Le commerce extérieur de l’Union européenne

Un article publié par notre partenaire Toute l’Europe


Quel est le poids de l’Europe dans le commerce mondial ? En quoi consiste sa politique commerciale, entre libre-échange et défense contre la concurrence déloyale ? L’essentiel à savoir sur le sujet en 3 minutes.


L’Europe, pôle commercial mondial

L’Union européenne est aujourd’hui la première puissance commerciale du monde, devant la Chine et les Etats-Unis. A eux trois, ils représentent près de la moitié (45%) du commerce international.

Hors commerce intra-communautaire (qui représente le double du commerce extérieur), les échanges de biens (exportations et importations) de l’UE avec le reste du monde représentent environ 15% du commerce mondial de biens. En 2017, les exportations européennes atteignent 1 879 milliards d’euros (derrière la Chine et devant les Etats-Unis), et ses importations 1 860 milliards d’euros (derrière les Etats-Unis et devant la Chine). Sa balance commerciale, excédentaire depuis 2013, atteint alors 19 milliards d’euros.

Ses principaux partenaires commerciaux sont les États-Unis, plus importante destination des exportations européennes en 2018, puis la Chine, la Suisse, la Russie et la Turquie. Avec le Japon et la Norvège, ces marchés représentent plus de la moitié des exportations de biens européens. Ces sept pays sont également les plus grands fournisseurs de biens importés par l’Union européenne, la Chine se classant ici au premier rang.

La carte ci-dessous, réalisée par l’office de statistiques européennes Eurostat, représente les principaux partenaires commerciaux de l’Union européenne.

Partenaires commerciaux de l'Union européenne (c) Eurostat 2019

L’UE est le plus grand exportateur mondial de produits manufacturés et de services, et notamment le premier pôle touristique mondial. Selon la Commission européenne, 36 millions d’emplois européens, soit un travailleur sur sept, dépendraient du commerce extérieur.

Parmi les États membres de l’UE, l’Allemagne possède de loin la plus grande part du commerce extra-européen. Elle totalise ainsi 28 % des exportations européennes de biens à destination des pays tiers et près d’un cinquième (19 %) des importations européennes en 2018. Elle est suivie par le Royaume-Uni (11 %), l’Italie (11 %) et la France (10 %) pour les exportations de biens, et par les Pays-Bas (15 %), le Royaume-Uni (14%) et la France (9%) pour les importations.

L’Union a ainsi pu ces dernières années maintenir une position relativement forte dans le commerce de biens, tout en renforçant son rôle dominant dans le commerce des services, et ce malgré le ralentissement mondial entraîné par la crise économique de 2008.

La politique commerciale européenne

La politique commerciale de l’Union européenne est l’une des politiques communes les plus intégrées. Elle relève pour l’essentiel de la compétence exclusive de l’Union européenne, ce qui permet à l’UE de défendre ses intérêts internationaux d’une seule voix.

Celle-ci est alors représentée par la Commission européenne auprès des Etats tiers (c’est elle qui négocie par exemple les accords de libre-échange) et des organisations internationales. Les Etats membres et le Parlement européen conservent toutefois des prérogatives importantes. Les premiers, à travers le Conseil de l’Union européenne, donnent mandat à la Commission pour la négociation des accords, sont consultés par cette dernière pendant le processus de négociations et décident de la signature et de la conclusion de ces accords (à la majorité qualifiée ou à l’unanimité selon les cas). Le second dispose quant à lui d’un droit de veto sur la ratification des accords.

Régie par les traités, la politique commerciale européenne s’efforce de contribuer « au développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs, ainsi qu’à la réduction des barrières douanières et autres » (article 206 TFUE). La libéralisation du commerce mondial est ainsi l’un de ses objectifs, rappelle la Commission européenne.

Dès l’origine, le traité de Rome de 1957 prévoit la réalisation d’un Marché commun et, à ce titre, d’une Union douanière. Celle-ci implique non seulement une liberté de circulation des marchandises entre les Etats membres, mais également des règles communes envers les pays tiers. En 1968, la Communauté européenne instaure alors un tarif douanier commun à tous les Etats membres, qui s’applique aux importations de marchandises franchissant les frontières extérieures de l’union.

Aujourd’hui, et bien que les deux dimensions soient liées, la politique commerciale de l’Union européenne, qui concerne le commerce international, est le corollaire du commerce intra-européen (marché unique). Au niveau de la Commission européenne par exemple, les responsabilités incombent à deux personnes distinctes (Cecilia Malmström pour la politique commerciale, Elżbieta Bieńkowska pour le marché intérieur).

L’un des axes principaux du commerce extérieur de l’UE est le développement des échanges bilatéraux avec les pays tiers, concrétisés ou non par des accords commerciaux, notamment de libre-échange. L’Union européenne compte notamment occuper la place que la réorientation protectionniste engagée par le président américain Donald Trump laisse vacante, y compris sur le terrain de la régulation du commerce mondial, tandis que la concurrence des pays émergents et notamment de la Chine se renforce.

A cet effet, la Commission européenne a entamé il y a quelques années des négociations avec un nombre croissant de pays. Si le projet de partenariat avec les Etats-Unis (TAFTA) est aujourd’hui enterré, des accords conséquents ont été conclus avec le Canada (CETA, entré en vigueur en septembre 2017), le Japon (JEFTA, en vigueur depuis février 2019), Singapour et le Vietnam (en cours de finalisation). D’autres sont en cours de négociation avec le Mexique, l’Australie, la Nouvelle-Zélande…

Une autre dimension concerne la défense de l’Union européenne contre les pratiques déloyales de ses partenaires, qu’elle assure notamment via des instruments antidumping ou anti-subvention. Des outils récemment modernisés pour prévenir un changement de statut de la Chine à l’OMC fin 2016. A l’inverse, elle octroie un certain nombre d’avantages commerciaux aux pays en développement et aux pays les moins avancés, à travers un système dit de « préférences généralisées ».

La carte ci-dessous, réalisée par la Commission européenne, présente les accords commerciaux de l’Union européenne avec des pays tiers. Les pays en marron foncé sont ceux avec lesquels l’UE a adopté de tels accords, en marron clair ceux dont l’accord doit encore être formellement adopté ou ratifié, en jaune ceux dont l’accord est en cours de négociation.

Cliquez sur l’image pour agrandir.

Carte des accords commerciaux de l'Union européenne

Débats et perspectives

Le commerce extérieur européen génère son lot de débats et de polémiques. Une partie de l’attention est portée sur les questions relatives à la mondialisation, au libre-échange et au protectionnisme.

Les controverses se sont un temps focalisées sur les accords de libre-échange négociés par la Commission européenne avec certains pays tiers, à commencer par les Etats-Unis (TTIP/TAFTA) puis le Canada (CETA). D’un côté, l’Union européenne promeut les gains économiques de tels accords. De l’autre, un certain nombre de voix se sont élevées pour critiquer l’opacité des négociations, les risques d’une augmentation des échanges pour l’agriculture européenne (en termes d’emplois ou d’alimentation), ou encore ceux liés à l’instauration de tribunaux d’arbitrage privés pour régler les litiges commerciaux entre Etats et entreprises. Des accusations qui ont entraîné un certain nombre de réponses en Europe comme en France : les tribunaux ont été réformés pour garantir l’indépendance des juges (la première de ces « Cours internationales d’investissement », ou « ICS », a été mise en place à travers l’accord UE-Mexique), les mandats de négociation sont désormais publics et les exigences environnementales vis-à-vis des partenaires commerciaux ont été renforcées. De fait, les accords signés par la suite (Japon, Singapour…) ont suscité une opposition beaucoup plus faible.

Par ailleurs, les intérêts européens sont parfois exposés à la concurrence déloyale de pays tiers, notamment la Chine. L’Union européenne s’efforce ainsi de rétablir une meilleure réciprocité dans ses échanges extérieurs. Un point sur lequel elle a fait des pas importants ces dernières années, comme avec le renforcement de ses instruments de défense commerciale (2016) où un filtrage accru des investissements étrangers (2019). Elle pourrait aller plus loin à l’avenir, comme l’y invite notamment la Commission européenne dans son document de réflexion sur la mondialisation. Dans le même temps, l’ascension des pays émergents offre de nouvelles opportunités de développement pour l’Union européenne, qui multiplie ainsi les négociations commerciales avec ces derniers.

Enfin, la remise en question du multilatéralisme, déjà entamée avec l’immobilisation de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) dans les années 2000, s’est fortement accentuée avec la présidence américaine de Donald Trump. L’Union européenne a dû ainsi réagir à un premier relèvement des droits de douane outre-Atlantique, en faisant de même sur certains produits américains et en saisissant l’Organe de règlement des différends de l’OMC. Parallèlement, elle mène une politique active, auprès des Etats-Unis et du Japon, pour réformer l’OMC.