Les élections européennes s’invitent en prison pour la première fois – EURACTIV.fr

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Pour la première fois, la prison de Réau en Seine-et-Marne se prépare à mettre en place des urnes à l’occasion des élections européennes. Les quelques 80.000 prisonniers en France ont presque tous le droit de vote, mais peu parvenaient jusqu’alors à l’exercer.

Pointé du doigt par le contrôleur général des prisons en 2015 pour la tendance à la radicalisation de nombreux détenus, et marqué par la spectaculaire évasion en hélicoptère de Rédoine Faïd l’été dernier, le centre pénitentiaire de Réau en Seine-et-Marne ne manque pas de challenges à relever.

Mais l’administration ne ménage pas sa peine pour faire voter les quelques 600 détenus, qui auront pour la première fois, fin mai, l’occasion d’exercer réellement leur droit de vote. Le gouvernement a promis d’installer une urne dans chaque prison. Le Conseil constitutionnel a validé in extremis la mesure, dans sa décision du 21 mars sur la réforme de la justice. Tout devrait être prêt pour que les prisonniers puissent exprimer leur choix,  » par correspondance », dans la semaine précédant le 26 mai.

« Jusqu’à maintenant, les juges d’application des peines refusaient souvent aux détenus d’aller voter, sur des motifs assez divers, notamment le fait qu’ils ne participent pas à la vie de la commune où ils votent. Et les procurations ne sont pas toujours simples à mettre en place. Le fait de mettre en place une urne en prison, ça change la donne ». Directrice adjointe de la prison de Réau, qui accueille des détenus de longue durée, Clarisse Goursolas prend à cœur sa mission de référente « élections européennes ». Des clips ont déjà été produits par des détenus pour expliquer les enjeux de l’élection, et diffusés sur la chaîne de télévision interne à la prison de Réau.

Dans cette structure qui accueille des prisonniers de longue durée, l’opération représente un moyen de tromper l’ennui, mais aussi de garder un lien avec le monde réel. Le bâtiment est récent, et les conditions de détention plutôt inhabituelles en France : chambres individuelles avec douche, tv, appartements pour accueillir 72h les familles..

« C’est un peu Ibis Budget ici, sauf que tu restes tout le temps dans l’hôtel » s’amuse Amir, 30 ans, en montrant la clé de sa cellule, qu’il porte au poignet comme tous les détenus. Malgré le soleil éclatant et de nombreuses activités proposées en cet après-midi de février, il participe à une présentation et un débat sur l’UE et les élections européennes, par la Maison de l’Europe de Paris. Une participation pas tout à fait désintéressée. « Ça fait bien sur ton dossier, de dire que tu t’intéresses à l’Europe. Mais je sais pas trop qui se présente. Mélenchon, non ? ».

Comme un certain nombre de ses codétenus, il n’a jamais voté, et doit encore s’inscrire sur une liste électorale. Encore faut-il pour cela avoir des papiers d’identité à jour, ce qui n’est pas évident pour des détenus qui purgent parfois de très longues peines.

Lors des élections présidentielles, seulement 1000 détenus avaient voté en France, sur une population de 80.0000 personnes. Si l’on décompte un tiers d’étrangers, et de rares prisonniers déchus de leur droit de vote, le nombre de participants est très modeste, et bafoue la Convention européenne des droits de l’homme.

Malgré l’effort du gouvernement, qui a mobilisé les associations comme la Maison de l’Europe qui organise une petite dizaine d’interventions dans des prisons, comme à Réau, difficile de savoir si les prisonniers voteront effectivement.

Pour Arnaud Soleranski, directeur de la prison, « les conditions d’organisation du vote sont compliquées : on a pas encore les listes électorales, ni les modalités du vote. Et il y a aussi la question des effectifs…».

Une population peu incline à voter

Autre obstacle, la population carcérale a un profil concordant avec la population la plus abstentionniste.

Plus de la moitié des détenus a moins de 30 ans, et les trois-quarts ont un niveau CAP ou inférieur. En 2014, les trois-quarts des moins de 35  ans n’avaient pas voté.

La motivation d’obtenir des remises de peine devrait sans doute plus jouer que les convictions politiques. Car peu de partis trouvent grâce aux yeux des prisonniers de Réau réunis pour parler d’Europe.

La théorie du complot fonctionne à plein régime, malgré l’absence officielle de téléphones mobiles et d’accès à Internet, et donc de réseaux sociaux en prison. Quoique.  «Il y a encore beaucoup de téléphones portables illégaux qui circulent, la majorité des détenus est jeune, ils ont du mal à se passer des réseaux sociaux », reconnait Clarisse Goursolas.

« Macron, il défend les intérêts de Rotschild, c’est sûr. De toutes façons les politiques ne sont intéressés que par l’argent » estime un très jeune ex-chef d’entreprise, sous les verrous pour 6 ans.

Mais pour les détenus plus âgés, l’heure n’est plus aux fanfaronnades.

Voter, profiter de l’état de droit de la France, et des droits afférents, oui, pourquoi pas. Notamment parce que « la liberté n’a pas de prix » souffle l’un deux.

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