Glyphosate: craignant une crise économique, Bayer durcit le bras de fer avec les plaignants – novethic.fr

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Marina Fabre

Malgré de bons résultats financiers liés à crise du Covid-19, Bayer ne compte pas relâcher la pression concernant le glyphosate. Au contraire, lors de l’Assemblée générale, le DG du groupe a annoncé durcir les négociations en cours avec les 52 000 personnes qui ont porté plainte concernant les effets cancérigènes du Roundup. Le risque financier est énorme pour le géant qui ne trouve pas d’issue à la crise provoquée par le rachat de Monsanto. 

Les affaires sont revenues à la normale pour Bayer. C’est en tout cas ce qu’on pouvait penser en assistant à l’Assemblée générale virtuelle du géant le 28 avril dernier. Les actionnaires du groupe allemand ont voté à plus de 92 % pour la stratégie de la direction. L’année dernière, les investisseurs avaient rejeté à 55,5 % les « actions du directoire », du jamais vu. Un vote qui avait poussé le président de l’entreprise, Werner Wenning à la démission alors qu’il avait porté avec le directeur-général Werner Baumann  le rachat de Monsanto. Cette fois, le ton a changé. Il faut dire que les résultats sont particulièrement bons. Le groupe allemand enregistre une hausse de 6 % de son chiffre d’affaires pour le premier trimestre. Le Covid-19 a en effet poussé les citoyens a réalisé des stocks de médicaments. 

Mais les « effets bénéfiques du Covid-19 » sur le groupe ne reflètent pas une tendance de fond. Werner Baumann a averti qu’il n’était pas capable d’évaluer l’impact de la pandémie sur ses résultats annuels. Surtout, à long terme, c’est l’ombre du glyphosate qui noircit le tableau. En l’espace de trois mois, de février à avril, le nombre de personnes ayant déposé une plainte contre Bayer concernant l’utilisation du Roundup, un herbicide à base de glyphosate, a encore augmenté, passant de 48 600 à 52 500 plaignants. 

Bayer serre la vis face aux plaignants

Une hausse de plaintes qui a poussé Bayer à durcir le ton. Depuis quelques mois déjà, le géant avait entamé des pourparlers afin de régler les affaires. Mais en raison du « contexte d’une récession imminente et compte tenu, en partie, des défis considérables en matière de liquidités », le groupe a finalement changé de braquet. « L’entreprise n’envisagera un accord que s’il est financièrement raisonnable et met en place un mécanisme permettant de résoudre efficacement les éventuelles réclamations futures », a prévenu Werner Baumann.

Une annonce qui marque une rupture avec les dernières positions du groupe. Car, si Bayer avait toujours défendu le glyphosate depuis son rachat de Monsanto, il commençait quelque peu à plier sous la pression judiciaires. Selon le journal allemand Handelsblatt, il envisageait même d’arrêter, aux États-Unis, les ventes au détail du glyphosate tout en continuant de servir les agriculteurs. L’enjeu est de taille car le risque financier lié à ses plaintes est énorme pour Bayer, il est évalué entre 10 et 15 milliards d’euros. 

Monsanto, un gouffre financier

« La tentative de rendre Bayer plus résilient et plus fort en achetant Monsanto a jusqu’à présent échoué », a déclaré à Reuters Ingo Speich, responsable de la gouvernance d’entreprise pour Deka Investment, l’un des principaux actionnaires de Bayer. Alors que Deka a voté en faveur de Baumann et du conseil de surveillance, il a déclaré : « Tant que Bayer ne pourra pas se libérer de ces poursuites, nous ne verrons probablement pas de reprise du cours de l’action ».

Depuis le rachat du géant des OGM pour 56 milliards d’euros, le cours de l’action de Bayer n’a cessé de chuter, tout comme sa capitalisation boursière. En avril 2019, le groupe allemand avait perdu plus de 30 milliards d’euros en Bourse ainsi que trois procès emblématiques dont les amendes cumulées représentent des centaines de millions d’euros.