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Actualité
02.09.2019
La lagune de Venise, les carillons du palais national de Mafra au Portugal, le Palais de justice de Bruxelles, le château de Sammezzano en Toscane… tous ont en commun de faire partie du patrimoine européen « en danger« , selon l’ONG Europa Nostra. Après l’incendie de Notre-Dame de Paris, en avril 2019, un appel a été lancé pour redynamiser les politiques européennes de défense du patrimoine.
La cathédrale Notre-Dame de Paris le 12 mai 2019, un peu moins d’un mois après l’incendie des 15 et 16 avril – Crédits : Marie Guitton / Toute l’Europe
Carte du patrimoine européen « en danger« , selon l’ONG Europa Nostra
en jaune : lieux présélectionnés
en orange : lieux sélectionnés, en cours de rénovation
en vert : rénovation achevée
« L’incendie de la cathédrale [Notre-Dame de Paris] nous rappelle que nous sommes liés par quelque chose de plus important et de plus profond que les traités. » Voilà ce que déclarait le président du Conseil européen Donald Tusk le 16 avril 2019, au lendemain de l’incendie du monument parisien.
« Le patrimoine culturel suscite un intérêt tout particulier de la part des institutions de l’Union européenne« , explique Clément Serain, auteur d’une étude sur les politiques européennes de conservation-restauration du patrimoine culturel. Car ce dernier aurait la « capacité potentielle » de « créer chez les citoyens européens un sentiment d’appartenance à une entité partagée par plus de 500 millions de personnes« .
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Pour conserver, ou restaurer le patrimoine, des financements européens sont à ce titre régulièrement mobilisés, notamment grâce à la Banque européenne d’investissement (BEI), au programme Europe créative, ou encore au Feder, le Fonds européen de développement régional, depuis les années 1970. Ce dernier fonds a par exemple permis la restauration du site de Pompéi, endommagé par l’exposition à l’air, à la lumière et à l’humidité.
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La culture, un portefeuille mal aimé
Dans les faits toutefois, la culture, et donc la défense du patrimoine, n’ont pas toujours la faveur des dirigeants européens – tout autant que nationaux. D’autant que la législation européenne dans le domaine du patrimoine est en large partie non contraignante pour les Etats membres. Cette politique relève en premier lieu des gouvernements nationaux ; l’UE ne possède que des compétences d’appui en la matière.
A la Commission européenne, le portefeuille culturel est ainsi toujours associé à d’autres domaines, tels que l’éducation, la jeunesse, l’information ou le tourisme. En 2014, son attribution au Hongrois Tibor Navracsics, un proche de Viktor Orbán, à l’origine de réformes très controversées concernant les médias, les universités ou la justice dans son pays, avait aussi suscité de vives critiques des parlementaires européens et de la presse. « Le portefeuille [de la Culture] est jugé si dérisoire…« , regrettait encore, cinq ans plus tard, Alain Salles, le chef du service international du Monde, dans une chronique publiée après l’incendie de la cathédrale parisienne.
Cet évènement, relayé en direct par les chaînes d’information, aura-t-il joué un rôle de déclencheur ? Le 3 mai 2019, les ministres de la Culture et des Affaires européennes des Vingt-Huit ont publié une déclaration dans le but de redynamiser les politiques de préservation du patrimoine européen. Un appel à l’action qui devrait aboutir à la création d’un « réseau européen sur les compétences en matière de patrimoine, qui fournira conseils et soutien, à la demande de l’État membre concerné, en ce qui concerne l’identification, la protection et/ou la restauration du patrimoine européen en danger« .
Vétusté, pollution et changement climatique
Les dangers qui pèsent sur le patrimoine européen sont aujourd’hui nombreux : menaces de démolition, vétusté, pollution, changement climatique, constructions modernes dans les centres historiques…
Depuis 2013, tous les deux ans, l’ONG Europa Nostra publie une liste des sept sites considérés comme les plus menacés en Europe, avec le soutien de la Banque européenne d’investissement et de la Banque de développement du Conseil de l’Europe. Une initiative qui permet de mobiliser les acteurs nécessaires à la conservation de ce patrimoine.
En 2018, le centre historique de Vienne a particulièrement retenu l’attention de l’ONG. Ce lieu est menacé par la construction de gratte-ciels avoisinants, qui dénatureraient le quartier. Avec le port marchand de Liverpool, il s’agit du seul lieu européen que l’on retrouve, depuis 2001, sur la liste du patrimoine mondial en péril de l’Unesco, organisation des Nations unies qui recense 53 lieux menacés dans le monde.
Deux lieux français ont aussi été sélectionnés par Europa Nostra depuis la création du programme : la forteresse Vauban de Briançon en 2013, et le pont Colbert de Dieppe en 2016. Ce dernier n’est désormais plus considéré en danger, car sa rénovation complète est prévue pour 2020. La Fondation du patrimoine espère qu’il pourra par la suite devenir une attraction touristique à part entière.
Impliquer les Européens et faciliter l’accès aux fonds
2000 sites « en danger » ont également été identifiés depuis 2018 dans les communes de France par la Mission Stéphane Bern, menée en partenariat avec la Fondation du patrimoine. Faute de fonds publics suffisants alloués à leur sauvegarde, c’est aujourd’hui l’appel aux dons de particuliers et d’acteurs privés qui permet de les restaurer.
L’Union européenne tente, elle aussi, de sensibiliser les citoyens à cet enjeu. Ces dernières années, plusieurs groupes de jeunes volontaires du Corps européen de solidarité ont ainsi mené des missions de sauvegarde du patrimoine culturel, par exemple dans les zones sinistrées par des séismes en Italie.
Dans leur déclaration du 3 mai, les dirigeants européens ambitionnent de généraliser ce type d’actions en « donnant à la jeunesse européenne l’opportunité de s’impliquer » dans les projets de restauration.
Pour aider les collectivités, ils s’engagent aussi à « approfondir leurs réflexions sur les moyens de faciliter la mobilisation des programmes et des financements de l’UE » pour qu’ils jouent « tout leur rôle dans la sauvegarde du patrimoine en péril« .