Economie : quelles sont les principales mesures prises par l’Union européenne depuis cinq ans ?

Brexit, économie, pandémie, urgence climatique, guerre en Ukraine… ces cinq dernières années auront été particulièrement éprouvantes pour les Européens. En matière économique, l’Union européenne a tenté d’apporter des réponses concrètes aux principaux défis rencontrés.

Et un nouveau cadre financier pour l’UE : https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2024-0081_FR.pdf

Les nouvelles règles, adoptées mardi, avaient fait l’objet d’un accord provisoire en février entre le Parlement et les négociateurs des États membres.

Privilégier les investissements

Les députés ont considérablement renforcé les règles pour protéger la capacité d’investissement des gouvernements. Il sera désormais plus difficile pour la Commission de soumettre un État membre à une procédure pour un déficit excessif si des investissements essentiels sont en cours. Toutes les dépenses nationales consacrées au cofinancement de programmes financés par l’UE seront exclues du calcul des dépenses d’un gouvernement, créant ainsi davantage d’incitations à investir.

Garantir la crédibilité des règles — mécanismes de réduction du déficit et de la dette

Les pays ayant une dette excessive devront la réduire en moyenne de 1 % par an si leur dette est supérieure à 90 % du PIB ; et de 0,5 % par an en moyenne si elle se situe entre 60 % et 90 % du PIB. Si le déficit d’un pays est supérieur à 3 % du PIB, il faudra le réduire pendant les périodes de croissance pour atteindre 1,5 % du PIB et constituer une réserve permettant de faire face à des conditions économiques difficiles.

Marge de manœuvre

Les nouvelles règles contiennent diverses dispositions visant à accorder une plus grande marge de manœuvre. Elles accordent notamment trois années supplémentaires en plus des quatre années prévues pour atteindre les objectifs du plan national. Les députés ont veillé à ce que ce délai supplémentaire puisse être accordé pour n’importe quelle raison jugée appropriée par le Conseil, plutôt que sur la base de critères spécifiques, comme cela avait été initialement proposé.

Améliorer le dialogue et la participation

À la demande des députés, les pays présentant un déficit excessif ou une dette excessive pourront demander un processus de discussion avec la Commission avant qu’elle n’intervienne sur les orientations et trajectoires des dépenses. Les gouvernements auront ainsi davantage l’occasion de faire valoir leurs arguments, en particulier à ce stade crucial du processus.

Un État membre peut demander à présenter la révision d’un plan national dans le cas où des circonstances objectives empêcheraient sa mise en œuvre, par exemple dans le cas d’un changement de gouvernement.

Le rôle des institutions fiscales nationales indépendantes – chargées de vérifier la pertinence des budgets et des projections fiscales de leur gouvernement – a été considérablement renforcé par les députés, l’objectif étant que ce rôle accru contribue à renforcer l’adhésion nationale aux plans.

Citations des corapporteures

Markus Ferber (PPE, DE), a déclaré: « Cette réforme constitue un nouveau départ et un retour à la responsabilité fiscale. Le nouveau cadre sera plus simple, plus prévisible et plus pragmatique. Cependant, les nouvelles règles ne pourront devenir un succès que si elles sont correctement mises en œuvre par la Commission. »

Margarida Marques (S&D, Portugal), a déclaré: « Ces règles offrent une plus grande marge de manœuvre pour l’investissement, une plus grande flexibilité pour les États membres afin de faciliter leurs ajustements et, pour la première fois, elles garantissent une « véritable » dimension sociale. L’exemption du cofinancement de la règle des dépenses permettra d’élaborer des politiques nouvelles et innovantes au sein de l’UE. Nous avons maintenant besoin d’un outil d’investissement permanent au niveau européen pour compléter ces règles »

Les textes ont été adoptés comme suit:

– Règlement établissant le nouveau volet préventif du pacte de stabilité et de croissance (PSC): 367 voix pour, 161 voix contre et 69 abstentions;

– Règlement modifiant le volet correctif du PSC: 368 voix pour, 166 voix contre, 64 abstentions, et

– Directive modifiant les exigences relatives aux cadres budgétaires des États membres: 359 voix pour, 166 voix contre et 61 abstentions.

Prochaines étapes

Le Conseil doit à présent approuver formellement la réglementation. Une fois adoptées, les nouvelles règles entreront en vigueur le jour de leurs publication au Journal officiel de l’UE. Les États membres devront soumettre leurs premiers plans nationaux d’ici le 20 septembre 2024.

Contexte — fonctionnement des nouvelles règles

Tous les pays fourniront à moyen terme des plans décrivant leurs objectifs de dépenses et la manière dont les investissements et les réformes seront entrepris. Les États membres dont les niveaux de déficit ou d’endettement sont élevés recevront des orientations, préalables à la planification, relatives aux objectifs de dépenses. Pour garantir la viabilité des dépenses, des garanties chiffrées de référence ont été mises en place pour les pays dont la dette ou le déficit sont excessifs. Les règles ajouteront également une nouvelle orientation, qui contribuera à encourager l’investissement public dans des domaines prioritaires. Enfin, le système sera mieux adapté aux réalités de chaque pays, et appliqué au cas par cas, et prendra mieux en compte les préoccupations sociales, plutôt qu’une approche unique.

Bilan économique de l'UE
En cinq ans, l’Union européenne a mis en œuvre un grand nombre de décisions économiques – Crédits : iStock / anyaberkut 

Au cours des cinq dernières années, l’Union européenne a réagi à des défis économiques et géopolitiques majeurs.

Parmi ses principales mesures économiques et financières figurent l’adoption d’un plan de relance, la gestion du , la réforme des règles budgétaires, la lutte contre l’inflation et un soutien prononcé à l’industrie européenne.

L’UE a également développé les accords de libre-échange et lancé des initiatives liées à l’utilisation de l’euro.

Economie : un plan de relance

En dévoilant dès 2018 son projet de budget européen pour la période 2021-2027 (CFP), la Commission espérait un accord des Etats membres avant les élections de mai 2019… Mais comme souvent, la bataille des chiffres a pris le dessus, le temps que les Vingt-Sept s’accordent sur le montant de leurs contributions respectives à la caisse commune de l’UE.

C’est donc après d’intenses tractations qu’à l’été 2020, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE ont fini par s’entendre sur un montant de 1 074,3 milliards d’euros sur la période 2021-2027. Face à l’arrivée du Covid-19 surtout, ils ont également lancé un plan de relance inédit de 750 milliards d’euros, pour soutenir la reprise économique face aux défis engendrés par la pandémie (chute de 6 % du PIB de l’UE en 2020, augmentation du chômage…). Baptisé “Next Generation EU”, ce plan repose pour la première fois sur un endettement commun des 27 Etats membres. Il finance des réformes et des investissements dans l’ensemble de l’Union européenne, à travers des prêts et des subventions qui doivent être alloués en priorité à l’environnement (37 %) et à la transition numérique (20 %).

Côté budget, le montant a été revu à la hausse en 2024 pour faire face à de nouveaux défis. En particulier l’aide à l’Ukraine (50 milliards d’euros sur trois ans), la gestion des migrations (+ 2 milliards d’euros) ou encore la production autonome de technologies stratégiques (+ 1,5 milliard d’euros). En comptant le plan de relance, le total atteint désormais 2 020 milliards d’euros sur la période 2021-2027.

Le programme InvestEU

En mobilisant des investissements privés et publics à travers le programme InvestEU (26,2 milliards d’euros de garanties budgétaires de l’UE sur la période 2021-2027), la Banque européenne d’investissement (BEI) soutient elle aussi des projets stratégiques à dimension environnementale ou numérique dans toute l’UE. Successeur du Plan Juncker (550 milliards d’euros investis entre 2015 et 2020), InvestEU a pour objectif de mobiliser 372 milliards d’euros d’investissements publics et privés d’ici 2027.

Conditionnalité et remboursement

Autre nouveauté liée au plan de relance : un mécanisme de conditionnalité des permet désormais à la de bloquer les fonds aux pays qui ne respecteraient pas l’état de droit. Un instrument qu’elle a notamment utilisé en 2022 pour geler temporairement des financements destinés à la Hongrie.

L’UE a par ailleurs prévu d’instaurer une vaste gamme de nouvelles pour commencer à rembourser son plan de relance en 2028, comme les Etats membres s’y sont engagés. L’occasion de diversifier ses sources de financement et de réduire la pression sur les contributions nationales. L’une d’elles est déjà en vigueur depuis 2021 : la “contribution plastique”, qui est alimentée selon le taux de plastique non recyclé des Etats membres. Elle doit à l’avenir être complétée par de nouvelles recettes, issues entre autres d’instruments visant à lutter contre le changement climatique (mécanisme d’ajustement carbone mis en œuvre progressivement depuis octobre 2023, marché du carbone…) ou l’évasion fiscale (impôt mondial sur les multinationales). Mais les discussions entre Etats membres sont toujours en cours.

L’impôt mondial sur les multinationales

Le 1er janvier 2024, l’Union européenne a mis en œuvre un nouvel impôt mondial sur les bénéfices des multinationales. Fruit d’un accord adopté par 140 pays, le mécanisme vise à limiter l’optimisation fiscale des plus grandes sociétés. Il doit permettre aux Etats de recouvrer un certain nombre de recettes.

Réponse à la crise énergétique et lutte contre l’inflation

Après le bouleversement géopolitique qu’a représenté l’invasion de l’Ukraine en février 2022, l’Union européenne a cherché d’un côté à freiner les flux financiers à destination de la Russie et à réduire sa dépendance énergétique vis-à-vis de sa grande voisine. De l’autre, il lui fallait assurer son approvisionnement en énergie à des coûts raisonnables. C’est pourquoi les Européens se sont accordés sur un nouveau plan baptisé REPowerEU, déployé dès le mois de mai 2022.

Celui-ci a permis de réduire la consommation de gaz de l’Union européenne, de diversifier son approvisionnement en énergies fossiles, tout en misant sur les énergies renouvelables. Des accords ont par exemple été signés avec les Etats-Unis, la Norvège ou encore l’Azerbaïdjan pour importer davantage de gaz par pipelines et de gaz naturel liquéfié (GNL) dans l’UE. Les objectifs d’énergies renouvelables ont également été revus à la hausse et doivent désormais atteindre 42,5 % de la consommation énergétique de l’UE d’ici 2030.

Autre mesure clé pour lutter contre la hausse des prix, la réforme du marché de l’électricité a fait l’objet d’un accord en décembre 2023. Cette révision vise notamment à rendre les tarifs de l’électricité pour les consommateurs et les entreprises moins dépendants de ceux des combustibles fossiles. La réforme favorise également l’investissement dans les énergies décarbonées comme le nucléaire.

Augmenter les taux d’intérêt pour réduire l’inflation

En augmentant ses taux d’intérêt pour la première fois depuis onze ans, la Banque centrale européenne (BCE) a elle aussi œuvré pour lutter contre l’inflation. Une mesure qui a eu pour effets de limiter la hausse des prix, mais qu’il a fallu déployer de manière progressive afin de ne pas bloquer la reprise économique.

Un soutien aux industries européennes

La pandémie de Covid-19, l’invasion russe de l’Ukraine, mais aussi le déploiement en 2022 d’un vaste plan de réformes écologiques et sociales aux Etats-Unis ont conduit l’exécutif européen à assouplir temporairement sa politique de concurrence. Plusieurs secteurs et entreprises ont ainsi pu bénéficier d’un large soutien de leurs Etats à travers un financement exceptionnel. Des aides publiques que l’exécutif européen contrôle habituellement de près, afin d’éviter une course aux subventions entre pays membres.

L’UE s’est également efforcée de renforcer son autonomie dans des secteurs clés. Plusieurs mesures ont ainsi été mises en place afin de diversifier l’approvisionnement et renforcer la production sur le continent européen des semi-conducteurs et des matières critiques, comme le lithium ou le cobalt. Ces matériaux entrent dans la composition de nombreux produits technologiques tels que les smartphones, les ordinateurs et les batteries. Ils sont plus généralement utilisés par de nombreuses industries ainsi que dans des domaines stratégiques comme la défense ou l’espace.

Approuvé en février 2024, le Net Zero Industry Act vise de son côté à accélérer la production de technologies vertes au sein de l’UE en facilitant l’octroi de permis et l’accès au financement de 10 filières dont le solaire, l’éolien, les batteries ou encore les pompes à chaleur.

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En matière numérique, l’entrée en vigueur du Digital Markets Act (DMA) doit permettre de rétablir une concurrence plus équitable en encadrant les activités des plus grands acteurs du web. Le DMA leur interdit notamment de favoriser leurs propres services et produits par rapport à ceux des entreprises qui les utilisent, une pratique jusque-là courante.

Autre volet de la régulation européenne du numérique, le DSA vise quant à lui à lutter contre les contenus et produits illicites en ligne.

Réforme des règles budgétaires

Permettre aux Etats d’augmenter leurs dépenses face à la crise du Covid-19 : c’est l’objectif de la suspension des règles du (PSC), qui a eu lieu de 2020 à 2024. Les pays ont ainsi été autorisés à dépasser temporairement les plafonds de (60 % du PIB) et de (3 % du PIB) sans risquer de procédures de la Commission européenne. Une dérogation qui a été prolongée en 2022, afin d’affronter l’augmentation des coûts liés à la guerre en Ukraine.

Dès 2019, la Commission européenne avait également lancé un débat sur la révision de ces règles. Une réforme qui a fini par aboutir juste à temps en 2024, année de reprise du PSC. Les Etats les plus dépensiers auront désormais plus de flexibilité pour remettre leurs économies en ordre, et leurs investissements dans les priorités européennes telles que l’environnement et le numérique seront prises en compte dans les recommandations de la Commission européenne.

Renforcer la puissance commerciale de l’Union

Ces cinq dernières années, l’UE a considérablement élargi son réseau d’accords de libre-échange. Elle a notamment conclu, ou est sur le point de conclure, des accords commerciaux avec le Vietnam (2020), la Nouvelle-Zélande (2023), le Kenya (2024) et le Chili (renouvellement en 2024). Des traités qui visent à stimuler le commerce par la réduction des droits de douane et des barrières non tarifaires, et qui s’accompagnent d’engagements réciproques en matière de développement durable, de droits de l’homme et de bonne gouvernance. Le projet d’accord entre l’UE et le Mercosur, qui réunit quatre pays d’Amérique latine, est quant à lui toujours en cours de négociations.

En 2020, l’Union européenne a également dû faire face au départ d’un de ses membres : le Royaume-Uni. Pour organiser ce retrait de manière ordonnée, les deux parties ont négocié âprement les clauses encadrant leur relation post-Brexit. En vigueur depuis le 1er janvier 2021, l’accord de “commerce et de coopération” (signé le 24 décembre 2020) couvre les échanges de biens et de services (absence de droits de douane et de quotas dans les échanges de marchandises) ainsi qu’un large éventail d’autres domaines : investissement, concurrence, aides d’Etat, fiscalité, transport, énergie, environnement, pêche, protection des données… Il vient compléter un premier accord de retrait, signé en octobre 2019, portant entre autres sur les droits des citoyens européens et britanniques et les engagements financiers mutuels.

Réforme de l’union douanière

En ce qui concerne le marché intérieur, l’Union européenne est également en passe d’adopter une vaste réforme de son union douanière. L’objectif est de simplifier les procédures pour les entreprises à travers une approche reposant sur les données, tout en renforçant la lutte contre la fraude et les marchandises contrefaites.

Développer l’euro

Depuis cinq ans, l’Union européenne a aussi lancé diverses initiatives portant sur l’utilisation de la monnaie unique. Parmi elles, la gratuité des paiements instantanés devrait devenir bientôt obligatoire pour les banques et autres prestataires de services de paiement. La Banque centrale européenne avance également sur l’introduction d’un euro numérique, une monnaie sécurisée équivalente aux espèces, mais sous forme électronique. Depuis 2023 enfin, l’Union européenne encadre les cryptomonnaies et autres cryptoactifs à travers un agrément européen obligatoire pour les prestataires de services qui utilisent ces monnaies alternatives.

L’UE continue de s’attaquer aux malversations financières. Pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, l’UE est en passe de renforcer sa réglementation en prévoyant par exemple de nouvelles exigences pour les établissements financiers, certaines entreprises et certaines professions (avocats, comptables) bien placées pour détecter les activités suspectes. Un autre dossier en cours d’adoption vise à rendre la saisie des avoirs criminels plus rapide et plus efficace dans l’ensemble de l’UE. Et pour terminer, une nouvelle agence consacrée à ces défis s’installera en 2025 à Francfort : l’Autorité européenne de lutte contre le blanchiment d’argent (AMLA).

Enfin, la zone euro a continué de s’étendre au cours des cinq années passées. Le 1er janvier 2023, la Croatie est devenue le 20e Etat membre de la zone. Un élargissement qui reflète la confiance dans la monnaie unique et l’engagement des pays membres envers une intégration économique et monétaire plus profonde. Pour y parvenir, la Croatie a dû respecter les critères de convergence, notamment en matière de stabilité des prix, de finances publiques et de taux de change.

Le rôle de la PFUE

En matière économique comme dans de nombreux domaines, la (PFUE) a fait avancer de nombreux dossiers au premier semestre 2022.

Parmi eux figurent les accords sur le Digital Services Act (DSA) et le Digital Markets Act (DMA) dans le domaine du numérique, le remplissage des capacités de stockage de gaz dans l’UE avant l’hiver ou encore les instruments de réciprocité sur les marchés publics (IPI) et sur les aides d’Etat accordées par les pays tiers à leurs entreprises.

Au cours des cinq dernières années, l’Union européenne a ainsi dû réagir de manière pragmatique et diversifiée aux défis économiques et géopolitiques majeurs qui ont secoué le continent. Face à la pandémie de Covid-19, elle a adopté un plan de relance sans précédent pour soutenir la reprise économique, en mettant l’accent sur l’environnement et la transition numérique. Dans le même temps, des mesures telles que la suspension temporaire des règles budgétaires ont offert une plus grande flexibilité aux Etats.

L’UE a également cherché à renforcer sa position commerciale en élargissant son réseau d’accords de libre-échange et en gérant de manière ordonnée le départ du Royaume-Uni. Enfin, des initiatives visant à renforcer l’utilisation de l’euro et à lutter contre les malversations témoignent de son engagement continu à protéger la stabilité économique et financière au sein de ses frontières.

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