatie, de la Bulgarie et de la Roumanie

Les trois pays d’Europe centrale et orientale sont prêts à rejoindre l’espace de libre circulation sans contrôles aux frontières intérieures. C’est ce qu’a soutenu l’exécutif européen mercredi 16 novembre, accentuant la pression sur les Etats membres pour qu’ils approuvent cet élargissement à l’unanimité.

Le panneau derrière la commissaire Ylva Johansson (à droite) en conférence de presse hier était clair : "la Bulgarie, la Roumanie et la Croatie sont prêtes à rejoindre l'espace Schengen"
Le panneau derrière la commissaire Ylva Johansson (à droite) en conférence de presse hier était clair : “la Bulgarie, la Roumanie et la Croatie sont prêtes à rejoindre l’espace Schengen” – Crédits : Alicia Perdu / Commission européenne

Bientôt trois nouveaux pays dans l’espace Schengen ?”, s’interroge France info“Il est grand temps de dire bienvenue” à la Roumanie, à la Bulgarie et à la Croatie dans la zone européenne de libre circulation, a en effet déclaré mercredi la commissaire aux Affaires intérieures Ylva Johansson, citée par La Libre.

La responsable suédoise “a [ainsi] réitéré la demande de la Commission […] d’accorder sans délai aux trois pays le droit de rejoindre l’espace de libre circulation, où les contrôles aux frontières ne sont plus, en principe, organisés” [Le Monde] et “dont profitent déjà 420 millions d’Européens” [Les Echos].

Avec 26 pays membres, l’espace Schengen ne recoupe pas totalement celui de l’Union européenne : 4 pays associés hors de l’UE y participent (Norvège, Suisse, Islande et Liechtenstein), ce qui n’est en revanche pas le cas pour 5 pays de l’UE. Au-delà de la Roumanie, la Bulgarie et la Croatie, “Chypre et l’Irlande sont les seuls autres pays de l’UE à ne pas [en] faire partie”, rappelle Politico.

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Fruit d’une longue attente

Il faut dire que le cas de la Roumanie et de la Bulgarie devient particulièrement gênant”, estime La Libre. “Ces deux Etats membres de l’Union européenne patientent depuis plus d’une décennie pour accéder à l’espace Schengen, la Commission ayant déjà estimé en 2011 qu’ils étaient prêts”, poursuit le journal belge.

En mars dernier, les gouvernements de Bucarest et Sofia avaient invité des experts à évaluer la mise en œuvre des règles de Schengen dans leurs deux pays. “Une nouvelle inspection effectuée en octobre de cette année a confirmé que la Bulgarie et la Roumanie ont non seulement poursuivi, mais aussi considérablement étendu l’application de ces normes”, indique le journal bulgare Sega. “La Commission salue dans les deux cas la ‘gestion solide des frontières’, avec une surveillance ‘efficace’ et des ‘contrôles systématiques’, ainsi que la capacité de ces deux pays à lutter contre la criminalité transfrontalière et la migration irrégulière, tout en respectant ‘les droits fondamentaux’ ” [La Libre].

Quant à la Croatie, “qui a rejoint l’UE en 2013″, sa candidature “a été évaluée positivement par les Etats de l’espace Schengen en décembre 2021, mais le pays attend toujours son accueil formel” [Le Monde]. Alors qu’il doit rejoindre la zone euro le 1er janvier prochain, son entrée dans l’espace Schengen marquerait “la pleine intégration” du pays au sein de l’Union européenne, selon un éditorialiste du journal croate Telegram.

En octobre, le Parlement européen a lui aussi adopté une résolution favorable au sujet de Sofia et Bucarest, et donné une opinion positive sur la Croatie en novembre” [Les Echos]. Si la crise migratoire de 2015 avait “freiné” l’élargissement de Schengen, “la menace russe a renforcé l’attractivité de l’appartenance à l’euro, à Schengen, à la politique de défense”, note le quotidien économique.

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Réticences de la Suède et des Pays-Bas

Reste qu’il faut encore convaincre les vingt-deux membres de l’UE et de Schengen, la décision se prenant à l’unanimité”, relève Le Monde. Alors que “la Croatie semble assurée d’obtenir un feu vert, pour la Roumanie et la Bulgarie, ce ‘n’est pas gagné’, met en garde un diplomate” dans les colonnes de La Libre.

Car “si Paris et Berlin y sont désormais favorables, certains Etats membres ne sont pas encore convaincus” [Les Echos]. A commencer par la Suède et les Pays-Bas. A Stockholm, “la proposition du gouvernement minoritaire de soutenir la candidature des trois pays pourrait être torpillée au Parlement par le parti d’extrême droite Démocrates de Suède”, fait savoir La Libre.

Mais “les Pays-Bas sont la principale source du blocage”, selon les mots d’un ambassadeur rapportés par le quotidien belge. “Le 20 octobre, les députés néerlandais ont adopté une résolution exigeant d’analyser de plus près la lutte contre la corruption et l’état de droit en Roumanie et en Bulgarie” [La Libre]. “En 2011, ce membre fondateur de l’UE, soutenu par l’Allemagne et la France, avait bloqué l’entrée des Roumains et des Bulgares dans l’espace Schengen ; onze ans plus tard, les Néerlandais n’ont pas changé d’avis”, constate Le Monde.

Prochaine étape : “le Conseil ‘Justice et affaires intérieures’, qui se réunira les 8 et 9 décembre, décidera si les trois pays sont éligibles à l’adhésion”, rapporte Sega. Selon le média, “deux votes [des Etats membres] sont en préparation – un pour la Bulgarie et la Roumanie, et un second pour la Croatie”.

https://www.touteleurope.eu/fonctionnement-de-l-ue/espace-schengen-la-commission-europeenne-favorable-a-l-entree-de-la-croatie-de-la-bulgarie-et-de-la-roumanie/

RÉFORME DE SCHENGEN : VERS UNE LIMITATION DE LA LIBERTÉ DE CIRCULATION

Les négociateurs du Parlement européen et du Conseil de l’UE ont trouvé un terrain d’entente le mardi 6 février sur une réforme du Code Frontières Schengen. Cette réforme vise à clarifier et à renforcer le cadre régissant la réintroduction et la prolongation des contrôles aux frontières intérieures de l’espace de libre circulation. 

Dans l’espace Schengen, composé de 27 pays, dont 23 États membres de l’Union européenne ainsi que l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse, plus de 400 millions de citoyens peuvent théoriquement circuler librement. Cependant, depuis 2015, de nombreux pays ont réintroduit des contrôles d’identité à leurs frontières, au sein même de l’espace de libre-circulation, invoquant tour à tour la pression migratoire, la menace terroriste, ou les deux. Actuellement, plus de la moitié des pays membres ont adopté de telles mesures que le Code Schengen permet, pour l’heure, d’instaurer de manière exceptionnelle et provisoire, en cas de menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure d’un État.

Selon l’accord trouvé mardi soir, qui doit encore être formellement approuvé par le Parlement européen et le Conseil, en cas de menace grave pour sa sécurité, un État pourra désormais autoriser des contrôles à ses frontières pour une durée maximale de deux ans, avec une prolongation possible d’un an. Cependant, ces États devront évaluer la nécessité et la proportionnalité de ces contrôles et apporter la preuve que les objectifs visés ne peuvent être atteints par des mesures alternatives. 

« La libre circulation au sein de nos frontières intérieures et la sécurité de nos frontières extérieures sont les deux piliers de l’espace Schengen. L’accord conclu aujourd’hui clarifiera et renforcera ces deux piliers« , a déclaré la ministre de l’Intérieur belge, Annelies Verlinden, dont le pays assure la présidence semestrielle du Conseil de l’UE.

Parallèlement à cette mesure, la réforme prévoit aussi des ajustements significatifs aux frontières extérieures de l’UE, notamment en cas d’urgence sanitaire majeure, en harmonisant les règles d’entrée en provenance de pays tiers et en établissant des protocoles pour les éventuelles mises en quarantaine ou tests, créant ainsi un cadre légal nécessaire si l’UE devait à nouveau instaurer un état d’urgence sanitaire. A noter que les citoyens et résidents de l’UE seront exemptés de telles restrictions d’entrée. De plus, la réforme vise à répondre aux tentatives d’États tiers d’exploiter les migrants pour déstabiliser un pays de l’UE, notamment en limitant les points de passage, une mesure particulièrement pertinente dans le contexte des actions présumées de la Biélorussie et de la Russie.