Réconcilier l’Europe avec ses citoyens

Marcel GRIGNARD

Président de Confrontations Europe

Emmanuel Macron veut lancer des « conventions démocratiques » afin de revivifier l’Europe. Elles doivent devenir un outil efficace et adapté aux enjeux.

Les urnes ont confirmé l’existence d’une France fracturée et politiquement déboussolée, expression des crises auxquelles nous sommes confrontés. Il est urgent que les politiques s’attellent à y répondre, à restaurer la confiance tant au niveau national qu’européen.

Le président de la République veut avancer sur la gouvernance de l’euro, sur sa capacité à investir, sur les enjeux du numérique. Il appelle de ses voeux une Europe qui protège (défense, industrie et politique d’échanges, libre circulation des travailleurs…), et entend redonner du muscle au couple franco-allemand .

Un outil pour revivifier l’Europe

Il appelle à une refondation de l’Union européenne et a réaffirmé, le 3 juillet , son souhait de lancer des «conventions démocratiques» d’ici à la fin de l’année. S’il y a là, globalement, le bon agenda, reste à en préciser le ­contenu et décider des priorités.

C’est le cas en particulier des conventions démocratiques, qui portent en elles la possibilité de revivifier l’Europe et de la réconcilier avec ses citoyens. Elles doivent devenir un outil efficace et adapté aux enjeux.

Ces «conventions démocratiques» doivent permettre de réduire la distance entre les citoyens et l’Union européenne et rompre avec les démarches institutionnelles et descendantes. Leurs modalités doivent être adaptées aux réalités nationales, permettre l’expression des fractures, tentations de repli, attentes concrètes vis-à-vis de l’Europe… qui ont leurs spécificités nationales.

Il faudra évidemment faire converger les processus au niveau européen pour «faire ensemble en Europe». Ce doit être un processus de construction d’une identité européenne qui ne se substitue pas aux identités nationales, mais les transcende.

Impliquer la société civile

Ces conventions doivent être organisées au niveau des collectivités locales pour toucher tous les citoyens désireux d’y participer (en évitant le verrouillage des discussions par les tenants de ­dogmes quels qu’ils soient). Il faut y constituer des panels représentant la diversité des points de vue et de la société. Ni démocratie directe ni ­simple consultation, il s’agit d’un espace de délibération s’inscrivant dans la durée.

Elles doivent impliquer la société civile (citoyens et société civile qui les organisent ne se confondent pas). Les associations (dont certaines ­concentrées sur les enjeux euro­péens), les organisations syndicales et professionnelles, les entreprises forment une société civile structurée et responsable, intermédiaire entre la repré­sentation politique et les citoyens. Elle est un moyen irremplaçable de redyna­misation de la démocratie et de dépassement de la crise du politique, alors qu’elle est historiquement considérée avec méfiance par le pouvoir politique.

Les conventions démocratiques doivent aborder à la fois le point de vue général et les attentes spécifiques en matière de défense, de migrations, d’économie, de social, de démocratie. Cela participe à donner sens et contenu à une politique européenne qui apporterait une plus-value par rapport aux solutions nationales, dans une subsidiarité repensée.

Un comité de pilotage organisé en collège (citoyens, organisations de la société civile, élus nationaux et européens…) serait un moyen d’assurer continuité, contenu et qualité du processus, d’éviter son institutionnalisation. Il pourrait traiter de la structuration, du contenu, du déroulement des travaux, de la communication. L’articulation entre les processus nationaux ayant leurs spécificités et la convergence européenne est un point clef. La région pourrait en être le lieu pivot.

Redonner sens et contenu au projet européen, le refonder ne peut se penser et se réaliser sans les citoyens, encore moins contre eux.

 

Cet article est paru dans Le Cercle des Echos le 21 août 2017.