Brexit : quels scénarios possibles ?

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Actualité


16.01.2019

Justine Daniel

Le rejet de l’accord de retrait de l’UE, négocié par Theresa May avec Bruxelles, met le Royaume-Uni au pied du mur, à moins de deux mois et demi de la date fatidique du Brexit. Va-t-on vers un « no deal » ? Un report de la sortie ? Un nouveau référendum ? Toute l’Europe fait le point sur les différents scénarios envisagés aujourd’hui.

Quels scénarios pour le Brexit ? - Crédits : iStock

Quels scénarios pour le Brexit ? – Crédits : iStock

Mardi 15 janvier, les deux tiers des députés britanniques se sont opposés à l’accord sur le Brexit négocié par leur gouvernement avec Bruxelles. Les raisons de leur vote diffèrent largement d’un bout à l’autre de la classe politique, déchirée sur le sujet.

« Nous constatons que les députés des Communes qui ont voté contre l’accord négocié avec nous l’ont fait avec des motivations diverses, opposées, contradictoires« , a ainsi commenté Michel Barnier, négociateur en chef du Brexit pour l’UE, au lendemain du vote dans l’hémicycle du Parlement européen. Et ce sans « manifestation claire d’une opinion positive sur un accord alternatif« .

De leur côté, les Européens, également dans l’incertitude et face au risque d’un no deal, continuent de répéter que l’accord sur la table est le « meilleur possible« , et pour l’instant non renégociable.

Quels sont, dès lors, les scénarios possibles ?

Brexique : le lexique du Brexit

Une sortie sans accord : le saut de la falaise

Suite au vote, la probabilité d’un no deal (sortie sans accord) s’est accrue, et ce alors que la date fatidique approche. Si la classe politique britannique n’apporte aucune autre solution d’ici le 29 mars à minuit, le Royaume-Uni passera brutalement du statut d’État membre – et toutes les dispositions qui en découlent – à celui de simple pays tiers.

En cas de no deal, l’accord de sortie actuellement sur la table, supposé encadrer et sécuriser la sortie du Royaume-Uni de l’UE, ne serait donc pas appliqué.

L’accord de sortie en 8 points-clés

Présenté comme une catastrophe par Theresa May – qui a d’ailleurs vainement misé sur cette menace pour faire valoir son accord – un no deal devrait entraîner d’importantes conséquences économiques, bien que difficiles à évaluer. Le coût estimé d’un tel scénario varie selon les secteurs, d’autant plus qu’Européens et Britanniques s’évertuent depuis plusieurs mois à en limiter l’incertitude et les conséquences. Cependant, le gouvernement britannique a lui-même estimé une perte de 8% de PIB sur 15 ans, si ce « saut de la falaise » venait à effectivement se réaliser.

Cette solution est toutefois soutenue par de rares députés parmi les plus fervents Brexiters, et notamment l’ancien négociateur britannique pour le Brexit, Boris Johnson. Pour lui, un brusque retour aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) serait préférable à ce qu’il juge être un mauvais accord. Pour l’heure, les marchés financiers ne croient pas encore au no dealla valeur de la livre s’est maintenue dans une fourchette observée depuis juin 2016 par rapport à l’euro – et misent plutôt sur le succès d’un possible « plan B ».

Renégocier avec les Vingt-Sept ?

Un amendement voté par la Chambre des communes le 9 janvier oblige en effet Theresa May à présenter un plan alternatif avant lundi 21 janvier. Ce qui témoigne par ailleurs de l’existence d’une majorité en faveur d’une alternative au no deal à la Chambre des communes. La Première ministre peut-elle ainsi renégocier avec les Vingt-Sept ?

Le gros point noir de l’accord sur la table est le fameux « backstop », qui consiste à maintenir le Royaume-Uni dans une union douanière avec l’UE pour conserver l’absence de frontière entre les deux Irlande – que l’appartenance des deux pays à l’UE assure aujourd’hui. Les opposants à l’accord, et notamment les unionistes nord-irlandais, craignent que cette solution de dernier recours – appliquée si aucune alternative n’était trouvée durant la période de négociation de la future relation (actuellement fixée du 30 mars 2019 au 31 décembre 2020, mais prolongeable) – soit en fait définitive, maintenant le Royaume-Uni dans le joug de l’UE.

Les Vingt-Sept, puis à nouveau les présidents de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et du Conseil européen Donald Tusk, dans une lettre adressée à Theresa May le 14 janvier, ont confirmé la nature temporaire du backstop. Mais cette garantie est jugée insuffisante par les députés britanniques, qui constatent que les Européens n’ont jamais accepté d’y mettre une date de fin, prenant ainsi le parti de Dublin.

Pour Die Welt, ceux-ci pourraient cependant revenir sur cette position de principe – sans pour autant renoncer à leurs lignes rouges – afin d’éviter une inquiétante sortie sans accord. Mais selon Le Monde, étant donnée l’ampleur de la défaite du 15 janvier, il est trop tard pour accorder quelques concessions aux Britanniques et faire revoter Westminster.

Un nouveau référendum est-il possible ?

Reste la possibilité de s’en remettre directement aux citoyens britanniques pour sortir de l’impasse. Les membres pro-européens de la Chambre des communes sont plusieurs à demander la tenue d’un nouveau référendum. Mais quels en seraient les contours ? Et quelle serait la question posée ? 

Un sondage mené par YouGov à l’été 2018, le dernier en date, calculait que 45% des Britanniques seraient en faveur d’un tel scrutin (et 35% contre) portant sur le résultat des négociations avec Bruxelles.

« C’est la seule manière de sortir de cette impasse, de revenir vers le peuple et lui demander : est-ce pour ça que vous avez voté en 2016 ?« , explique l’eurodéputée britannique Jude Kirton-Darling (S&D) qui soutient la campagne pour un second référendum : People’s Vote (le vote du peuple). Ces deux années de négociations semblent en effet avoir permis aux Britanniques de mieux réaliser la complexité d’une telle sortie. Et de constater le caractère intenable des promesses faites par certaines personnalités politiques, dans une campagne marquée par une forte désinformation.

Les libéraux et les indépendantistes écossais soutiennent également l’idée d’un nouveau référendum. Côté travaillistes, ce sont 72% des membres du parti qui seraient convaincus par cette éventualité, selon The Guardian. Ils doivent cependant convaincre leur leader, Jeremy Corbyn, qui craint de faire éclater au grand jour l’ampleur des divisions sur le sujet au sein de son propre parti. Et préfèrerait profiter d’élections générales pour s’installer au pouvoir.

Un tel scrutin est-il cependant réalisable ? Oui, selon le journaliste Hugo Dixon, vice-président de la campagne People’s Vote : « le Parlement devra faire passer une nouvelle loi autorisant ce référendum : par la manière douce avec le soutien de la première ministre, ou par la manière forte, en allant contre sa volonté« . Reste le problème de la question à poser. Porterait-elle sur le Brexit en lui-même ? Sur l’accord de retrait ? Sur l’acceptation d’un no deal ? Le choix serait déjà un biais sur le résultat.

De leur côté, les détracteurs d’un second référendum, nombreux parmi les conservateurs, considèrent qu’une telle solution ne respecterait pas le résultat du vote de juin 2016. Theresa May estime ainsi que « cela serait trahir le choix exprimé par les Britanniques« .

Reporter le Brexit au-delà du 29 mars

Quoi qu’il en soit, le temps devrait manquer. Le gouvernement de Theresa May pourrait donc demander aux Européens de repousser la date effective de sortie, prévue par l’article 50 deux ans après son activation. Une extension qui devrait être acceptée à l’unanimité par les Vingt-Sept.

Ces derniers n’excluraient pas d’accorder un délai supplémentaire, mais seulement jusqu’au 30 juin, avant que les nouveaux députés européens ne prennent leurs fonctions. 

Car l’extension de l’article 50 pose en effet toute une série de problèmes à l’UE dans la perspective des élections européennes du 26 mai, organisées en tenant compte du départ des Britanniques des institutions. De fait, les partis candidats de chaque pays membre sont en train de constituer des listes sur la base du nouveau calcul de la composition du Parlement européen (79 candidats en France par exemple). Or si les Britanniques souhaitaient demeurer dans l’UE au-delà du 30 juin, ils devraient disposer de représentants dans les institutions et donc participer aux élections.

Par ailleurs, renégocier, reporter le Brexit ou organiser un référendum ne pourrait être envisagé par le gouvernement de Theresa May que si celui-ci résistait à la motion de censure à son encontre, qui sera votée mercredi 16 janvier à 20 heures (heure française).

Vers des élections générales ?

Juste après le vote à la Chambre des communes le 15 janvier, le leader du parti travailliste, Jeremy Corbyn, a en effet déposé une motion de censure contre le gouvernement de Theresa May.  

Si cette motion est acceptée, les Conservateurs devront tenter de proposer un nouveau gouvernement et retrouver la confiance des députés avant le 30 janvier. S’ils échouent, le Parlement sera dissous et de nouvelles élections auront lieu. Cependant, The Guardian estime que celles-ci devront se tenir d’ici au 7 mars, afin que le nouveau gouvernement puisse demander l’extension de l’article 50 avant le Conseil européen du 21 mars.

Pour autant, remporter cette motion de censure impliquerait qu’un certain nombre de députés Tories décident de voter contre la Première ministre. Or s’ils sont en désaccord avec Theresa May sur le Brexit, les MPs conservateurs envisagent avec horreur l’arrivée de Jeremy Corbyn au 10 Downing Street…

Un abandon pur et simple du Brexit est politiquement infaisable

Le Brexit pourrait-il être totalement abandonné ? Juridiquement, oui. La Cour de justice de l’UE a rendu un arrêt le 10 décembre 2018 qui prévoit que le Royaume-Uni pourrait décider de manière unilatérale, donc sans l’accord des Vingt-Sept, de révoquer « la notification de son intention de se retirer de l’Union européenne« . Et ce jusqu’à la date effective de départ prévue par l’article 50 deux ans après son activation le 29 mars 2017.

Brexit : tous les événements depuis le référendum

La Cour précise cependant que cette révocation « doit être décidée à l’issue d’un processus démocratique dans le respect des règles constitutionnelles nationales« . Et de fait, ce scénario est politiquement irréalisable, puisqu’il impliquerait l’organisation d’un débat et d’un vote avant le 29 mars 2019. Et qu’aucune majorité ne se dégage pour l’instant en ce sens outre-Manche.

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