Hervé Morin : « L’Europe des régions a besoin d’un rééquilibrage »

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24.09.2018

Propos recueillis par Vincent Lequeux – en partenariat avec l’association des Régions de France

Le Congrès de Régions de France se tient les 26 et 27 septembre à Marseille. Au cœur des débats de cette édition 2018 : l’Europe. Politique de cohésion, politique agricole commune, futur budget… le président de l’association des Régions de France Hervé Morin en détaille les enjeux.

Hervé Morin, président de l'association des Régions de France

Hervé Morin, président de l’association des Régions de France

« Les Régions au cœur de l’Europe » : c’est le thème du prochain Congrès de Régions de France. Pourquoi l’avoir choisi ?

Hervé Morin : Tout d’abord parce que certains débats européens sont extrêmement importants pour l’avenir des territoires : à la fois les fonds structurels européens et la politique agricole commune. Ensuite, parce que le budget post-2020 conduira probablement à des réductions significatives des crédits structurels et agricoles, liées notamment aux nouvelles politiques imposant des économies et d’autre part à la sortie des Britanniques de l’UE.

Sur ces sujets, il est bon que l’ensemble des régions d’Europe s’expriment et rappellent l’importance des fonds structurels pour le développement du territoire. Enfin, ce n’est pas non plus inutile au moment où l’Etat français est sur un réflexe de recentralisation contraire à la modernité.

Regrettez-vous que la Commission ait proposé de réduire le budget de la politique de cohésion ?

H. M. : Il y a nécessairement besoin d’un rééquilibrage au sein de l’Europe. Quand on regarde l’évolution du PIB des régions, on constate que certaines, dont toutes celles d’Europe centrale et orientale, ont bénéficié très largement des fonds structurels européens. Aujourd’hui, leur niveau de développement impose un rééquilibrage vers d’anciens territoires, notamment à l’ouest de l’Europe, qui ont souffert d’un vaste mouvement de désindustrialisation.

Mais cela ne doit pas conduire à exclure des régions de tout mécanisme européen. Il doit rester des fonds structurels y compris pour les régions les plus riches. Il n’y a aucune raison que l’Ile-de-France ne puisse plus en bénéficier pour financer de grands programmes d’infrastructures et d’équipements.

Il faut également des moyens significatifs : sans fonds structurels européens, les territoires les plus en difficulté souffriront plus encore, mais également des politiques comme l’innovation, la recherche, les universités… On ne doit pas vivre une raréfaction brutale et considérable des fonds structurels européens. On a donc besoin d’être mobilisés et combatifs, à l’échelle européenne, pour que les crédits de cohésion ne soient pas les grands perdants de la prochaine programmation budgétaire européenne.

Vous évoquez un mouvement de « recentralisation » en France : comment se traduit-il pour vous ?

H. M. : Ce n’est pas le moment de faire marche arrière sur la gestion des crédits de cohésion par exemple. Le ministère de l’Agriculture n’a toujours pas digéré qu’une partie du second pilier de la PAC soit désormais gérée par les régions. Et à un moment on a eu le sentiment que l’administration centrale, la technostructure, voulait prendre sa revanche.

Si l’on veut des politiques cohérentes, efficaces, agiles, il faut au contraire faire en sorte que les régions gèrent l’ensemble de ce pilier. On ne peut pas continuer avec un système où les politiques sont décidées par les régions, les dossiers instruits par les directions départementales (DDTM) qui ont été progressivement décapitées par les révisions générales des politiques publiques (RGPP) successives, et qu’ensuite les paiements soient gérés par une agence d’Etat dont on a vu les dysfonctionnements majeurs.

Le chef de l’Etat m’a dit, lorsque je l’ai interrogé au salon de l’Agriculture, qu’il était favorable à un transfert de la totalité du second pilier de la PAC aux régions. J’espère qu’il tiendra cet engagement, sinon il y perdra en efficacité.

Les autres régions d’Europe disposent de plus d’autonomie qu’en France. Doit-on progressivement mettre fin à cette spécificité ?

H. M. : Le président de la République est souvent vu comme président des start-ups, c’est à dire d’un modèle qui génère de la coopération, de la participation et qui est source d’horizontalité. Au nom de la modernité, on aimerait trouver cette même inspiration pour la gouvernance publique.

La question n’est pas de savoir qui a le pouvoir, mais comment assure-t-on l’efficacité du système public. Et celle-ci repose sur un « régalien » économique appartenant à l’Etat, et des politiques de proximité très largement décentralisées. C’est le modèle des pays européens qui fonctionnent le mieux.

Les régions sont-elles aujourd’hui suffisamment impliquées dans les décisions européennes ?

H. M. : Non, mais contrairement à l’image qu’on veut bien leur en donner, l’administration européenne est très à l’écoute des régions, beaucoup plus que l’administration française. Parce que les Européens ont une forte culture fédérale ou d’autonomie. A chacune de nos rencontres à Bruxelles, les administrations sont à l’écoute, les fonctionnaires comprennent nos problématiques. Mais on fait porter à l’Europe des péchés qui bien souvent viennent de la complexité que l’administration française donne aux règles européennes : on surajoute beaucoup.

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