« Au service des grandes ambitions européennes » : 10 ans de partenariat entre Banque européenne d’investissement et Caisse des Dépôts

Le bras financier de l’Union européenne et l’établissement public français ont officialisé leur partenariat il y a 10 ans, le 13 juin 2013. Au fil des ans, les deux organisations ont misé sur leur complémentarité pour développer une multitude de projets en France.

La transition écologique concerne maintenant une large part des projets soutenus en commun par la Banque européenne d'investissement (siège à Luxembourg, à gauche de l'image) et la Caisse des Dépôts (siège à Paris) – Crédits : Chris Mueller / iStock | Jean-Luc Ichard / iStock
La transition écologique concerne maintenant une large part des projets soutenus en commun par la Banque européenne d’investissement (siège à Luxembourg, à gauche de l’image) et la Caisse des Dépôts (siège à Paris) – Crédits : Chris Mueller / iStock | Jean-Luc Ichard / iStock

Les 10 ans d’un partenariat entre deux organisations peu connues du grand public mais au rôle pourtant majeur. La Caisse des Dépôts (CDC), ce nom a été entendu par beaucoup de Français. Dire quelle est l’étendue de ses missions est une autre affaire. Quant à la  (BEI), en dehors des personnes suivant une carrière ou des études liées à l’Europe, nombreux sont ceux à ignorer jusqu’à son existence. Un déficit de notoriété étonnant au regard de l’importance des deux institutions.

La BEI est le bras financier de l’Union européenne. Cette dernière peut trouver une part conséquente des fonds nécessaires à la mise en œuvre de ses politiques grâce à la banque. Et sans rien coûter au contribuable européen, la BEI faisant uniquement appel aux marchés pour réaliser ses opérations. La CDC est quant à elle une institution financière publique française participant également au financement de multiples projets au service de l’intérêt général. Elle s’appuie aussi sur de nombreuses filiales et participations, au premier rang desquelles Bpifrance (financement des entreprises de petite et moyenne taille et intermédiaires), le Groupe La Poste, Transdev (société internationale de transport) ou CDC Habitat (gestion de logements sociaux).

Les chemins de la BEI et de la CDC ont souvent été conduits à se croiser. Car nombre de projets d’intérêt général pour la France le sont aussi pour l’UE. Et sont donc susceptibles d’intéresser les deux institutions. Rien d’étonnant alors à ce que BEI et CDC travaillent ensemble de longue date. “La relation entre la CDC et la BEI est ancienne, puisque dès la fin des années 1970 la BEI a accordé des prêts au groupe CDC pour financer les investissements du secteur public local”, explique Ambroise Fayolle, vice-président de la BEI. “Mais c’est vraiment à partir de 2013, avec la signature de notre accord de partenariat, que s’est affirmée notre coopération”, témoigne-t-il. Le 13 juin 2013, la relation est officialisée et les projets en commun se multiplient.

Des acteurs complémentaires

Etant donné sa vaste zone d’action et les sommes très élevées qu’elle doit gérer, la BEI ne se positionne en règle générale pas sur des opérations inférieures à plusieurs dizaines de millions d’euros. De son côté, notamment grâce au maillage de son réseau territorial, la CDC peut prendre en charge des projets de taille bien plus modeste, de l’ordre de parfois quelques centaines de milliers d’euros seulement. L’établissement français est de ce fait en capacité d’agir au plus près des territoires. Et par sa fine connaissance des réalités territoriales françaises, il est en mesure de sélectionner des initiatives à très petite échelle, qui pourraient difficilement trouver d’autres sources de financement et passeraient sous le radar de la BEI. Celle-ci ouvre ainsi des lignes de crédit que la CDC utilise pour financer des projets.

Un exemple parmi d’autres de cette coopération au niveau local : le renouvellement de la flotte des bus de L’Ile-d’Yeu (Vendée) en 100 % électrique. En 2022, la commune insulaire de moins de 5 000 habitants a été la première de France à faire ce pari, en phase avec les objectifs des transitions écologique et énergétique. Pour l’achat de quatre minibus électriques, L’Ile-d’Yeu a obtenu 650 000 euros de prêts via la plateforme Oblibus, créée conjointement par la Banque des Territoires (l’un des cinq métiers de la CDC) et la BEI. Avec une originalité : le taux d’intérêt de l’emprunt suit la trajectoire inverse des prix de l’électricité. En d’autres termes, plus l’électricité est chère, moins les taux d’intérêts sont élevés. Une manière d’encourager les décideurs publics, mieux protégés des variations des cours de l’énergie, à opter pour l’électrification.

Si le partenariat BEI/CDC offre des opportunités pour ce type de projets de petite envergure, les montants investis sont souvent bien plus importants. Le premier poste de financements est le logement, notamment social. Dans ce domaine, la coopération se chiffre en milliards d’euros de prêts accordés à des bailleurs sociaux pour la construction de nouveaux logements à loyers modérés. Autre chantier majeur : la transition écologique. Là encore, les initiatives peuvent drainer des sommes très importantes.

Concrétiser les priorités européennes

Depuis 10 ans, notre partenariat n’a cessé de s’enrichir et de s’adapter aux enjeux du financement de long terme de l’économie”, souligne le directeur général de la CDC, Eric Lombard. Cette coopération “montre bien que notre modèle unique, notre connaissance des territoires, des opérateurs économiques, nous permettent d’être le relais des grands plans d’investissements européens partout en France, au service des grandes ambitions européennes : le développement durable, le développement économique et la cohésion sociale et territoriale !”, met-il en avant.

Ce n’est pas un hasard si le développement durable est cité en premier. Car en matière de transition écologique, les projets ont en effet gagné en nombre et en importance ces dernières années, en conformité avec les priorités défendues au niveau européen. BEI et CDC apportent notamment leur soutien à des technologies d’avenir ou émergentes, dont le développement revêt un intérêt notable pour atteindre les objectifs climatiques de l’UE – 55 % d’émissions de gaz à effet de serre en moins en 2035 par rapport à 1990, puis la  en 2050.

Parmi ces secteurs stratégiques : les batteries. La BEI et la CDC, via sa filiale Bpifrance, participent notamment au financement de l’entreprise grenobloise Verkor, qui a choisi Dunkerque (Nord) pour y construire sa première “gigafactory”, nom communément donné aux usines de batteries. Ayant déjà levé 360 millions d’euros, la société a signé en avril dernier un partenariat avec Renault. L’accord avec le fabricant automobile prévoit en particulier que Verkor fournira les batteries de la future Alpine compacte, un modèle de voiture 100 % électrique. BEI et CDC sont également présentes sur un projet de gigafactory porté par la société japonaise AESC Envision, filiale du groupe chinois Envision, à Douai. Cette ville se situant également dans le Nord, le département pourrait ainsi devenir un véritable hub de la batterie en France et en Europe.

D’autres domaines retiennent l’attention de la BEI et de la CDC. Tel que l’éolien et en particulier l’éolien flottant, technologie encore très émergente. A la différence des éoliennes enfoncées dans les fonds marins, les flottantes sont arrimées à ces derniers par des câbles. Elles offrent un potentiel de déploiement bien plus important que les éoliennes offshore classiques, étant beaucoup moins tributaires des profondeurs marines et pouvant être plus éloignées des côtes, où les vents sont par ailleurs plus puissants et réguliers. En Méditerranée, la Banque des Territoires est actionnaire du projet de ferme pilote des Eoliennes flottantes du golfe du Lion, qui doivent voir le jour dans les mois à venir. La BEI finance quant à elle l’opération à hauteur de 75 millions d’euros.

Pour la BEI, ces investissements s’inscrivent directement dans sa stratégie visant à devenir la “banque européenne du climat”, avec au moins 50 % de ses financements destinés à lutter contre le changement climatique ou en atténuer les effets d’ici à 2025. Une cible déjà largement dépassée en 2022 en France, cette part atteignant 70 %. Et même au niveau global, avec 54 % des activités de la banque répondant à cette exigence. C’est également le cas pour la CDC, qui a fait de la transformation écologique l’un des axes de sa stratégie.

Un partenariat évolutif

En 10 ans, le partenariat BEI/CDC a connu des évolutions conséquentes, au gré d’un contexte économique mouvant. Nouée en 2013 dans une situation de crise économique et d’investissements de long terme en berne, la coopération a dans un premier temps porté sur les financements classiques au service public (infrastructures, santé, modernisation des transports…). Puis est venu le plan Juncker, notamment mis en place pour pallier le manque d’investissements de long terme.

Véritable succès européen, il a permis de mobiliser près de 550 milliards d’euros d’investissements entre 2015 et 2020. Au cœur de la gestion du plan, la BEI en a assuré la mise en œuvre en France, premier pays bénéficiaire, avec la CDC. Une coopération renforcée dans le cadre d’InvestEU, programme successeur du plan Juncker, et qui prévoit pour l’heure plus de 370 milliards d’euros d’investissements d’ici à 2027.

Depuis 2020, BEI et CDC ont par ailleurs dû s’adapter aux conséquences de la crise liée au Covid-19, avec notamment l’utilisation d’outils de relance pour soutenir l’économie. Ainsi qu’à l’inflation, énergétique en particulier, provoquée par la guerre en Ukraine. Dans les années à venir, la montée en puissance des projets liés à la transition écologique apparaît inéluctable dans le partenariat BEI/CDC. Une coopération qui ne semble pas près de prendre fin.