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La commissaire polonaise Elżbieta Bieńkowska doit laisser les commandes de la politique industrielle européenne à la Française Sylvie Goulard le 31 octobre. Elle lui cède un portefeuille étoffé et de nombreux défis à relever.
En 2014, Jean-Claude Juncker avait confié le portefeuille du marché intérieur, de l’industrie, de l’entrepreneuriat et des PME à Elżbieta Bieńkowska. En 5 ans, la commissaire polonaise s’est attaquée au sujet des marchés publics et a obtenu plusieurs succès dans le domaine spatial .
Au début de son mandat, la direction générale du marché intérieur et la direction générale des entreprises avaient été fusionnées. Jean-Claude Juncker voulait ainsi accroître la contribution de l’industrie à l’économie, en la faisant passer de 16 à 20%.
Suivant les facteurs utilisés pour définir ce qu’est « l ’industrie », sa part variait de 17,3% à 20,7% au sein de l’Europe des 27 en 2018. Cette absence de progrès significatifs a incité les capitales européennes à demander à la Commission de rédiger, d’ici à la fin de l’année, un projet de stratégie industrielle globale à l’horizon 2050.
Les services d’Elżbieta Bieńkowska travaillent actuellement sur le texte. « Je voulais un document qui réponde à tous les besoins de l’industrie européenne. C’est ce que nous aurons au bout du compte », déclare la commissaire.
La Commission Juncker avait déjà émis une proposition de stratégie pour la politique industrielle à la fin 2017, qui mettait notamment l’accent sur la cybersécurité, l’économie circulaire et les méga-données. Mais selon Elżbieta Bieńkowska, le secteur est si vaste que « l’on ne peut se contenter de ce premier document ».
Elle ajoute que travailler sur le marché interne et les questions de services « est beaucoup plus difficile que de discuter sur la coopération en matière de défense ». La commissaire estime que « la prochaine Commission sera en mesure de proposer un bref document basé sur ce que nous préparons ».
Neutralité climatique
Ce sera en effet à sa successeure, Sylvie Goulard, de clarifier les choses. Dans sa lettre de mission, la présidente élue Ursula von der Leyen lui écrit qu’elle devrait compléter la stratégie et s’assurer que l’économie européenne est sur les rails pour atteindre l’objectif de neutralité climatique qui a été fixé.
La stratégie 2050 « devrait couvrir tous les aspects qui touchent à l’industrie et à sa compétitivité, des investissements et des marchés publics jusqu’aux échanges commerciaux, aux compétences, à l’innovation et au soutien des petites et moyennes entreprises », explique la lettre.
Quand on demande à Elżbieta Bieńkowska si elle prodiguera certains conseils à Sylvie Goulard avant de quitter son poste, elle répond que sa successeure est « déjà assez expérimentée ». Elle l’a cependant engagée à maintenir une culture de transparence qui permet aux ministres d’être toujours informés de la manière dont les choses avancent.
La semaine dernière, durant un entretien avec des journalistes, Elżbieta Bieńkowska a reconnu que le défi de Sylvie Goulard pourrait être encore plus grand que le sien, étant donné que « le portefeuille sera encore plus volumineux désormais ».
Car la Française supervisera également la direction de la communication et la nouvelle direction générale de la défense et de l’espace, si elle obtient l’aval du Parlement européen.
La mise en place d’une nouvelle direction générale consacrée aux affaires militaires et extraplanétaires faisait l’objet de rumeurs de longue date. Elżbieta Bieńkowska a révélé qu’elle était en préparation depuis 18 mois.
Interrogée sur l’ouverture du nouveau département elle déclare que « d’ici trois à mois, il devrait être opérationnel. Il est encore nécessaire de recruter et de faire appel au savoir-faire des États-membres. Mais la scission de la direction générale n’est pas problématique. »
A l’heure actuelle, deux unités de la direction générale du marché intérieur, de l’industrie, de l’entrepreneuriat et des PME (DG GROW) emploient 48 agents dans le domaine de la défense, alors qu’ils sont plus de 300 à s’occuper de politique spatiale. « Les États-membres devront envoyer des experts détachés car les connaissances font défaut dans la Commission actuelle », ajoute la commissaire sortante.
Le spatial en question
La division spatiale de la nouvelle direction générale devrait bénéficier d’un trésor de guerre de 16 milliards proposé dans le cadre financier pluriannuel (CFP), le budget européen à long-terme pour les sept prochaines années.
Le système de positionnement par satellite européen Galileo est en lice pour l’obtention de 9,7 milliards. Il a récemment franchi le cap du milliard d’utilisateurs de smartphones et sa constellation de satellites doit être achevée en 2020.
Son cousin, le programme de surveillance de la terre Copernicus, est désormais totalement opérationnel, et recevra 5 milliards dans le cadre du CFP. Elżbieta Bieńkowska a souligné que les capacités du système en termes d’action climatique allaient monter en puissance au cours des prochaines années.
Les gouvernements nationaux ont réclamé l’activation du système à de nombreuses reprises au cours des dernières années, afin de suivre la progression d’incendies et d’aider les pompiers à prendre de l’avance sur ces brasiers souvent mortels.
La commissaire polonaise souligne que « le ciel est la limite » pour l’utilisation de ce que l’on appelle les données spatiales, ajoutant qu’entre 6% et 9% des entreprises européennes y ont désormais recours sous une forme ou une autre. Interrogée sur le « lien naturel » entre l’espace et la défense, elle répond qu’environ 95% des moyens de défense utilisent des données satellites.
L’intérêt croissant pour ce secteur nécessitera la mise en place d’une gestion inter-institutionnelle. La politique spatiale relève de la Commission depuis la signature du Traité de Lisbonne, mais les liens avec l’Agence spatiale européenne (ASE) doivent perdurer.
Elżbieta Bieńkowska reconnaît que cette relation constitue « une question complexe », étant donné que des États tiers peuvent prendre part aux affaires de l’ASE et qu’une division claire des tâches entre l’exécutif européen et l’agence reste à définir.
Les tensions ont atteint un point critique plus tôt cette année lorsqu’il est apparu que l’ASE avait protesté contre la proposition de la Commission de changer le nom de l’Agence du Système global de navigation par satellite (GNSS) européen pour l’appeler Agence de l’Union européenne pour le programme spatial.
L’ASE a protesté, arguant que le nouveau nom de l’agence basée à Prague créerait la confusion en raison de la ressemblance avec son propre intitulé. En avril, les négociateurs européens ont obtenu un accord partiel sur la proposition du programme spatial, qui inclut toujours le changement de nom.
De nouveaux pourparlers sont attendus sur les questions qui restent en souffrance lorsque les négociations globales sur le budget européen à long-terme seront closes.