Conseil de l’UE : bilan de la troika de présidences Allemagne, Portugal, Slovènie

Grain de sel VDB : Alors que la France reprend le flambeau en janvier 2022, quel bilan tirer de ces derniers 18 mois de travail ?

Face à la plus grande pandémie que le monde ait connu depuis des décennies, les présidences allemande (juillet-décembre 2020), portugaise (janvier-juin 2021) et slovène (juillet-décembre 2021) ont du réexaminer leur programme initial.

Allemagne,  “présidence-coronavirus”
C’est peu dire que l’Allemagne a dû revoir ses priorités au moment de prendre la présidence du Conseil en juillet 2020. Alors que la plupart des Etats membres sortaient de plusieurs semaines de confinement et que de nombreuses activités économiques vivaient sous perfusion des aides des Etats, l’Union européenne était engagée dans des négociations pour définir le prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027, le budget de l’UE.

Angela Merkel se range à la proposition de 9 pays, dont la France, l’Italie et le Portugal, de créer un instrument de dette commun. Le 18 mai 2020, la France et l’Allemagne dévoilent ainsi le projet d’un fonds de relance de 500 milliards d’euros pour l’UE, comprenant des prêts contractés par la Commission européenne sur les marchés financiers: “NextGeneration EU” .

C’est dans ce contexte que Berlin a pris la présidence tournante du Conseil de l’UE le 1er juillet 2020. Au terme de quatre jours de négociations, les Vingt-Sept finissent par trouver un accord sur le budget pluriannuel et le plan de relance européens le 21 juillet 2020. Doté de 750 milliards d’euros – dont 390 milliards sous forme de subventions et 360 milliards de prêts – ce plan de relance inédit est le premier gros effort d’endettement commun des Etats membres.

Malgré les réticences des pays “frugaux” (Pays-Bas, Autriche, Danemark, Suède et Finlande), la “présidence-coronavirus” de l’Allemagne s’est achevée avec l’adoption définitive du cadre financier pluriannuel 2021-2027 en décembre 2020.L’Allemagne a également joué un rôle important sur le dossier particulièrement sensible du Brexit. Le 24 décembre 2020, la Commission européenne et le Royaume-Uni ont finalement conclu un accord de commerce et de coopération. Berlin a soutenu l’exécutif européen lors de ces négociations et a veillé à conserver l’unité des Vingt-Sept dans leur dialogue avec Londres.

D’autres réalisations pendant la présidence allemande : des avancées dans un accord d’investissement avec la Chine, la mise en place d’un dialogue sur l’état de droit en Europe.

Portugal, une présidence prolifique
Plus de 550 évènements et une vingtaine d’accords conclus à Bruxelles : voilà le bilan de la présidence portugaise revendiqué par Lisbonne. A la suite de l’Allemagne, le Portugal a en effet dirigé les réunions des ministres européens entre le 1er janvier et le 31 juin 2021, une période que nous avions nous-mêmes qualifiée de “prolifique”.

Parmi les éléments marquants de ce semestre 2021, l’adoption de la loi climat a été particulièrement décisive. Cette réussite a été désignée à l’époque comme “la grande réalisation” des Portugais à la tête du Conseil de l’UE par le ministre de l’Environnement João Pedro Matos Fernandes. Ce règlement européen fixe dans le marbre une série d’engagements climatiques de l’Union européenne, comme la neutralité carbone à l’horizon 2050 et l’objectif intermédiaire de réduire d’au moins 55 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.

C’est également sous la présidence portugaise qu’un accord a été trouvé en juin 2021 sur le Fonds de transition juste. Destiné à soutenir les territoires, qui peuvent être fragilisés par la transition écologique (comme ceux qui dépendent du charbon), cet instrument financier de 17,5 milliards d’euros doit empêcher une aggravation des inégalités entre les régions européennes.Toujours dans le domaine du développement durable, la présidence portugaise a organisé les EU-Africa Green Talks sur le thème des investissements verts sur le continent africain. En partenariat avec la Banque européenne d’investissement, de nombreux évènements se sont tenus au Sénégal, en Algérie, en Angola, en Espagne ou encore en Allemagne, avant le Forum de haut niveau UE-Afrique sur l’investissement vert du 23 avril 2021 à Lisbonne.

La tenue d’un sommet social à Porto les 7 et 8 mai a enfin été l’un des grands moments de ce premier semestre 2021. A l’issue de cette réunion, trois objectifs ont été fixés : atteindre un taux d’emploi de 78 % pour les 20-64 ans, permettre à 60 % des adultes européens d’accéder chaque année à une formation et permettre à 15 millions d’Européens, dont 5 millions d’enfants, de ne plus être menacés par la pauvreté et l’exclusion.

D’autres réalisations pendant la présidence portugaise : plusieurs accords sur les nouveaux programmes du cadre financier pluriannuel 2021-2027, un accord sur la prochaine PAC, le soutien à la campagne de vaccination dans l’UE et l’adoption du certificat numérique Covid-19 pour voyager en Europe.

Slovénie, une présidence pour faire avancer les dossiers
“Certaines questions qui ont été menées à bien pendant la présidence slovène ont été entamées pendant la présidence allemande ou portugaise”, a précisé le Premier ministre Janez Janša après une réunion du Conseil européen le 17 décembre, soulignant l’importance de la continuité et des trios dans le processus législatif européen. Quelques jours auparavant, son ministre des Affaires étrangères avait défendu le bilan slovène devant les eurodéputés à Strasbourg, revendiquant jusqu’à 20 dossiers clos au sein des trilogues, ces réunions entre le Parlement et le Conseil afin de trouver des compromis sur les projets législatifs.

Pandémie oblige, plusieurs avancées sont à remarquer dans le domaine sanitaire. Etats membres et eurodéputés se sont par exemple entendus pour renforcer l’Agence européenne des médicaments (EMA) et ont trouvé un compromis pour étendre le mandat du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), destiné à améliorer la surveillance des épidémies.

D’autres réalisations pendant la présidence slovène : validation de plusieurs plans de relance nationaux, un accord sur un plan d’urgence visant à garantir l’approvisionnement et la sécurité alimentaires, un accord sur un cadre pour les salaires minimums, des conclusions sur l’élargissement aux Balkans occidentaux.

S’agissant du secteur numérique, les Slovènes sont parvenus à trouver un accord entre les Vingt-Sept sur deux textes majeurs : le Digital Services Act (DSA) et le Digital Markets Act (DMA). Ce-dernier, un projet de régulation des plateformes du numérique, va en particulier pouvoir être débattu en trilogue sous la présidence française. Les Vingt-Sept et le Parlement européen ont par ailleurs renouvelé pour 10 années supplémentaires la suppression des frais d’itinérance pour les voyageurs qui ne sont plus surfacturés quand ils appellent ou envoient des SMS depuis un autre pays européen.

Le programme du nouveau trio
La France lance un nouveau trio avec la PFUE qui commence le 1er janvier 2022. La présidence du Conseil de l’UE sera ensuite assurée par la République tchèque (second semestre 2022) puis la Suède (premier semestre 2023). Les trois pays se sont accordés sur un ensemble de priorités et quatre thèmes seront portés par ces Etats membres.

La protection des citoyens et des libertés, d’abord, en renforçant par exemple l’état de droit au sein de l’Union européenne. Le trio souhaite lutter contre les migrations illégales et poursuivre les travaux consacrés au pacte sur la migration et l’asile. Ensuite, le trio a mis en avant la promotion d’un nouveau modèle de croissance et d’investissement européen. Cela passe par la mise en œuvre des plans de relance nationaux et un accompagnement des Etats membres dans la transition numérique de leur économie. La France, la République tchèque et la Suède entendent aussi construire une Europe plus verte, plus équitable socialement et plus protectrice de la santé. Cela suppose de continuer de mettre en place le Pacte vert européen, en particulier le paquet climat présenté par la Commission en juillet 2020.

Enfin, sur le plan des relations extérieures, ils défendent une “Europe globale” qui promeut le multilatéralisme ainsi qu’une approche commune en matière de défense et de politique étrangère.

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