Climat : la Commission européenne propose un nouvel objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre

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Mardi 6 février, la Commission a présenté un nouvel objectif climatique pour l’Union européenne : une baisse nette de 90 % des émissions de gaz à effet de serre en 2040. A quelques mois des élections européennes, cette proposition n’est que la première étape d’un long chemin législatif.

L'industrie, les transports ou encore l'agriculture sont appelés à réduire leurs émissions polluantes
L’industrie, les transports ou encore l’agriculture sont appelés à réduire leurs émissions polluantes – Crédits : Oliver de la Haye / iStock

-90 % : ce chiffre pourrait devenir le prochain objectif européen de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Mardi 6 février, la a proposé une feuille de route pour continuer à décarboner le Vieux Continent.

La lutte contre la crise climatique est un marathon et non un sprint”, a déclaré le commissaire européen à l’Action climatique Wopke Hoekstra. “Nous devons veiller à ce que chacun franchisse la ligne de fin et que personne ne soit laissé pour compte”, a ajouté le Néerlandais.

Ce marathon a déjà commencé en Europe. En juillet 2021, l’UE avait inscrit dans sa loi sur le climat son horizon de neutralité climatique en 2050. Elle avait également déterminé un objectif intermédiaire, fixé à -55 % d’émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990.

Fin de la vente des voitures thermiques, accélération des énergies renouvelables, taxe carbone aux frontières… la Commission européenne avait ensuite proposé une série de mesures pour concrétiser son , ou “Green Deal”, la feuille de route environnementale et climatique de l’UE.

Première étape

La tâche n’est pas aisée pour l’UE, dans un contexte où la droite européenne et une partie du monde agricole ont récemment pointé du doigt les contraintes liées au Pacte vert. Accompagnée de plus de 600 pages de rapport, la communication de ce mardi n’est toutefois que la première étape du processus de décision. Il reviendra à la prochaine Commission, constituée après les élections européennes de juin, de formuler une . Celle-ci sera ensuite négociée par les Etats membres et les eurodéputés.

Selon la loi européenne sur le climat, cette proposition d’objectif pour 2040 doit être présentée dans un délai de 6 mois à compter du premier bilan mondial de l’accord de Paris, qui a eu lieu lors de la COP28 à Dubaï en décembre dernier. En amont de la communication, onze Etats membres ont appelé la Commission à être ambitieuse dans son scénario. “Il est crucial que l’UE traduise [la COP28] en actions concrètes et ambitieuses pour envoyer un signal politique fort montrant l’exemple aux autres grands pays émetteurs”, écrivent les signataires, dont la France, l’Allemagne et l’Espagne.

Consulté sur l’objectif à fixer pour 2040, un conseil scientifique européen avait pour sa part recommandé en juin 2023 de réduire les émissions nettes, qui tiennent compte de la capacité d’absorption du carbone rejeté dans l’atmosphère, de l’ordre de 90 à 95 % par rapport à 1990. Ces scientifiques ont récemment prévenu que la réalisation du Pacte vert de l’UE dépendait désormais en grande partie de sa traduction par les gouvernements à l’échelle nationale.

Selon les experts de ce conseil, la baisse des prochaines années devra être plus de deux fois supérieure au rythme connu depuis 2005 si l’UE veut viser sa cible de -55 %. Car en l’état, les émissions nettes de gaz à effet de serre pourraient atteindre une réduction de 49 % à 51 % à la fin de cette décennie. Une estimation en-deçà de l’objectif européen.

Un objectif conforme aux ambitions

Très attendu, l’objectif de réductions des émissions de gaz à effet de serre à 2040, proposé par la Commission européenne mardi 6 février est conforme aux pronostics : -90% par rapport à 1990. Alors que le Green Deal ne cesse d’être remis en cause et que les appels à une pause réglementaire se multiplient, Ursula von der Leyen a tenu bon, tout en renonçant à adopter une position plus ambitieuse mais aussi plus risquée. Cette recommandation est finalement conforme à la fourchette basse proposée par le Conseil consultatif scientifique européen sur le changement climatique (ESABCC) qui proposait une réduction comprise entre 90 et 95%.

« Fixer un objectif climatique pour 2040 aidera l’industrie européenne, les investisseurs, les citoyens et les gouvernements à prendre des décisions au cours de cette décennie qui maintiendront l’UE sur la bonne voie pour atteindre son objectif de neutralité climatique en 2050. Cela enverra des signaux importants sur la manière d’investir et de planifier efficacement en minimisant les risques liés aux actifs bloqués », explique la Commission.

Une réduction des énergies fossiles de 80%

Plus spécifiquement, elle vise une décarbonation complète du secteur de l’énergie, le plus facile à électrifier, « peu après 2040 », en se basant sur « les énergies renouvelables, le nucléaire, l’efficacité énergétique, le stockage, le captage et stockage du CO2 (CCS), le captage et la valorisation du CO2 (CCU), l’élimination du carbone, la géothermie et l’hydroélectricité ». La Commission précise toutefois que le captage du carbone, une technique encore peu mature et coûteuse, devrait être ciblé sur les « secteurs difficiles à réduire, où les alternatives sont moins viables économiquement ».

« La proposition de la Commission européenne est ambitieuse mais réaliste. Cela constitue un argument économique solide pour réduire la dépendance de l’UE aux combustibles fossiles à la suite de la COP28 à Dubaï. Réduire l’utilisation de combustibles fossiles de 80% est une première étape importante pour renforcer la sécurité énergétique », a commenté Linda Kalcher, directrice générale de Strategic Perspectives.

L’ONG Greenpeace regrette cependant qu’il n’y ait pas de date précise de sortie des énergies fossiles. « Cela a autant de sens qu’un objectif de prévention du cancer du poumon sans aucun plan pour mettre fin au tabagisme », assure Silvia Pastorelli, responsable de la campagne climat pour l’ONG environnementale. « L’absence de plan d’élimination progressive des combustibles fossiles, et même des subventions, non seulement retarde l’action climatique dont nous avons besoin de toute urgence, mais finira par nuire davantage à la population », ajoute-t-elle.

Une réduction brute de 82%

Autre point noir pointé par plusieurs observateurs : le recours aux technologies d’élimination et de séquestration du carbone équivalent à 400 millions de tonnes de CO2 par an d’ici 2040. Cela porterait l’objectif de l’UE à une réduction de 82% en valeur absolue, « ce qui est totalement insuffisant », pour Carbon Market Watch. Mais aussi risqué, prévient l’organisation, car cela revient à miser sur les puits carbones naturels. Or, « la capacité d’absorption du carbone des puits terrestres de l’UE est en déclin depuis de nombreuses années et le stockage dans les systèmes naturels risque constamment de libérer le carbone stocké dans l’atmosphère », explique-t-elle dans un communiqué.

C’est pourquoi avec une centaine d’acteurs de la société civile, des entreprises, des associations professionnelles, groupes de réflexion et scientifiques, ils avaient appelé début janvier à l’établissement de trois objectifs distincts : le premier pour une réduction des émissions exprimée en valeur absolue, le deuxième pour l’élimination des émissions comme le captage direct de l’air, et un troisième pour la séquestration terrestre du carbone. « Il est décevant que la Commission européenne ait ignoré cet appel, auquel ont fait écho la majorité des personnes ayant répondu à la consultation publique sur l’objectif climatique 2040 », réagit Carbon Market Watch.

Enfin, les objectifs hors-CO2 du secteur agricole visant les émissions de méthane ou d’azote, un temps inscrits dans les précédents projets de texte, ont finalement été supprimés face à la colère des agriculteurs. La présidente de la Commission a également annoncé mardi 6 février le retrait officiel d’un texte visant à diviser par deux l’usage des pesticides d’ici 2030. Il avait été rejeté par le Parlement en novembre dernier et bloquait au niveau du Conseil. Ce sera désormais à la prochaine Commission, issue des élections de juin, de soumettre une proposition législative formelle aux États et au Parlement européen sur l’objectif 2040 de l’UE, en espérant que les recommandations de l’actuelle Commission seront bien un plancher et pas un plafond.