Air France-KLM dans le chaos après le coup de force de l’Etat hollandais

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La Haye a augmenté sa participation dans Air France-KLM afin de renforcer son influence. La présence de deux États au capital avec une vision stratégique différente rend la gestion du groupe complètement ingérable. Un article de notre partenaire, La Tribune.

Quinze ans après sa création, Air France-KLM va à vau-l’eau. Annoncée la semaine dernière, la nouvelle organisation d’Air France-KLM n’a pas clos une énième période de tensions entre le groupe et sa filiale néerlandaise. Comme il fallait le redouter, elle a au contraire ouvert une crise sans précédent qui va fragiliser le groupe pour longtemps.

L’annonce, ce mardi, du gouvernement néerlandais de l’achat sur le marché de 12,68% du capital d’Air France-KLM avec la volonté clairement affichée de porter cette participation au niveau de celle de la France (14,3%) pour peser sur les décisions du groupe, plonge ce dernier dans le désordre et porte un gros coup aux relations entre la France et les Pays-Bas. Qu’un État étranger entre en catimini au capital d’un groupe privé français dont le premier actionnaire est l’État français constitue un acte très agressif de La Haye à l’égard de Paris. Que n’aurait-on dit si l’inverse s’était produit ? A chaud, l’attaque n’a pourtant pas provoqué de réaction violente de la France.

« Je prends acte de cette prise de participation du gouvernement néerlandais, qui s’est faite sans information du conseil d’administration ni du gouvernement français », a dit Bruno Le Maire, selon une déclaration transmise à la presse par son entourage. « Je réaffirme mon soutien à la stratégie de l’entreprise et de son management. Il est essentiel de respecter les principes de bonne gouvernance et qu’Air France-KLM soit géré dans l’esprit de son intérêt social sans interférence étatique nationale. »

La situation va être ingérable

Le vœu s’annonce pieu. L’entrée des Pays-Bas au capital d’Air France-KLM va rendre la situation du groupe -qui était déjà suffisamment compliquée-, complètement ingérable, comme cela l’a été pour toutes les compagnies détenues par plusieurs États comme la scandinave SAS (Suède, Danemark) ou, dans le cas extrême, Air Afrique en son temps. Le groupe n’a pas été construit pour fonctionner avec deux participations étatiques élevées, et va être pris en otage par deux actionnaires ayant chacun une vision stratégique différente.

La France a en effet soutenu la vision du directeur général canadien d’Air France-KLM, Ben Smith, d’une plus grande coopération entre les compagnies, tandis que les Pays-Bas soutiennent à l’évidence la position défendue jusqu’à la semaine dernière par Pieter Elbers, le président du directoire de KLM : celle d’un statu quodans le but de maintenir l’autonomie de KLM. L’entrée des Pays-Bas dans le capital d’Air France-KLM traduit clairement, en effet, le refus hollandais d’une intégration plus poussée du groupe.

Cassure nette

Doublé d’un manque d’affinités entre Ben Smith et Pieter Elbers, ce débat est à l’origine de grosses tensions qui ont eu lieu ces derniers mois entre la maison-mère et sa filiale KLM autour du renouvellement de Pieter Elbers à la tête de la compagnie néerlandaise et, d’une manière plus large, autour de la place de KLM au sein du groupe. Ce bras de fer a provoqué une cassure nette entre le groupe Air France-KLM et sa filiale hollandaise.

Menaces de grève envoyées par la direction de KLM aux membres du conseil d’administration du groupe, manifestations et pétition des salariés, campagne médiatique savamment orchestrée… le soutien apporté à Pieter Elbers et à la défense des intérêts hollandais se sont avérés aussi surréalistes que brutaux. Comme l’a été pour le camp hollandais la menace de se séparer de Pieter Elbers, qui dirige KLM avec succès depuis quatre ans. En 2018, avec un résultat d’exploitation de plus de 1 milliard d’euros, KLM a réalisé près de 80% du résultat du groupe.

L’entrée de Ben Smith au conseil de KLM, la goutte d’eau

La semaine dernière, la vision du Canadien l’a emportée. Pieter Elbers a été contraint de l’accepter pour conserver son poste. Pour de très bons connaisseurs du groupe, la nomination de Ben Smith au conseil de surveillance de KLM a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase dans le camp hollandais, hostile depuis la création du groupe en 2004 à l’entrée du patron exécutif d’Air France-KLM dans son conseil.

Si l’hypothèse de nommer Anne-Marie Couderc, la présidente non-exécutive d’Air France-KLM, comme cela avait été évoqué, convenait au camp hollandais, le choix au dernier moment de Ben Smith, sur son insistance et celui du conseil d’administration, en a visiblement étranglé plus d’un aux Pays-Bas. Derrière cette nomination se joue en effet la fin de l’autonomie de KLM, qu’elle n’avait pas au moment de son rachat par Air France en 2004.

Pour autant, l’organisation de Ben Smith ne menace pas les intérêts hollandais et vise seulement à faire gagner le groupe en efficacité. Plus qu’Air France-KLM, ce sont davantage les mesures prises par le gouvernement hollandais (plafonnement de l’aéroport d’Amsterdam, taxe sur le kérosène) qui menacent le développement de KLM.

Droits de vote double

Et maintenant? Certes, depuis 2016, la France dispose de droits de vote double, mais a priori, les Pays-Bas pourront accéder à ce statut au bout de 24 mois, comme tous les actionnaires au nominatif. Comme l’a indiqué le ministre des Finances hollandais, Wopke Hoekstra, les Pays-Bas veulent peser dans les décisions du groupe. Ce qui promet de nouvelles oppositions.

Ils vont demander beaucoup, alors que, juridiquement, ils n’ont pas droit à grand-chose. Air France-KLM est un groupe français, avec son siège à Paris, coté à la Bourse de Paris. Dans les accords de fusion qu’avait acceptés le gouvernement hollandais en 2003, Air France-KLM a le pouvoir de contrôle de KLM. Depuis 2007,  le patron d’Air France-KLM nomme cinq des neufs administrateurs du conseil de KLM.

L’ironie de l’histoire, c’est que l’entrée de l’État néerlandais au capital intervient alors que, depuis l’an dernier en France, la question du désengagement total de l’État dans la capital d’Air France-KLM n’était plus taboue, même si elle n’était pas d’actualité.

Ce mercredi 27 février, à 9h25, le cours de Bourse d’Air France-KLM chutait de plus de 12%.

La Tribune

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