La dépendance de l’UE à l’égard des terres rares 

Grain de sel

L’Union européenne est pieds et mains liés à la Chine pour son approvisionnement en terres rares, ces métaux stratégiques essentiels aux technologies modernes. Néodyme, dysprosium, terbium… ces noms méconnus du grand public sont pourtant omniprésents dans notre quotidien : ils font fonctionner les moteurs des voitures électriques, les aimants des éoliennes, les écrans de nos smartphones et même les systèmes de guidage des missiles. Or, la Chine contrôle aujourd’hui près de 90 % de la production mondiale et n’hésite pas à utiliser cette dépendance comme un levier géopolitique, limitant ses exportations au gré des tensions avec l’Occident.

Face à ce risque, l’UE tente laborieusement de réduire sa vulnérabilité en lançant des projets d’extraction et de raffinage sur son sol, mais elle accuse un retard colossal. En parallèle, un autre problème demeure : la traçabilité des minerais stratégiques. Tandis que Bruxelles cherche à sécuriser son approvisionnement, le Parlement européen a récemment gelé un accord commercial avec le Rwanda en raison de soupçons sur l’exploitation illégale de minerais en République démocratique du Congo, aussi appelé les minerais du sang. Une réalité glaçante : derrière chaque smartphone et chaque batterie, se cachent parfois des conflits sanglants et des violations des droits humains.

Alors que les États-Unis et la Chine avancent à grands pas sur leur autonomie en matières premières, l’Europe doit cesser de jouer les naïfs. Dépendre d’une puissance qui n’a pas hésité à couper l’accès à ces ressources par le passé est un pari dangereux. La souveraineté industrielle européenne passera par des choix difficiles : investir massivement dans une filière locale, diversifier ses sources d’approvisionnement et imposer de véritables normes éthiques. Mais pour l’instant, l’UE reste en retard, prisonnière de sa propre inertie.

Article – Terres rares : Bruxelles dévoile 47 projets prioritaires en Europe, dont huit en France

Economie. L’ouverture de mines vise à réduire la dépendance de l’Union européenne, notamment envers la Chine, pour des matières utilisées dans la fabrication de batteries, d’éoliennes, ou encore de munitions.

25/03/2025 à 13:21

Le vice-président de la Commission, en charge de la stratégie industrielle, Stéphane Séjourné, lors d'une conférence de presse à Bruxelles le 29 janvier 2025
Le vice-président de la Commission, en charge de la stratégie industrielle, Stéphane Séjourné, lors d’une conférence de presse à Bruxelles le 29 janvier 2025afp.com/Simon Wohlfahrt

Bruxelles a dévoilé mardi 25 mars 47 projets prioritaires pour l’extraction, le traitement et le recyclage de terres rares et métaux stratégiques sur le sol européen afin de réduire la dépendance à la Chine et sécuriser l’approvisionnement de l’industrie.

Ces projets, qui incluent l’ouverture de mines de lithium, de cuivre, de nickel ou de Tungstène dans l’Union européenne, bénéficieront de procédures d’autorisation simplifiées et d’un soutien financier européen. Ils sont implantés dans 13 pays membres. Huit d’entre eux sont situés en France, dont deux projets d’extraction de lithium dans l’Allier (groupe Imerys) et en Alsace (Eramet). Le lithium est notamment indispensable pour fabriquer les batteries des véhicules électriques.

« L’Europe dépend actuellement de pays tiers pour de nombreuses matières premières dont elle a particulièrement besoin. Nous devons augmenter notre propre production, diversifier nos approvisionnements externes et constituer des stocks », a déclaré le commissaire européen à l’Industrie, Stéphane Séjourné, en présentant la liste de 47 projets prioritaires.

17 matières premières stratégiques

L’UE a adopté l’an dernier une législation pour sécuriser ses approvisionnements en matières premières. L’objectif est de réduire la dépendance à la Chine pour des matières utilisées notamment dans la fabrication de batteries, d’éoliennes, ou de munitions. Il s’agit en particulier de rouvrir des mines en Europe, tout en respectant des normes environnementales strictes, alors que ces projets sont contestés par des militants écologistes.

Le texte établit une liste de 17 matières premières stratégiques comme le cobalt, le nickel et l’aluminium pour lesquelles il fixe des objectifs chiffrés. L’UE doit pouvoir d’ici à 2030, pour chacune de ces matières, assurer sur son territoire au moins 10 % des besoins d’extraction, 40 % de la transformation et 25 % du recyclage.

Les projets sélectionnés comme stratégiques bénéficieront de permis accélérés. Le délai d’octroi des autorisations ne devra pas dépasser 27 mois pour les projets d’extraction et 15 mois pour les projets de traitement et de recyclage. Le texte stipule aussi que l’UE ne devra pas dépendre d’un pays tiers unique pour plus de 65 % de ses besoins pour les matières premières stratégiques.

L’octroi du statut de projet stratégique est également possible pour des implantations hors du territoire de l’UE. La Commission a reçu 46 demandes pour des projets dans des pays tiers et doit sélectionner prochainement ceux qui seront jugés prioritaires et éligibles aux mesures de soutien de l’UE.

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Source : Terres rares : Bruxelles dévoile 47 projets prioritaires en Europe, dont huit en France – L’Express