Presidence tcheque et Elargissement de l’UE – EURACTIV.fr

En début de PTUE, le président du Conseil européen, Charles Michel, était à Skopje mardi (5 juillet) pour convaincre les Macédoniens d’accepter un accord qui pourrait relancer leurs négociations d’adhésion à l’Union européenne, ce qui donnerait un nouvel élan à l’élargissement de l’UE dans les Balkans.

Si cet accord difficile à accepter sur le plan politique est le dernier d’une série de choix délicats imposés aux candidats à l’adhésion dans la région, l’Union européenne doit quant à elle éviter de reproduire ses erreurs passées dans sa nouvelle promesse d’élargissement à l’Ukraine et à la Moldavie.

La République tchèque, qui assure actuellement la présidence tournante du Conseil de l’UE pour six mois, devra trouver un équilibre entre, d’une part, les pays qui préconisent une adhésion rapide de l’Ukraine au bloc et, d’autre part, les pays qui mettent l’accent sur les Balkans occidentaux.

Lors de sa visite en Macédoine du Nord, Charles Michel a souligné qu’il s’agissait d’un « moment crucial » pour le pays et a exhorté les Macédoniens à accepter la proposition française qui permettrait au processus d’adhésion de prendre en compte certains points de désaccord avec la Bulgarie, notamment la culture, la langue et l’identité.

« Votre pays a une chance de redevenir une tête de file de l’élargissement », a déclaré M. Michel.

« Personnellement, je suis totalement convaincu qu’il s’agit d’une solution équilibrée qui répond à vos principales préoccupations. L’objectif est clair : entamer les négociations d’adhésion de la Macédoine du Nord et aller enfin de l’avant pour construire notre avenir européen commun », a déclaré M. Michel.

Le président du Conseil a déclaré que si Skopje dit « oui », la première conférence intergouvernementale sera organisée dans les prochains jours et les autres étapes suivront sans tarder.

« Ce qui est important, c’est que cette proposition fait clairement référence à la langue macédonienne, sans réserve de la part de l’UE. La langue macédonienne est votre langue et la proposition le respecte. L’acquis, la législation européenne, seront tous traduits en macédonien », a déclaré M. Michel, pour tenter de rassurer les détracteurs de la proposition française.

« Nous sommes également très conscients des préoccupations exprimées par certains concernant votre identité nationale. Vous pouvez compter sur mon soutien total, en tant que président du Conseil européen, pour défendre systématiquement vos droits légitimes », a déclaré M. Michel.

La Bulgarie a, pour sa part, accepté la proposition. Toutefois, malgré la pression de Bruxelles et de l’Albanie voisine, dont le parcours d’adhésion est étroitement lié à celui de Skopje, la pression nationale pour le rejet du compromis a encore augmenté mardi en Macédoine du Nord.

En effet, les manifestations devant le parlement macédonien se sont poursuivies pour la quatrième nuit consécutive, et plusieurs manifestants ont jeté des pierres et des cocktails Molotov, blessant la police. Les manifestants affirment que l’accord élimine leur ethnicité et ont même comparé l’attitude de la Bulgarie envers les Macédoniens à la rhétorique utilisée par le président russe Vladimir Poutine au sujet des Ukrainiens.

Les détracteurs de la proposition française affirment qu’elle ouvre la porte à la négation de l’identité nationale des Macédoniens.

Le compromis proposé à la Macédoine du Nord « alimente la polarisation politique et ethnique dans ce pays », a confié à EURACTIV Dušan Reljić, le responsable du bureau bruxellois de l’Institut allemand pour les affaires internationales et de sécurité (SWP).

Selon lui, les citoyens estiment que la proposition « favorise essentiellement les objectifs des nationalistes bulgares vis-à-vis des Macédoniens ».

« Ils n’ont pas entendu M. Michel ou quiconque dans l’UE dire que, à l’avenir, les gouvernements de Sofia ne pourront pas continuer à utiliser le processus d’adhésion à l’UE pour obtenir de nouvelles concessions de Skopje en ce qui concerne les différends bilatéraux sur l’histoire, la langue et l’ethnicité », a-t-il ajouté.

Pour M. Reljić, l’UE risque de perdre encore plus de crédibilité politique en Europe du Sud-Est.

S’exprimant aux côtés de Michel, le Premier ministre macédonien Dimitar Kovacevski a déclaré que la proposition européenne, qu’il a qualifiée de « positive » pour les Macédoniens, intègre les commentaires de Skopje.

« La proposition française modifiée, définie et complétée nous donne ce pour quoi nous nous battions depuis des années — une mention claire de la langue macédonienne », a déclaré le Premier ministre, ajoutant que la proposition européenne rend « fausses et mensongères » toutes les suppositions suggérant le contraire.

« Nous sommes fiers de notre identité, jusqu’à présent, personne n’a été capable d’assimiler le peuple macédonien, et c’est un fait », a déclaré M. Kovacevski.

Pour la PTUE, pas de choix « Est ou Sud » pour l’élargissement

Il est devenu plus important de faire progresser l’élargissement dans les Balkans depuis que l’UE a accordé le statut de candidat à l’Ukraine et à la Moldavie, augmentant ainsi la pression pour que ces pays tiennent leurs promesses d’adhésion.

Un accord entre la Macédoine du Nord et la Bulgarie permettrait de « relancer la perspective européenne des Balkans occidentaux à un moment où ils se sentent désavantagés par rapport à l’Ukraine et à la Moldavie », a confié Eric Maurice, directeur du bureau bruxellois de la Fondation Robert Schuman à EURACTIV.

Comme l’a rapporté EURACTIV, les dirigeants des Balkans occidentaux étaient très mécontents de l’impasse dans laquelle se trouvait l’élargissement en marge du sommet du Conseil européen à Bruxelles le 23 juin, au cours duquel l’Ukraine et la Moldavie se sont vu attribuer le statut de candidat à l’adhésion à l’UE.

Toutefois, la République tchèque, qui a succédé à la France à la présidence du Conseil de l’UE le 1er juillet, promet de faire avancer l’élargissement dans les deux sens.

« Ces deux éléments ne sont pas contradictoires. Il n’est pas question de [choisir entre] “Est et Sud” », a déclaré le Premier ministre tchèque Petr Fiala lorsqu’il a été interrogé par EURACTIV République tchèque durant la conférence de presse organisée au début de la présidence tchèque du Conseil de l’UE.

« Nous pouvons nous concentrer sur les deux, et nous voulons nous concentrer sur les deux », a ajouté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui participait également à la conférence. « La rapidité du processus d’adhésion dépend d’eux », a-t-elle précisé.

Selon M. Fiala, l’Union européenne devrait ouvrir ses portes aux Balkans occidentaux pour protéger la région de la propagande russe et éviter une déstabilisation potentielle.

En octobre 2022, la présidence tchèque organisera un sommet informel à Prague. Les États membres et d’autres pays européens y participeront également, « de l’Islande à l’Ukraine ».

« Il en va de notre intérêt à tous. L’UE ne peut pas se contenter de regarder en direction de l’Est ou du Sud. Elle doit regarder dans toutes les directions », a affirmé M. Fiala.

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