Les enjeux du Conseil du commerce et des technologies UE–États-Unis – EURACTIV.fr

La confrontation avec la Russie sera au centre de la prochaine réunion de haut niveau du Conseil du commerce et des technologies (CCT) UE-États-Unis, selon le projet de conclusions obtenu par EURACTIV.

Les vice-présidents exécutifs de la Commission européenne, Margrethe Vestager et Valdis Dombrovskis, rencontreront le secrétaire d’État américain Antony Blinken et la secrétaire au Commerce Gina Raimondo à Paris-Saclay lundi (16 mai) pour la deuxième réunion de la plateforme transatlantique.

Le CCT a été lancée en septembre dernier afin d’établir une plateforme permanente permettant à Bruxelles et Washington de converger sur des sujets politiques clés liés au commerce mondial et aux technologies émergentes. Toutefois, selon le projet de conclusions, la prochaine réunion se concentrera principalement sur la condamnation de la Russie.

« Le monde a radicalement changé depuis la première réunion du Conseil du commerce et de la technologie à Pittsburgh le 29 septembre 2021. L’Union européenne et les États-Unis condamnent fermement l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine », peut-on lire dans le deuxième point de la déclaration commune.

Selon deux sources bien informées à ce sujet, l’accent mis sur la Russie vise à se concentrer sur ce qui rapproche l’UE et les États-Unis. Les discussions sur la loi sur les marchés numériques (DMA) et la loi sur les services numériques (DSA), récemment adoptées par l’UE, ainsi que sur le cloud ont été retirées du programme.

Le document comprend également les conclusions des groupes de travail, qui ont progressé à de divers degrés.

Normalisation

Le document fait référence à la Déclaration pour le futur de l’Internet, récemment signée, qui engage l’UE, les États-Unis et trente autres pays à adopter une vision commune des technologies numériques, notamment pour contrer l’influence croissante de la Chine dans les organismes de normalisation.

Toutefois, la coopération en matière de normes techniques a été lente dans le contexte du CCT. L’échange d’informations dans ce domaine ne fait que commencer avec la mise en place d’un mécanisme d’information sur la normalisation stratégique (SSI) entre l’UE et les États-Unis.

« Nous sommes déterminés à échanger des informations et à explorer les possibilités de collaboration dans le cadre de nos programmes de recherche et de développement, notamment en ce qui concerne l’intelligence artificielle (IA), les technologies de télécommunication au-delà de la 5G et de la 6G, et l’informatique quantique. Étant donné que la 6G sera une infrastructure mondiale essentielle, des approches communes en matière de normes internationales de la 6G sont particulièrement pertinentes », peut-on lire dans le texte.

Utilisation abusive des technologies

L’un des domaines qui a le plus progressé depuis le début du CCT est l’utilisation abusive des technologies à des fins de coercition, de surveillance et de cybermalveillance. Dans ce domaine, l’accent a été mis sur la manipulation de l’information par la Russie, en faisant référence aux coupures d’Internet imposées par le gouvernement.

Les plateformes en ligne sont également pointées du doigt comme des vecteurs de diffusion et d’amplification de pratiques illégales et dangereuses, faisant écho à une formulation similaire figurant dans la Déclaration pour le futur de l’internet.

Les conclusions prévoient l’établissement d’un protocole de coopération sur l’intégrité de l’information en cas de crise, destiné à coordonner la gestion des risques liés à la gouvernance des données et des plateformes en temps de crise, à commencer par l’agression russe contre l’Ukraine.

Le document souligne également la volonté de développer des outils analytiques pour identifier les manipulations de l’information par des puissances étrangères et lutter contre les campagnes de désinformation russes dans les pays tiers.

Contrôle des exportations

« Nous sommes parfaitement conscients que les technologies faisant l’objet d’un commerce peuvent jouer un rôle central dans la capacité des pays autocratiques à mettre en œuvre des politiques autoritaires, à perpétrer des violations et des atteintes aux droits de l’homme, à se livrer à d’autres formes de répression et à porter atteinte à la sécurité d’autres nations », indique le document.

Pour faire face à ce problème, les partenaires transatlantiques ont bien progressé en matière de contrôle des exportations. Au départ, ces discussions étaient bloquées par la résistance des pays d’Europe centrale et orientale, ouverts aux investissements chinois, mais la guerre en Ukraine a fait passer ce sujet au rang des priorités.

Le CCT a constitué une plateforme pour une « coordination sans précédent » en matière de contrôle des exportations en soutenant l’échange d’informations sur les technologies à double usage pour les deux partenaires.

Contrôle des investissements et fournisseurs à haut risque

L’agression russe contre l’Ukraine a également mis en évidence l’importance de disposer de fournisseurs de technologie de confiance pour chacun des deux partenaires transatlantiques. Un cas notoire est celui de Kaspersky, la société russe de logiciels antivirus qui a été ajoutée à une « liste de surveillance » dans plusieurs pays occidentaux.

Bien que les conclusions comprennent une déclaration commune sur l’importance de traiter les risques de sécurité des fournisseurs à haut risque et d’encourager la diversification des fournisseurs, les progrès relatifs à la coopération en matière de contrôle des investissements dans les technologies sensibles restent limités.

Pour remédier à cela, les conclusions annoncent la création d’un groupe de travail dédié au financement public, y compris par les institutions financières internationales, de la connectivité sécurisée dans les pays tiers, visant à promouvoir l’utilisation de fournisseurs de confiance.

Chaîne d’approvisionnement

La résilience de la chaîne d’approvisionnement est un autre sujet qui a accéléré la crise ukrainienne, notamment le néodyme, un aimant du groupe des terres rares, les chaînes d’approvisionnement en panneaux solaires et les semi-conducteurs.

L’UE et les États-Unis ont annoncé des mesures légales visant à renforcer leur autonomie en matière de puces. Parallèlement, les deux partenaires ont réaffirmé leur intention de coopérer en matière d’alertes précoces sur les pénuries de semi-conducteurs et d’éviter une course aux subventions.

Intelligence Artificielle

Le sommet organisé en France devrait également annoncer la création d’un sous-groupe consacré à l’intelligence artificielle, notamment pour élaborer « une feuille de route commune sur les outils d’évaluation et de mesure pour une IA digne de confiance et la gestion des risques, ainsi qu’un projet commun sur les technologies de renforcement de la protection de la vie privée ».

Prochaine réunion

Une troisième réunion du CCT est prévue en décembre aux États-Unis.

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