Joe Biden : ce que le nouveau président américain change pour l’Europe

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Actualité


21.01.2021

Boran Tobelem

Avec l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, l’Union européenne pousse un soupir de soulagement. Mais que peut-elle concrètement espérer de cette présidence ? A l’évidence, une diplomatie plus apaisée. Ce qui ne signifie pas que l’ensemble des divergences d’intérêts et des contentieux de l’ère Trump disparaîtront pour autant.

Le style diplomatique de Joe Biden devrait tout d'abord trancher avec celui, très atypique, de son prédécesseur - Crédits : Gage Skidmore / Flickr CC BY-SA 2.0

Le style diplomatique de Joe Biden devrait tout d’abord trancher avec celui, très atypique, de son prédécesseur – Crédits : Gage Skidmore / Flickr CC BY-SA 2.0

Sans conteste, le mandat de Donald Trump a mis à mal les relations transatlantiques. Les Européens ont fait les frais du mépris affiché du président sortant pour le multilatéralisme et les institutions internationales. Entre le retrait de l’accord de Paris sur le climat, la guerre commerciale initiée contre l’Union européenne, la menace d’un désengagement de l’Otan ou encore l’abandon du traité sur le nucléaire iranien, les Etats-Unis n’ont cessé de saboter des réalisations de la diplomatie internationale auxquelles ils avaient eux-mêmes contribué. 

Le nouveau locataire démocrate de la Maison Blanche fait donc espérer à beaucoup d’Européens la fin de ce travail de sape. A de nombreux niveaux, la politique américaine à l’égard de l’UE devrait effectivement être plus constructive et certains dossiers cruciaux, le climat notamment, en mesure d’avancer. Mais les Européens ne pourront s’appuyer sur un Joe Biden totalement acquis à leur cause. Les confrontations entre les intérêts américains et européens ne prendront pas fin avec la victoire du camp démocrate. 

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Retour du multilatéralisme

Le style diplomatique de Joe Biden devrait tout d’abord trancher avec celui, très atypique, de son prédécesseur. Difficile d’imaginer le président américain depuis le 20 janvier régler ses différends à coups de tweets vengeurs. Sa manière de s’entretenir avec l’Europe, comme avec le reste du monde, sera celle d’une diplomatie bien plus classique, polie et respectueuse. A l’image de la pratique de Barack Obama, dont il était le vice-président (2008-2016). Par ailleurs, « Joe Biden est entouré de beaucoup de conseillers qui faisaient partie de son administration« , soulignait en novembre Jeff Hawkins, ancien diplomate américain et chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), interrogé par Toute l’Europe quelques jours après la victoire du démocrate. « Le multilatéralisme fait partie de son ADN« , indiquait-t-il. 

Car au-delà d’un style plus policé, le président Biden signe le retour d’un dialogue multilatéral avec les autres nations, notamment via les grandes organisations internationales, dénigrées au profit de relations bilatérales par Donald Trump. « Il y a clairement une volonté de retour sur la scène internationale et d’une diplomatie active sous Joe Biden« , analysait Célia Belin, politologue invitée à la Brookings Institution à Washington et spécialiste de la politique étrangère américaine, également interviewée par Toute l’Europe la semaine suivant l’élection du nouveau dirigeant américain. Ce retour a déjà commencé à s’effectuer par celui dans l’accord de Paris sur le climat, dont les Etats-Unis s’étaient officiellement retirés le 4 novembre sous l’impulsion de Donald Trump. Une décision sur laquelle Joe Biden est revenu dès le premier jour de son mandat. De quoi faire progresser le traitement de la question climatique, très importante aux yeux de l’Union européenne, et à ce titre améliorer les relations transatlantiques. 

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Sur la lutte contre le Covid-19 également, priorité du président américain, « on devrait assister à un Joe Biden agissant de concert avec ses alliés et ne faisant pas cavalier seul comme Donald Trump« , estime Jeff Hawkins. Le nouvel arrivant à la Maison Blanche a promis durant sa campagne de revenir dans l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dont le président républicain avait annoncé le retrait américain en mai dernier et qui doit prendre effet le 6 juillet 2021. Promesse répétée dès le premier jour de son mandat le 20 janvier, l’immunologue et conseiller de la Maison-Blanche en charge du Covid-19, Anthony Fauci, ayant par ailleurs confirmé le lendemain que les Etats-Unis respecteraient leurs obligations financières vis-à-vis de l’organisation. L’Union européenne peut ainsi avoir l’espoir de mieux coordonner ses efforts contre la pandémie avec son partenaire outre-Atlantique. 

Par ailleurs, la capacité du chef de l’exécutif à agir de façon multilatérale ne sera pas aussi limitée que ce qui pouvait être envisagé. En effet, par leur double victoire à des élections sénatoriales partielles le 5 janvier 2021 en Géorgie, les démocrates ont repris le contrôle du Sénat. La marge de manœuvre de Joe Biden en termes de politique étrangère s’en trouve ainsi accrue. Signer et faire appliquer des accords internationaux sera, par exemple, plus simple que si la chambre haute du Congrès était restée républicaine.

Un discours d’investiture qui appelle à « l’unité » et à « réparer les alliances« 

L’unité était sans aucun doute le maître-mot du discours inaugural de Joe Biden au Capitole à Washington D.C., le 20 janvier. Les Américains connaissent un « moment historique de crise et de défi« , a affirmé le nouveau président, « et l’unité est la voie à suivre« . Evoquant indirectement le mandat de Donald Trump, il a ajouté : « recommençons à nous écouter les uns les autres, à nous entendre, à nous voir« . Unité entre citoyens des Etats-Unis mais également avec les alliés historiques du pays. S’il n’a pas mentionné l’Europe ni aucun autre territoire étranger, M. Biden a cependant bien fait savoir qu’il comptait mettre un terme à la posture isolationniste adoptée par son prédécesseur. « Nous allons réparer nos alliances et nous engager à nouveau avec le monde« . La première « réparation » est donc intervenue sur le plan climatique, quelques heures seulement après le discours d’investiture, avec le retour dans l’accord de Paris. Le décret signé par Joe Biden devrait prendre effet d’ici fin février.

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Des intérêts encore divergents 

Mais quand bien même l’arrivée de Joe Biden acte un certain retour vers le multilatéralisme, l’Europe et les Etats-Unis ont toujours des intérêts entrant parfois en confrontation. En matière commerciale notamment. « Ce n’est pas parce que Joe Biden est élu que tous les contentieux sur le commerce vont disparaître du jour au lendemain« , prévient Jeff Hawkins. « Il existe des irritants commerciaux des deux côtés de l’Atlantique amenés à perdurer« , abonde en ce sens Célia Belin. 

Ainsi, des sujets brûlants pourraient continuer de susciter des crispations dans les relations transatlantiques, tels que la rivalité entre les géants de l’aéronautique : l’américain Boeing et l’européen Airbus. Situation tendue également concernant la taxation du numérique, dont les principales entreprises sont américaines et payent très peu d’impôts en Europe, en comparaison de leur activité. Là encore, si les conflits ne devraient pas disparaître, c’est le style de Joe Biden qui tranchera avec celui de Donald Trump. « En ce qui concerne les différends entre Boeing et Airbus, est-ce que Biden sera sensiblement différent de Trump ? Dans son approche oui, il procédera de manière ordonnée, pas sur un coup de tête et n’agira pas de façon totalement unilatérale« , considère Jeff Hawkins. Quant à une reprise du projet de traité de libre-échange transatlantique tel qu’il était négocié sous Barack Obama, elle « n’est pas imaginable » pour Célia Belin, les peuples américain et européens s’étant « prononcés pour davantage de protectionnisme« . D’après la politologue, « il est plus probable qu’il y ait des négociations sectorielles et un rapprochement plus général établi sur l’idée que les Etats-Unis et l’Europe sont des compétiteurs, des rivaux, sur les questions commerciales mais pas des ennemis« . 

En termes de défense aussi, les problématiques de burden sharing (partage du fardeau que représentent les dépenses militaires) demeureront au sein de l’Otan, à laquelle 21 Etats membres de l’Union européenne sur 27 appartiennent. Donald Trump avait menacé de quitter l’Alliance atlantique, jugeant que l’effort financier des alliés des Etats-Unis en matière de défense était trop faible. Mais « la question du burden sharing existait déjà sous Barack Obama, elle n’a pas été inventée par Donald Trump« , relève Jeff Hawkins. Pour le spécialiste de la politique étrangère américaine, « la différence est que le président Biden ne remettra jamais en question l’alliance avec les partenaires européens« . « Il sera un partenaire qui aura ses intérêts, ses demandes, comme chaque partenaire, mais sur une base de respect« .  

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Le commerce extérieur de l’Union européenne

L’accord sur le nucléaire iranien enfin, dossier de politique étrangère très sensible et de haute importance pour les institutions européennes, a peu de chances de voir une volte-face de la part des Etats-Unis, selon Célia Belin. Les Iraniens ne respectent plus les termes du plan d’action conjoint et dépassent largement la production d’uranium enrichi autorisée depuis que Donald Trump a annoncé en mai 2018 le retrait des Etats-Unis de l’accord de Vienne, signé en 2015 sous Barack Obama. Les dommages causés par cette décision changent la donne et éloignent la possibilité d’une réintégration américaine similaire à celle de l’accord de Paris sur le climat, et ce malgré la volonté de Joe Biden de reprendre les négociations avec l’Iran.

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