Françoix-Xavier Bellamy, une tête de liste décalée pour LR


Le professeur de philosophie versaillais ne croit pas à la démocratie européenne mais veut faire avancer l’idée européenne en travaillant sur la culture et l’éducation. Il estime que les racines de l’Europe sont chrétiennes, mais pas seulement.

« Je n’étais pas spécialement programmé pour cette candidature ». Professeur de philosophie, François-Xavier Bellamy, tête de liste Les Républicains pour les élections européennes, a le mérite d’être franc. Il n’hésite pas à reconnaître qu’il « débute en politique » et qu’il n’est pas « spécialiste des questions européennes ». De fait il parle à tout bout de champ d’Europe plutôt que d’Union européenne, et ne croit pas à la « démocratie européenne ».

« Le demos, comme défini par la philosophie grecque, c’est un peuple, une langue. Dans une démocratie, ce sont les citoyens qui décident de leur destin, l’UE n’est qu’une alliance de démocraties qui ont décidé de transférer des compétences » assure-t-il, lors d’une rencontre avec les journalistes de l’association Europresse.

Devenu tête de liste sur une demande express de Laurent Wauquiez, le jeune candidat a insisté pour ne pas être le seul « alibi » jeune de la liste LR, qui devrait comporter 50 % de nouveaux profils sur les 20 premiers candidats. En même temps que des eurodéputés sortants peu reconnus pour leur capacité d’investissement au Parlement européen – Rachida Dati, Brice Hortefeux et Nadine Morano.

Les sondages donnent pour l’heure entre 8 et 12 sièges à cette liste hétéroclite, contre 20 pour la délégation LR sortante.

Le scrutin européen frappé d’une crise de jeunisme

Pour enrayer leur perte de crédibilité, les partis français envisagent des candidats de plus en plus jeunes pour les représenter. Une stratégie qui risque de peser sur l’influence française déjà affaiblie.

La candidature de Bellamy n’arrive pas pas hasard, en ces temps difficiles pour la droite française. « Je ne crois pas à la fin des clivages. Il faut que la droite relève la tête pour éviter le débat entre nationalistes et progressistes », décrypte-t-il.

Un mini Macron pro-Orban ?

Dans ce clivage établi, Bellamy se situe davantage du côté d’Emmanuel Macron que de Marine Le Pen. Il envisage par exemple l’émergence à long terme, si les consciences sont prêtes, des États-Unis d’Europe.  « Macron a une vision où les États-nations sont dissous dans l’Europe, moi je ne crois pas au projet fédéraliste, parce que les populations ne sont pas prêtes » assure le jeune homme, qui cite l’économiste et théoricien Hayek, assurant que les ordres qui se créent sont spontanés, et qu’on ne les produit pas par décision politique.

Mais les divergences avec LREM ne sont pas légion, et se cantonnent à des points précis. Par exemple, Bellamy ne veut pas de budget de la zone euro, contrairement à ce que LREM défend.

Et il soutient la présence de Viktor Orban au sein du groupe PPE du Parlement européen. Une position inattendue pour sa génération, alors que la droite suédoise s’est déjà démarquée de cette position en souhaitant officiellement le départ du chef d’État hongrois et de son parti Fidesz du PPE.

« Bien sûr je suis plus Juncker qu’Orban. La cohabitation devient extrêmement difficile, mais elle parait relativement nécessaire » assure le représentant de la droite française, évoquant le risque d’une fracture géographique entre l’Ouest et l’Est de l’Europe, et agitant l’épouvantail d’un « risque de majorité populiste » au Parlement européen, si le parti hongrois venait à rejoindre la Liga de Matteo Salvini  et le Rassemblement national.

Un risque pourtant faible, car le parti européen Europe des Nations et des Libertés défend des idées radicalement opposées à celles d’Orban sur les migrations notamment ; et même ses 15 députés, dont le PPE a besoin pour peser, ne feraient pas d’ENL un parti majoritaire, mais le placerait en quatrième position derrière la droite, la gauche et le centre.

L’éducation et la culture

Autre élément inattendu de sa candidature, François-Xavier Bellamy veut travailler sur les questions d’éducation et de culture au Parlement européen.  Des thèmes certes évoqués par beaucoup de Français lors des consultations citoyennes sur l’Europe, mais qui ne font pourtant pas partie des compétences principales de l’UE, contrairement aux finances, aux enjeux environnementaux et énergétiques.

Le professeur défend les échanges européens, notamment au niveau du secondaire, comme Erasmus a pu le faire pour les étudiants, pour créer une conscience collective de l’Europe, et consacrer 1 % du budget européen à la culture, contre 0,15 % actuellement. « Il faut que l’Europe se fonde sur une civilisation partagée » défend-il, sans préciser laquelle. Catholique antiavortement, il assure néanmoins que « ce que le christianisme a apporté à l’Europe, c’est la laïcité », et déplore que l’image du catholicisme soit utilisée par Matteo Salvini, toujours un chapelet à la main. Une utilisation de la religion qui est un dévoiement de la foi selon lui, alors que Manfred Weber a largement eu recours aux images chrétiennes dans la campagne des Spitzenkandidaten. Pour Bellamy, les racines de l’Europe ne sont pas seulement chrétiennes.

 



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