Marché carbone : les textes clés du green deal

Les députés européens ont adopté le 18 avril cinq textes clés pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.

Complements sur la campagne européenne.

Ce dimanche 1er octobre, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) entrera en application dans sa phase transitoire. Le MACF est l’instrument phare de l’UE pour lutter contre la fuite de carbone et l’un des piliers centraux de l’ambitieux programme «Ajustement à l’objectif 55» de l’UE. Il permettra la péréquation des prix du carbone entre les produits nationaux et les importations. Ce mécanisme permettra de garantir que les politiques climatiques de l’UE ne seront pas compromises par la délocalisation de la production vers des pays appliquant des normes écologiques moins ambitieuses ou par le remplacement des produits de l’UE par des importations à plus forte intensité de carbone. Le MACF est une mesure compatible avec les règles de l’OMC, qui encourage l’industrie mondiale à adopter des technologies plus vertes et plus durables.

Durant sa phase transitoire, le MACF ne s’appliquera qu’aux importations de ciment, de fer et d’acier, d’aluminium, d’engrais, d’électricité et d’hydrogène. Les importateurs européens de ces marchandises devront déclarer le volume de leurs importations et les émissions intrinsèques de gaz à effet de serre (GES) au cours de leur production, mais sans aucun ajustement financier à ce stade. Les importateurs seront invités à recueillir les données du quatrième trimestre de 2023, mais ils auront jusqu’au 31 janvier 2024 pour présenter leur première déclaration. Par ailleurs, un certain nombre d’aménagements ont été intégrés dans la structure du MACF pour la première année d’application, tels que l’utilisation de valeurs par défaut pour la déclaration des émissions intrinsèques et la possibilité de recourir aux règles concernant la surveillance, la déclaration et la vérification du pays de production.

La phase transitoire servira de période d’apprentissage pour tous les acteurs (importateurs, producteurs et autorités). Elle permettra à la Commission de recueillir des informations utiles sur les émissions intrinsèques afin d’affiner la méthodologie pour la période définitive, qui débutera en 2026. À partir de cette date, les importateurs devront acheter et restituer le nombre de «certificats MACF» correspondant aux émissions intrinsèques de GES générées par les importations de marchandises couvertes par le MACF.

Afin d’aider les importateurs européens et les installations des pays tiers à mettre en pratique les nouvelles règles, un nouveau registre transitoire MACF sera disponible à partir du 1er octobre pour que les importateurs puissent effectuer ces calculs et les déclarer. La Commission met aussi progressivement à disposition des orientations écrites détaillées, du matériel de formation en ligne et des webinaires, des fiches d’information sectorielles et une liste de contrôle étape par étape afin de soutenir les entreprises lors de la mise en place du mécanisme transitoire. Le réexamen du fonctionnement et des produits relevant du MACF durant la phase transitoire de celui-ci sera achevé avant le début de la période définitive; il en va de même pour la faisabilité de l’extension du champ d’application du MACF à d’autres marchandises produites dans les secteurs couverts par le SEQE.

Carbon Border Adjustment Mechanism (europa.eu)

By NOVETHIC Concepcion Alvarez © 2023 Novethic – Tous droits réservés

Le 18 avril, plusieurs textes clés du Green Deal adoptés au PE sur lesquels les États membres se prononcent le 25 avril prochain..

« L’accord pour le climat le plus ambitieux au monde » – Pascal Canfin, président de la commission Environnement du Parlement européen.

  1. Mise en place d’une taxe carbone aux frontières de l’Europe d’ici 2034 pour faire payer à certaines importations industrielles les émissions liées à leur production, pour éviter la délocalisation des industriels hors d’Europe et encourager à adopter les standards européens.
  2. Suppression des quotas d’émission alloués aux industriels européens d’ici 2034, lorsque la taxe carbone aux frontières sera effective.
  3. Extension du marché carbone européen au chauffage des bâtiments et aux carburants routiers (ET2) : Les particuliers paieront un prix du carbone sur le carburant et le chauffage à partir de 2027 plafonné à 45 euros/tonne au moins jusqu’en 2030.
  4. Extension au secteur maritime et à l’aérien (vols intra européeens).
  5. Fonds social pour le climat d’ici 2026 : 86,7 milliards d’euros alimenté essentiellement par les recettes du nouveau marché carbone (ET2).  
  6. Législation pour lutter contre la déforestation importée qui vise à bannir l’importation de produits issus de la déforestation comme le cacao, le café, le soja, l’huile de palme ou le caoutchouc.

Les députés européens ont adopté, mardi 18 avril, plusieurs textes clés du Green Deal qui concernent la réforme du marché carbone communautaire. Un accord avait été obtenu en décembre dernier, mais il devait encore être validé en trilogue. Après le feu vert des eurodéputés, les États membres vont se prononcer à leur tour le 25 avril prochain, et donner, sauf surprise, leur aval. « Il s’agit de l’accord pour le climat le plus ambitieux jamais voté en Europe et le plus ambitieux au monde », s’est réjoui Pascal Canfin, eurodéputé Renaissance et président de la commission Environnement du Parlement européen. « C’est l’aboutissement de mois de travail, et de nuits de travail », ajoute-t-il.

Les eurodéputés se sont accordés sur la mise en place d’une taxe carbone aux frontières de l’Europe – un dispositif totalement inédit – qui se fera de façon progressive entre 2026 et 2034. Il s’agit de faire payer à certaines importations industrielles (acier, aluminium, ciment, engrais, électricité, hydrogène) les émissions liées à leur production, pour éviter la délocalisation des industriels hors d’Europe et, dans le même temps, encourager le reste du monde à adopter les standards européens.

Une période-test commencera dès octobre 2023, durant laquelle les entreprises importatrices devront simplement rapporter leurs obligations. Mais pour que la mesure soit pleinement effective, l’Union européenne doit en parallèle supprimer les quotas d’émission gratuits qu’elle alloue aux industriels européens, un point de friction particulièrement important. Ceux-ci disparaîtront totalement d’ici 2034, lorsque la taxe carbone aux frontières sera pleinement effective. Leur but initial : ne pas fragiliser la compétitivité des industriels européens et éviter leurs délocalisations. 

Extension du marché carbone au chauffage et aux voitures

L’autre point controversé des négociations portait sur l’extension du marché carbone européen au chauffage des bâtiments et aux carburants routiers (ET2) en 2027. Jusqu’ici, seuls les producteurs d’électricité et les industries énergivores (sidérurgie, ciment…) étaient concernés, soit environ 10 000 entreprises, représentant 40% des émissions du continent. Désormais, les particuliers eux-aussi paieront un prix du carbone sur le carburant et le chauffage à partir de 2027, mais ce prix sera plafonné à 45 euros/tonne au moins jusqu’en 2030.

Autre décision inédite, le marché carbone s’étendra également au secteur maritime, obligeant pour la première fois les exploitants de navires à payer pour leurs émissions de carbone. Les émissions du secteur aérien seront aussi soumises au marché carbone, mais seuls les vols intra-européens sont concernés. Or, si les long-courriers représentent environ 6% des vols dans l’espace économique européen, ils produisent environ la moitié des émissions de CO2 et de NOx (oxydes d’azote).

Création d’un fonds social pour le climat

Un Fonds social pour le climat verra également le jour d’ici 2026 afin de garantir que la transition climatique soit équitable et socialement inclusive. Les ménages vulnérables, les microentreprises et les usagers des transports qui sont particulièrement touchés par la pauvreté énergétique en bénéficieront. Il sera doté de 86,7 milliards d’euros et alimenté essentiellement par les recettes du nouveau marché carbone (ET2). « Ensemble, nous allons faire de l’Europe le premier continent neutre climatiquement », s’est félicitée la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen. 

Toujours dans le cadre du Green Deal, le Parlement européen a également adopté mercredi 19 avril une nouvelle législation pour lutter contre la déforestation importée. Il s’agit de la première loi au monde qui vise à bannir l’importation de produits issus de la déforestation comme le cacao, le café, le soja, l’huile de palme ou encore le caoutchouc. Des clauses de revoyure sont également prévues pour étendre le texte à d’autres écosystèmes boisés que les forêts et à d’autres produits comme le maïs.

ALLER PLUS LOIN

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Décarboner le transport maritime : le Conseil de l’UE adopte le règlement FuelEU

Christine Gilguy

Le Conseil vient d’adopter le nouveau règlement « FuelEU Maritime » qui vise à booster l’utilisation de carburants alternatif au fuel lourd renouvelables et bas carbone dans le transport maritime. Ses dispositions entreront en vigueur en 2024 et 2025. Il fait partie du paquet législatif « ajutement à l’objectif 55 », ou Fit for 55, qui vise à réduire les émissions de 55 % d’ici 2030. Revue de détail.

« La nouvelle loi apportera une sécurité juridique aux exploitants de navires et aux producteurs de carburants et contribuera à donner le coup d’envoi à la production à grande échelle de carburants marins durables, ce qui nous permettra d’atteindre en grande partie nos objectifs climatiques au niveau européen et à l’échelle mondiale » a déclaré Raquel Sánchez Jiménez, ministre espagnole des Transports, de la mobilité et du programme urbain, à l’issue du Conseil, sous présidence espagnole.

D’après le communiqué de presse du Conseil, le principal objectif du règlement est d’accroître la demande et l’utilisation cohérente de carburants renouvelables et bas carbone pour développer l’offre, et ainsi réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur maritime, tout en garantissant la fluidité du trafic maritime et en évitant les distorsions sur le marché intérieur.

Les dispositions concrètes

Concrètement, le nouveau règlement comporte différentes dispositions destinées à booster l’utilisation de carburants alternatifs par les opérateurs du transport maritime :

-des mesures visant à faire en sorte que l’intensité des émissions de gaz à effet de serre (GES) des carburants utilisés par le secteur du transport maritime diminue progressivement, passant de 2 % en 2025 à 80 % d’ici 2050 ;

-un régime incitatif spécial pour soutenir l’adoption des « carburants renouvelables d’origine non biologique » présentant un haut potentiel de décarbonation ;

-l’exclusion des combustibles fossiles du processus de certification prévu par le règlement ;

-l’obligation pour les navires à passagers et les porte-conteneurs d’utiliser l’alimentation électrique à quai pour tous les besoins en électricité lorsqu’ils sont amarrés à quai dans les principaux ports de l’UE à partir de 2030, en vue d’atténuer la pollution atmosphérique dans les ports, qui sont souvent proches de zones densément peuplées

-un mécanisme de groupement volontaire, dans le cadre duquel les navires seront autorisés à grouper leurs bilans de conformité avec un ou plusieurs autres navires, le groupement devant, dans son ensemble, respecter les limitations de l’intensité des émissions de gaz à effet de serre en moyenne

-des exceptions limitées dans le temps pour le traitement spécifique des régions ultrapériphériques, des petites îles et des zones fortement dépendantes, sur le plan économique, de leur connectivité ;

-les recettes générées par la mise en œuvre du règlement, en particulier le fruit des sanctions en cas d’infraction (sanctions FuelEU), devraient être utilisées pour des projets de soutien à la décarbonation du secteur maritime grâce à un mécanisme de transparence renforcé

La Commission européenne sera chargée d’assurer le suivi de la mise en œuvre du règlement dans le cadre d’un processus d’établissement de rapports et de réexamen.

Le nouveau règlement sera publié au Journal officiel de l’UE (JOUE) après l’été et entrera en vigueur le vingtième jour suivant cette publication. Les nouvelles règles s’appliqueront à partir du 1er janvier 2025, à l’exception des articles 8 et 9 qui s’appliqueront à partir du 31 août 2024.

Décarboner le transport maritime : le Conseil de l’UE adopte le règlement FuelEU – Le Moci

Pacte vert européen : 13 mesures proposées par la Commission pour une réduction des émissions carbone

Parmi les mesures les plus emblématiques du "paquet climat" se trouve l'interdiction de la vente de voitures thermiques (essence ou diesel) neuves à partir de 2035. Un texte voté par les eurodéputés le 8 juin - Crédits : South_agency / iStock
Parmi les mesures les plus emblématiques du “paquet climat” se trouve l’interdiction de la vente de voitures thermiques (essence ou diesel) neuves à partir de 2035 – Crédits : South_agency / iStock

Face au réchauffement climatique, la Commission européenne a lancé une vaste offensive législative. Le 14 juillet 2021, ce ne sont pas moins de 13 mesures juridiquement contraignantes (5 directives et 8 règlements) qui ont été proposées par Bruxelles. Le but : baisser de 55 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990 d’ici à 2030. 

Un objectif validé par les Etats membres et le Parlement européen fin juin 2021. Et une première étape vers la neutralité carbone à l’horizon 2050, colonne vertébrale du Pacte vert pour l’Europe.

Au sein du plan de bataille de l’exécutif européen, intitulé “Fit for 55” (“Ajustement à l’objectif 55”), figurent notamment la mise en place d’une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne, l’extension et le renforcement du marché européen du carbone ou encore la fin de la vente des voitures thermiques pour 2035. Autant d’actes législatifs qui ont quasiment tous été adoptés par les eurodéputés et les Etats membres. Tour d’horizon.

Fin des voitures neuves diesel et essence en 2035

Cette révision du règlement sur les émissions des voitures et camionnettes neuves est peut-être la mesure du “paquet climat” dont les effets seront les plus mesurable par les citoyens. Car avec cette proposition, la Commission a frappé très fort : en 2035, les voitures et camionnettes mises sur le marché ne devront plus émettre de CO2. Les véhicules à moteur thermique (essence ou diesel) ne pourront donc plus être vendus à compter de cette date. Seuls des véhicules électriques ou à hydrogène seraient alors mis en circulation. 

Une mesure qui pourrait toutefois évoluer : avant 2026, la Commission européenne établira un rapport d’étape sur les progrès accomplis en matière de décarbonation des véhicules. Parmi les sujets devant être étudiés, on trouve “la contribution potentielle des technologies innovantes et des carburants alternatifs durables, y compris des carburants de synthèse”, précise le règlement, qui ouvre ainsi la porte à des dérogations pour des combustibles fabriqués à partir d’électricité en principe renouvelable.

Dans le détail, les voitures neuves vendues en 2030 devraient produire en moyenne 55 % d’émissions carbone en moins par rapport aux niveaux constatés en 2021, contre une réduction de 50 % pour les camionnettes. Le texte a été adopté en mars 2023.

Déploiement d’infrastructures de distribution des carburants alternatifs

Dans l’optique de cette suppression des voitures à moteur thermique, la Commission a aussi proposé d’imposer aux Etats membres une multiplication des points de recharge pour les voitures électriques et des stations de ravitaillement pour les véhicules à hydrogène. Sur les grands axes européens, les premières devraient disposer de points de recharge tous les 60 kilomètres d’ici 2025, et les seconds de stations de ravitaillement placées tous les 200 kilomètres à partir de 2030. La législation a été adoptée en juillet 2023.

Refonte du marché du carbone

Il s’agit d’une des mesures phares avancées par Bruxelles. Mis en place en 2005, le système d’échange de quotas d’émission (SEQE) établit un prix de la tonne de CO2 pour certains secteurs aux activités fortement émettrices. Un système de pollueur-payeur destiné à rendre les entreprises plus vertueuses.

La refonte du texte prévoit une extension du système aux combustibles du transport routier et du chauffage des bâtiments, qui n’étaient jusque-là pas concernés, via le lancement d’un marché du carbone distinct en 2027. Le transport maritime va intégrer quant à lui le système d’échange déjà existant.

Pendant des années, les acteurs économiques et industriels bénéficiaient par ailleurs de quotas au nombre trop élevé, et le prix de la tonne était trop faible pour qu’il les incite à réduire leurs émissions. Si cet effet de marché a été corrigé, la Commission européenne a souhaité aller plus loin. L’exécutif a proposé de réduire nettement le volume de CO2 disponible sur le marché, afin que le prix des quotas augmente de manière bien plus conséquente et que les entreprises s’efforcent de rejeter encore moins de CO2 dans l’atmosphère. 

Le 18 décembre 2022, le Parlement européen et les Etats membres ont trouvé un compromis prévoyant de réduire les émissions de gaz à effet de serre des secteurs du SEQE à 62 % à l’horizon 2030, par rapport aux niveaux de 2005. Le texte final a été adopté en avril 2023. 

Un Fonds social pour le climat

Aussitôt présentées, les propositions du Fit for 55 ont suscité de vives réserves de personnalités politiques, de la société civile et de certains Etats membres. 

Au cœur des préoccupations : les conséquences sociales du “paquet climat”. D’aucuns s’inquiètent d’une transition climatique qui toucherait avant tout les citoyens les plus vulnérables économiquement, parmi les plus dépendants des énergies fossiles. 

L’extension des quotas carbone aux secteurs du transport routier ou encore du bâtiment font notamment craindre à certains observateurs, dont plusieurs eurodéputés, que le surcoût entraîné pour les industriels ne se répercute sur les prix des logements et des biens.

Pour que les changements à venir n’accroissent pas les inégalités, l’Union européenne s’est dotée d’un Fonds social pour le climat, adopté en avril 2023. Celui-ci aura notamment pour mission d’aider financièrement les personnes dans la rénovation thermique de leur logement ainsi qu’à changer de moyen de locomotion, pour se tourner vers des modes de transports plus propres.

Ce fonds, prélevé sur le budget européen, sera alimenté par une partie des recettes du nouveau marché du carbone pour le transport routier et le bâtiment, soit un montant estimé à 65 milliards d’euros sur la période 2026-2032. A cette somme s’ajoutera le cofinancement des Etats membres à hauteur de 25 %, soit 86,7 milliards d’euros supplémentaires.

Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières

Concrètement, cette mesure vise à appliquer des droits de douane spécifiques aux importations de plusieurs biens produits dans des pays où les normes environnementales sont plus souples que dans l’UE. Souvent appelé “taxe carbone aux frontières”, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières est une autre proposition majeure du paquet “Fit for 55”. En faisant payer un prix au carbone sur certaines importations, cet outil vise à empêcher que les efforts climatiques et environnementaux de l’Europe ne sapent sa compétitivité internationale.

L’objectif de cette législation est double. D’une part, le mécanisme doit faire barrage aux “fuites de carbone”, soit le déplacement des activités industrielles vers des pays aux conditions de production moins contraignantes. La taxe doit limiter, voire annuler, les avantages de telles délocalisations. D’autre part, l’objectif est d’encourager le reste du monde à rehausser ses exigences climatiques. 

Afin de respecter la libre concurrence et les règles de l’OMC, le mécanisme s’accompagne de la suppression des quotas gratuits pour les entreprises européennes. Ces deux réformes coordonnées permettent de ne pas avantager ou pénaliser une entreprise en fonction de son pays d’origine et de son lieu de production.

Le mécanisme d’ajustement carbone a été adopté en mai 2023 et sa mise en œuvre progressive a commencé le 1er octobre 2023. Une période de transition est prévue (jusqu’à fin 2025), durant laquelle les importateurs doivent seulement déclarer les émissions carbone des produits venus de l’extérieur du marché unique.

Fin des quotas de carbone gratuits pour l’aviation

Depuis 2012, les vols à l’intérieur des frontières de l’Union sont couverts par le système d’échange de quotas d’émission. Mais la majeure partie de ces “permis de polluer” sont pour l’heure attribués à titre gratuit aux compagnies aériennes. La révision du marché du carbone pour l’aviation a été définitivement adoptée en avril 2023. Cette suppression sera progressive et deviendra totale en 2026.

L’UE alignée sur le régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (Corsia)

En complément de la fin des quotas d’émissions de CO2 gratuits pour les vols intra-européens, la Commission a proposé une décision pour aligner l’UE pour les vols internationaux sur le mécanisme Corsia, adopté en octobre 2016 par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), une agence des Nations unies. De fait, 191 pays étaient déjà signataires du dispositif prévu pour que les compagnies aériennes compensent et réduisent leurs émissions, dont celles des Vingt-Sept individuellement. Le Conseil a adopté le texte proposé en décembre 2022. 

Augmentation de la part des carburants durables pour l’aviation

La Commission européenne espère aussi appuyer le développement et une utilisation accrue de carburants durables dans l’aviation. Le règlement “ReFuelEU Aviation” a pour but de contraindre les fournisseurs de carburants à augmenter la part de carburants faiblement carbonés lors du ravitaillement des avions dans les aéroports des pays de l’Union européenne. Le texte a été adopté en octobre 2023.

Incitation à l’utilisation de carburants durables dans le secteur maritime

La Commission européenne applique la même logique pour les mers. Elle entend également aboutir à une réduction des émissions carbone du transport maritime. Avec une approche néanmoins légèrement différente de celle privilégiée pour le secteur aérien. Si pour ce dernier, c’est au fournisseur de proposer un carburant plus propre, dans le secteur maritime, c’est au propriétaire du navire de garantir un approvisionnement moins polluant en matière d’émissions carbone. Ces nouvelles contraintes sont détaillées dans le règlement “FuelEU Maritime”. Après une adoption en juillet 2023, l’essentiel des nouvelles règles s’appliqueront à partir du 1er janvier 2025.

Doublement de la part des énergies renouvelables

En octobre 2023, un nouvel objectif de 42,5 % d’énergies renouvelables dans le mix européen d’ici à 2030 a été adopté. L’objectif précédent était de faire grimper cette part à 32 % à la même date.

La Commission avait présenté le 14 juillet 2021 une révision de la directive concernée, fixant l’ambition européenne à 40 % d’énergies vertes dans le mix énergétique de l’UE. Conséquence de la guerre en Ukraine et des tensions entre Moscou et Bruxelles, l’exécutif européen était même allé jusqu’à proposer de porter à 45 % l’objectif de l’UE afin de réduire la dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie.

Selon l’Office européen des statistiques Eurostat, les énergies renouvelables représentaient 23 % de la consommation finale brute d’énergie de l’UE en 2022. Des chiffres encore insuffisants, alors que 75 % des émissions de gaz à effet de serre des Vingt-Sept proviennent de la production d’énergie et de son utilisation.

Refonte de la fiscalité de l’énergie

Pour assurer la transition souhaitée vers les énergies vertes, la Commission européenne mise aussi sur la fiscalité. Elle entend ainsi réviser la directive sur la taxation de l’énergie, pour que l’imposition des produits énergétiques soit cohérente avec les ambitions climatiques de l’UE. Actuellement, la législation européenne autorise toujours des exonérations et des taux réduits sur les énergies fossiles, ce qui encourage leur consommation. A l’inverse, les règles ne sont pas adaptées aux objectifs européens en matière d’électricité.

C’est sans doute l’un des sujets les plus sensibles pour les Etats membres, alors que les prix de l’énergie ont bondi depuis la fin de la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine. La directive est toujours bloquée au Conseil, où l’unanimité des voix est requise.

Répartition des efforts climatiques entre Etats membres

Le règlement à ce sujet fixe des objectifs renforcés aux pays de l’UE dans la réduction de leurs émissions carbone pour les secteurs qui ne sont pas couverts par le marché carbone européen SEQE : transport maritime intérieur, petites industries, déchets et agriculture. Après une adoption de la législation en mars 2023, l’objectif est d’atteindre dans ces secteurs une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici à 2030. 

Efficacité énergétique

Avec la proposition de directive sur la performance des bâtiments, c’est l’efficacité énergétique des constructions qui est ciblée, afin de mener plus en avant la lutte contre les “passoires thermiques”. Tous les nouveaux bâtiments devront être à zéro émissions à partir de 2030. Les Etats membres devront rénover les 16 % des bâtiments les moins performants d’ici la fin de la décennie et les 26 % les moins performants à l’horizon 2033, hors résidentiel. Le Parlement européen et le Conseil se sont entendus sur ce texte, qui a ensuite été voté le 12 mars dernier en session plénière par les eurodéputés.

Une autre directive a été adoptée en juillet 2023. Consacrée à “l’efficacité énergétique”, elle prévoit une réduction de la consommation finale d’énergie d’au moins 11,7 % en 2030 par rapport à des prévisions établies en 2020.

Créations massives de puits de carbone naturels

Pour atteindre la neutralité climatique en 2050, l’UE pourra difficilement cesser d’émettre totalement des gaz à effet de serre liées aux activités économiques. C’est pourquoi elle a besoin de développer des puits de carbone naturels, qui permettent l’absorption des excès d’émissions, tels que les forêts.

Le règlement, adopté en mars 2023, fixe un objectif européen de 310 millions de tonnes d’équivalent CO2 absorbées par les puits de carbone naturels d’ici à 2030. Des objectifs nationaux deviendront contraignants pour les Etats membres à partir de 2026. Certaines flexibilités ont toutefois été introduites dans la législation, notamment en cas de catastrophe naturelle mettant à mal les capacités d’un pays à remplir ses objectifs.

https://www.touteleurope.eu/environnement/pacte-vert-europeen-les-12-mesures-proposees-par-la-commission-pour-une-reduction-des-emissions-carbone/