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L’UE prépare une liste d’exigences à l’attention des dirigeants chinois, afin de répondre à la « frustration » croissante des Européens.
L’UE est en train de redéfinir ses relations avec la Chine. Dans ce contexte, les Européens proposeront à Pékin d’examiner la faisabilité de projets d’investissement conjoints pour la construction de connexions ferroviaires entre l’Europe et la Chine, une priorité pour cette dernière.
« Nous sommes prêts à offrir à la Chine une relation très complète », a déclaré un haut fonctionnaire européen, qui espère que ces propositions seront « bien accueillies ».
L’ensemble de propositions et demandes, qui doit être présenté lors du sommet UE-Chine du 9 avril à Bruxelles, vise à rééquilibrer les relations commerciales et économiques entre les deux partenaires et sera discuté ce soir lors du sommet européen.
Il comprendra une série de dates butoir pour l’ouverture de l’économie chinoise, des objectifs à court terme pour renforcer la coopération bilatérale en matière d’énergie et de concurrence et pour conclure dans les semaines à venir les négociations en cours sur les indications géographiques et la sécurité aérienne.
Lors d’un événement organisé par Friends of Europe le 20 mars, l’ambassadeur chinois auprès de l’UE, Zhang Ming, a déclaré que la Chine continuera à ouvrir son économie à un « rythme raisonnable » et que les préoccupations européennes seront « progressivement prises en compte ».
Partenaire et rival
Avec le Brexit, la Chine était la question principale au menu des dirigeants européens le 20 mars, ce qui reflète bien la prépondérance de ces deux questions à Bruxelles ces dernières semaines.
Partenaire commercial, la Chine est aussi un « concurrent économique dans le domaine technologique et un rival systémique promouvant des modèles alternatifs de gouvernance ».
S’exprimant aux côtés de l’ambassadeur chinois, Gunnar Wiegand, Directeur général pour l’Asie et le Pacifique du SEAE, a souligné que qualifier la Chine de « rivale systémique » était « une déclaration de fait et non une remarque agressive ». Il n’est en effet « pas un secret » que la Chine n’est pas une démocratie pluraliste et que les deux parties ont une compréhension différente de la primauté de l’état de droit et des droits humains.
Dans le cadre du sommet des 20 et 21 mars, les 28 chefs d’État et de gouvernement de l’UE renforceront également leur boîte à outils pour lutter contre les pratiques commerciales et économiques déloyales.
La discussion vise à consolider la position des 28 à l’égard de la Chine dans la perspective d’un programme intense de réunions entre les décideurs européens et chinois sous différentes formes au cours des prochaines semaines.
Le président chinois, Xi Jinping, se rendra en Italie, en France et à Monaco dans les jours qui viennent. En avril, quelques jours après le sommet UE-Chine, Dubrovnik, en Croatie, accueillera le forum 16+1, qui réunira la Chine et 16 pays européens, dont 11 États membres de l’UE.
En outre, plusieurs ministres et responsables des affaires étrangères de l’UE devraient participer au forum « One belt, one road » (« Une ceinture, une route ») qui se tiendra à Pékin, toujours en avril.
Nouveau « réalisme »
Gunnar Wiegand, du SEAS, a indiqué que les deux parties avaient « réaffirmé leur partenariat stratégique » lors de la visite du ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, à Bruxelles la semaine dernière.
« Il y a un débat public dans de nombreux États membres, sinon tous » sur les relations bilatérales, a poursuivi le diplomate. L’ambassadeur Zhang Ming a pour sa part estimé « impératif » de mettre en place une bonne coopération bilatérale, assurant que « la Chine [était] clairement en faveur d’une plus grande ouverture ».
Gunnar Wiegand s’est toutefois plaint du « manque de progrès et de la stagnation » des négociations en cours, y compris sur la protection des indications géographiques et la sécurité aérienne, qui créent « frustration » et « impatience » côté européen.
À ce jour, les progrès réalisés pour la conclusion d’un accord d’investissement global ont également été minimes. Les entreprises européennes sont « frustrées » du « manque de certitude et de clarté quant aux possibilité d’opérer en Chine ».
Réponse chinoise
L’ambassadeur chinois a fait remarquer que son pays a bondi de 32 places dans le classement de la Banque mondiale pour la facilité de faire des affaires. La Chine occupe aujourd’hui la 46e position.
Il a également contesté les craintes d’une explosion de rachats chinois d’entreprises européennes. Selon les chiffres chinois, seulement 2 % des investissements directs étrangers du pays sont allés à l’UE.
Selon les chiffres de la Commission, la Chine, Hong Kong et Macao ne contrôlaient que 9,5 % des entreprises non-européennes dans l’UE en 2016, contre 29 % pour les États-Unis et le Canada. L’Empire du milieu représentait 3 % des actifs non contrôlés par des Européens, contre 61 % détenus par les États-Unis et le Canada.
En réponse à l’appel européen à la réciprocité dans les relations, Zhang Ming a insisté sur le fait que les deux partenaires avaient des réalités différentes en ce qui concerne divers indicateurs, comme l’indice de développement humain.
« L’important est la manière dont les différends sont traités », a-t-il estimé. La différence de systèmes politiques « ne signifie pas nécessairement que nous sommes rivaux ». « Nous espérons que nos amis européens sortiront de la mentalité de la somme nulle » pour voir que nous pouvons tous gagner d’une meilleure coopération, a-t-il conclu.
Objectifs du sommet
Afin de résoudre un certain nombre de problématiques lors du sommet UE-Chine, les négociateurs européens ont inclus dans leur proposition envoyée à leurs homologues chinois la volonté de conclure d’ici à 2020 un accord d’investissement « ambitieux » entre la Chine et l’UE.
Les négociations sur le cadre d’investissement, en cours depuis près de dix ans, « progressent trop lentement », estiment une source européenne.
Les Européens se félicitent toutefois de la nouvelle loi chinoise sur l’investissement, qui ouvrirait certains secteurs aux opérateurs étrangers, pourrait permettre de dépasser certains obstacles passés.
Les Européens veulent aussi s’accorder avec Pékin cet été sur l’élimination des barrières dans l’accès au marché pour traiter tous les opérateurs économiques sur un même pied d’égalité. La surproduction d’acier, le secteur des hautes technologies et la nécessité des règles de transparence pour les crédits d’exportation sont d’autres exemples de pierres d’achoppement.
Par ailleurs, la Commission présentera la semaine prochaine ses recommandations pour une approche européenne commune face aux risques pour la sécurité du déploiement des infrastructures de communications mobiles 5G.
Cette proposition survient suite aux soupçons de coopération entre les entreprises chinoises, telles que Huawei ou ZTE, et les services de renseignement chinois.
Avant le sommet bilatéral, ou un peu après, l’Europe veut trouver un accord sur une liste d’une centaine d’indications géographiques pour protéger les produits alimentaires et boissons européennes, et un autre sur la sécurité de l’aviation, a expliqué Gunnar Wiegand.
À la fin de l’année dernière l’Europe et la Chine n’étaient pas loin de trouver un accord sur ces deux dossiers, mais la mise en place d’un nouveau mécanisme de surveillance des investissements étrangers, pour contrôler les acquisitions chinoises, a fait dérailler les négociations.
Coopération
Selon le diplomate européen, les dossiers les plus faciles à conclure durant le sommet bilatéral seront un partenariat énergétique et une nouvelle coopération entre les autorités de la concurrence.
En outre, l’UE a proposé de travailler avec la Chine pour relier son plan d’investissement massif (celui de la nouvelle route de la soie) aux projets européens, afin d’évaluer la faisabilité de la construction de différents corridors ferroviaires.
Les deux parties restent par ailleurs unies dans leurs efforts pour parvenir à une « réforme en profondeur » de l’Organisation mondiale du commerce, y compris de nouvelles règles sur les subventions industrielles, l’éradication des transferts forcés de technologie et la résolution des crises au sein des instances d’appel.
La réforme de l’OMC est une priorité absolue pour les Européens, afin de résoudre le différend commercial mondial au sein du système multilatéral. Les États-Unis ont toutefois rejeté les propositions européennes.