L’enjeu du revenu de base intéresse aussi l’Allemagne – EURACTIV.fr

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Un projet allemand de crowdfunding pour un revenu de base a permis de récolter de quoi verser 1 000 euros par mois à 300 participants pendant un an. 13 départements français veulent aussi tenter l’expérience. Un article d’Euractiv Allemagne.

Recevoir de l’argent tous les mois, sans condition, indépendamment de tout travail ou statut familial, c’est le concept du revenu de base. Et pour quelle conséquence? Pour Henrik Maaß, habitant de Stuttgart de 33 ans, c’est simple : « on se sent libre ».

Début 2017, le jeune homme ouvre un mail qu’il pensait être un spam, intitulé « Vous avez gagné ». C’était un an après avoir contribué à un crowdfunding, qui l’avait fait entrer dans la liste de candidats pour une expérience de revenu universel, sans condition.

Pendant un an, 1 000 euros ont été versés sur son compte tous les mois. Ce qui lui a permis de ne plus vivre dans une « peur existentielle ». Ce revenu est arrivé au moment le plus opportun pour lui : sa compagne était malade, et ne pouvait plus travailler, mais les assurances ne payaient pas pour tous les médicaments et soins nécessaires. « Cette année nous a confirmé qu’en limitant les difficultés économiques, on vit plus facilement d’une manière générale, surtout dans des situations difficiles », explique-t-il.

Une start-up allemande teste le revenu universel «version loterie»

Miko n’a que 5 ans mais va toucher 1 000 euros par mois pendant un an : le petit Berlinois est l’un des heureux cobayes d’une start-up qui entend tester le « revenu de base » ou « revenu universel » dans une Allemagne plutôt dubitative. Un article de notre partenaire, Ouest-France.

Henrik Maaß est chercheur à l’université d’Hohenheim, à Stuttgart. Ses recherches portent sur le potentiel des légumineuses pour un système nutritif plus durable. Ses travaux sont payés à mi-temps, mais il travaille plus que ça. Le revenu de base lui a donc permis de continuer dans cette voie malgré la maladie de sa compagne.

« Le confort qu’offre le revenu de base est un prérequis important pour pouvoir penser à l’adaptation sociale et écologique », estime-t-il. Une société qui appliquerait cette idée serait bien plus accueillante.

L’Allemand fait partie des 300 personnes qui ont bénéficié du programme « Mein Grundeinkommen » (« Mon revenu de base »), qui a déjà récolté l’équivalent de 300 ans de revenus à 1 000 euros par mois. La plateforme tente actuellement d’augmenter le nombre de bénéficiaires.

L’idée d’un revenu universel européen (eurodividende) est encore loin, mais d’autres expériences font leur chemin.

Emploi finlandais et pauvreté française

Le projet pilote finlandais sur le revenu de base sans condition, qui a duré deux ans, a touché à sa fin. Contrairement à l’initiative allemande, celui-ci a été mis en place par le gouvernement  : c’était le premier projet public de ce genre en Europe.

Pendant deux ans, le gouvernement finlandais a ainsi versé 560 euros mensuels à 2 000 chômeurs. Cela correspond aux allocations chômage qu’ils auraient reçues, mais les participants n’ont pas dû faire les démarches habituelles et pouvaient occuper des emplois à mi-temps. Une équipe de chercheurs de l’institut social et de Kela a suivi de près tout le processus.

Ces citoyens ont fait preuve « d’une plus grande confiance dans l’avenir et dans les opportunités qu’ils pourraient avoir », assure Minna Ylikännö, chercheuse à Kela. Les participants se sont également montrés plus heureux, en meilleure santé et moins stressés. Ils n’ont cependant pas trouvé du travail plus rapidement que les chômeurs habituels. Le pays a donc décidé d’y mettre fin.

Pourtant, l’expérience finlandaise n’est pas pertinente pour tous les cas de figure. L’impact du revenu de base n’est en effet pas le même s’il s’applique à toute la population, ou à une grande partie de celle-ci, et non à 2 000 chômeurs.

Le gouvernement finlandais renonce au revenu universel

La Finlande a été le premier pays à mener une expérience nationale sur le revenu universel de base. Mais les premiers résultats ne sont pas concluants selon le ministre des Finances, dont la parti conservateur a décidé d’enterrer le sujet.

En France, la question intrigue aussi. Ainsi, 13 des 101 départements français souhaitent transformer certaines aides sociales, comme le revenu de solidarité active (RSA) en revenu de base pour les personnes les moins fortunées et les moins de 25 ans.

Le taux de pauvreté chez les moins de 25 ans est en effet deux fois plus élevé que chez les 25-50 ans, souligne Stéphane Troussel, président (PS) du conseil départemental de Seine-Saint-Denis. Une initiative qui ne pourra cependant pas être mise en place sans l’aval du gouvernement, pour l’instant très sceptique.

Les différents projets qui naissent un peu partout autour du revenu de base ont des objectifs variables. « En France, il s’agit de limiter la pauvreté. En Finlande, l’idée était de permettre aux chômeurs à trouver plus rapidement un travail. . Nous, nous voulons savoir quel effet aurait le revenu de base sur les individus », explique Steven Strehl, à l’initiative de « Mein Grundeinkommen ».

« Nous assistons à la plus grande montée en puissance d’une idée politique », assure Michael Bohmeyer, le fondateur du projet. Outre l’impact d’un coup de pouce financier, il veut surtout lancer un débat sociétal, et sur la possibilité d’utiliser un revenu universel inconditionnel pour atteindre.

Depuis fin 2018, on peut participer à « Mein Grundeinkommen » à deux. L’idée est ici d’analyser les conséquences de la subvention sur les relations interpersonnelles. « Si on élimine les problèmes d’argent, on peut changer la qualité d’une relation », estime le fondateur. Les bénéficiaires se verraient en effet plus à même de prendre soin l’un de l’autre, comme ça a été le cas pour Henrik Maaß.

Le sens du travail

« Nous sommes toujours prêts à mettre en cause la valeur du travail non payé. Mais toutes les activités rémunérées actuelles ont-elles vraiment un sens ? », interroge Mara-Daria Cojocaru, chargée de cours de philosophie à l’université de Munich.

Elle regrette qu’un grand nombre de citoyens aient un besoin vital de gagner plus d’argent. Elle se rappelle par exemple de cette vieille femme qui lui a servi un café à 6h du matin dans une gare. « On dit toujours que le travail donne un sens à la vie, mais je suis sûre que cette dame aurait autre chose à faire que de me servir du café à l’aube. »

L’enjeu, c’est bien sûr la transition vers plus de robotisation. Le revenu de base inconditionnel pourrait être la solution pour que la robotisation de larges pans de l’économie ne crée pas de catastrophe sociale, souligne la philosophe.

Il permettrait aux citoyens qui perdent leur travail à cause de la numérisation et de l’utilisation croissante des machines de ne pas craindre pour leur survie. « Les mineurs du charbon ne se transformeront pas du jour au lendemain en spécialistes informatiques, mais il faut tout de même que nous éliminions ce secteur. Il faut donc trouver comment faire pour que les conséquences soient vivables. »

Meilleure redistribution

L’idée d’un revenu inconditionnel est essentiellement qu’il serait disponible à tous, justement. « Cela enlève la dimension ‘charitable’ des aides », explique Mara-Daria Cojocaru. « Le grand chef d’une entreprise comme Siemens le toucherait aussi. Qu’en ferait-il ? »

Pour Henrik Maaß, « un revenu universel ne rend pas automatiquement le monde meilleur, mais il permet aux gens d’avoir plus de temps pour penser à la manière dont ils pourraient rendre le monde meilleur ».

Daniel Zamora, de l’Université libre de Bruxelles, prévient toutefois que le revenu inconditionnel est une capitulation face à l’évolution néolibérale. Le chercheur pense que cette garantie mènerait à « la généralisation du travail précaire ». Dans la Silicon Valley, les entrepreneurs soutiennent l’idée d’un revenu universel, qui leur permettrait de se passer de contrats de type CDI sans pour autant voir le pouvoir d’achat diminuer.

Il souligne donc le point crucial du niveau de revenu proposé, tout comme les auteurs Nick Srnicek et Alex Williams. Il doit être assez élevé pour permettre aux citoyens de refuser un travail, sans quoi il exercerait une pression encore plus forte sur les salaires et créerait encore plus de « jobs de merde ».

Eurodividende

Philippe van Parijs, cofondateur du Réseau mondial pour le revenu de base (BIEN), estime aussi qu’un revenu universel partiel pourrait compenser les divergences économiques des pays de la zone euro. Sa proposition : l’eurodividende.

Comme les bénéfices des entreprises sont régulièrement distribués à leurs propriétaires, les profits réalisés grâce à l’intégration européenne pourraient être distribués à la population européenne. Le montant varierait d’un pays à l’autre, en fonction du coût de la vie et serait adapté aux contextes nationaux. Ce revenu serait plus élevé pour les personnes âgées que pour les jeunes. En moyenne, il s’élèverait à 200 euros par mois. Philippe van Parijs imagine financer cette dépense grâce à une assiette fiscale commune consolidée des entreprises d’environ 20 %.

La Commission européenne a aussi réfléchi à la question et publié en avril 2017 un document de réflexion appelant ses membres à « innover dans le contexte national ou européen ». « Des essais sur le revenu de base en Finlande à la mise en place d’un revenu minimum garanti en Grèce, la tendance est à l’essai de nouveaux modèles adaptés à de nouvelles réalités ».

Le parlement allemand s’est aussi penché sur la proposition de Philippe van Parijs. L’auteur du projet de rapport sur l’initiative l’a jugée trop vague et estimé qu’elle laissait trop de questions en suspens. Elle ne précise par exemple pas si elle se fonde uniquement sur une réforme des systèmes de TVA ou sur les recettes de TVA perçues par l’État dans le cadre du système des ressources propres de l’UE.

En outre, l’eurodividende devrait d’abord être lié au budget à long terme de l’UE, dans lequel des montants annuels maximums sont fixés pour chaque politique. Enfin, les traités européens n’offrent sans doute pas de base juridique pour la mise en œuvre d’un revenu inconditionnel sous la forme d’un eurodividende, affirme le projet de rapport. Le travail est donc loin d’être fini.

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