Bruxelles présente sa première stratégie en faveur de l’égalité des personnes LGBTIQ+ – EURACTIV.fr

La Commission européenne a présenté sa première stratégie pour l’égalité des personnes LGBTIQ+. Par la sorte, elle s’engage à « redoubler d’efforts afin de mieux protéger » les droits de la communauté.

« Chacun devrait être libre d’être la personne qu’il veut être, sans craindre d’être persécuté. C’est la raison d’être de l’Europe et ce pour quoi nous nous battons. Première du genre à l’échelle de l’UE, cette stratégie renforcera nos efforts conjoints visant à faire en sorte que chacun soit traité sur un pied d’égalité », a déclaré jeudi 12 novembre Vera Jourová, vice-présidente de la Commission européenne chargée des valeurs et de la transparence.

Aggravation de la situation

43 % des personnes LGBTIQ+ interrogées dans le cadre de l’enquête de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne ont déclaré avoir été victimes de discrimination en 2019, contre 37 % en 2012, et ce taux s’élève à 60 % pour les personnes transgenres. Environ 58 % des personnes sondées ont admis avoir subi une forme de harcèlement, contre 45 % lors de l’enquête précédente, tandis que 5 % ont révélé avoir été victimes d’agressions physiques ou sexuelles.

Les situations varient également d’une région à l’autre de l’UE. Alors que l’acceptation sociale moyenne de la communauté est passée de 71 % en 2015 à 76 % en 2019, elle a simultanément diminué dans neuf pays de l’UE.

Par exemple, le taux de personnes qui étaient d’accord avec l’affirmation selon laquelle « les personnes homosexuelles et bisexuelles devraient avoir les mêmes droits que les personnes hétérosexuelles » a chuté de 12 % en quatre ans en Bulgarie (39 %) et de 5 % en République tchèque (57 %). Il convient de noter que le taux est le plus bas en Slovénie, avec 31 %.

25 à 40 % des jeunes sans-abri s’identifient comme LGBTIQ+, bien qu’au Royaume-Uni, notamment, ils ne représentent que 7 % de la jeune génération.

Lors de la crise sanitaire actuelle, les personnes LGBTIQ+ ont souvent été contraintes de se confiner dans des environnements hostiles, ce qui les rendues plus vulnérables aux abus, au sans-abrisme et aux troubles mentaux.

« La distanciation sociale peut être particulièrement difficile pour ceux qui ont été rejetés par leur famille, qui sont maintenant forcés à être en famille et/ou qui sont confrontés à des problèmes de santé mentale », selon une étude du chapitre européen de l’Association internationale des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans et intersexes.

Une ligne d’assistance LGBTIQ+ au Royaume-Uni a vu les appels doubler pendant le confinement au printemps dernier.

Discours de haine et familles arc-en-ciel

« Les zones interdites aux LGBTIQ+ sont des zones sans humanité, et elles n’ont pas leur place dans notre Union », peut-on lire dans le document.

L’orientation sexuelle est le motif le plus fréquemment cité dans les discours de haine – elle représente un tiers des cas signalés sur les plateformes en ligne.

L’année prochaine, la Commission proposera d’allonger la liste des infractions pénales de l’UE pour y intégrer les crimes de haine, y compris les discours haineux et les crimes de haine à caractère homophobe et de faire avancer la législation sur la reconnaissance mutuelle de la parentalité dans les situations transfrontières, entre autres.

« Il arrive que des liens familiaux ne soient pas toujours reconnus lorsque des familles arc-en-ciel franchissent les frontières intérieures de l’UE. La Commission présentera une initiative législative sur la reconnaissance mutuelle de la parentalité et étudiera l’adoption de mesures susceptibles de soutenir la reconnaissance mutuelle de partenaires de même genre entre les États membres ».

La députée européenne verte Terry Reintke a salué la proposition, mais a déclaré que la loi devait non seulement reconnaître la relation parent-enfant « mais aussi la relation entre les parents, en particulier lorsqu’il s’agit d’un couple homosexuel ».

Cependant, comme toute proposition relative à la reconnaissance de la famille nécessiterait l’accord unanime de tous les États membres, elle risque d’être bloquée par certains pays, comme la Hongrie et la Pologne.

Cette semaine, la ministre hongroise de la Justice, Judit Varga, a présenté une proposition d’amendement de la constitution hongroise, qui définirait que « la mère – est une femme, le père – un homme », et proclamerait que « la Hongrie protège le droit des enfants à une identité avec le sexe approprié à la naissance et garantit une éducation basée sur les valeurs de notre patrie, l’identité constitutionnelle et la culture chrétienne ».

Bien que Mme Jourová ait maintenu que l’exécutif ne commentait pas les lois avant leur adoption, « les réformes constitutionnelles devraient toujours faire l’objet d’un vaste débat public et inclusif, et pas seulement d’un débat dans les cercles politiques ».

Lutte contre la discrimination

Le droit européen interdit déjà la discrimination, y compris le recrutement et le harcèlement fondés sur l’orientation sexuelle, ainsi que la discrimination salariale, le licenciement et les limites à l’accès à l’emploi pour un motif lié au changement de sexe.

Toutefois, l’application de ces lois diffère d’un État membre à l’autre et la Commission prévoit de prêter attention à leur mise en œuvre.

L’exécutif européen entend également imposer des exigences spécifiques en matière de qualité des données de formation afin d’éviter que les systèmes d’intelligence artificielle ne fassent preuve de discrimination dans l’identification des personnes transsexuelles.

Bruxelles s’efforcera également de « garantir un accès sans discrimination aux droits, à la protection et aux services, y compris pour les enfants LGBTIQ+ ».

Interrogée sur la manière dont l’exécutif prévoit d’y parvenir dans des pays comme la Hongrie qui s’opposent à l’éducation inclusive, la commissaire à l’égalité, Helena Dalli, a déclaré : « Il est essentiel que nous comprenions que les écoles doivent défendre la valeur de l’égalité pour tous ».

« Nous devons examiner et partager les meilleures pratiques entre les États membres dans le domaine de l’éducation ».

Comme la Commission l’a indiqué dans ses stratégies précédentes présentées cette année, elle examinera de près sa loi sur l’égalité en matière d’emploi ainsi que la création d’organismes compétents en la matière afin d’en surveiller la transposition à l’échelle nationale.

Mme Jourová a fait savoir qu’elle souhaitait que la législation « stabilise la situation des organismes de promotion de l’égalité […], qu’elle leur donne un statut clair » et leur assure « une existence plus certaine du côté des financements ».

La Commission a également promis de mettre davantage l’accent sur les droits LGBTIQ+ dans ses efforts diplomatiques.

« Nous renforcerons l’engagement de l’UE sur les questions LGBTIQ+ dans toutes ses relations extérieures », a déclaré Mme Dalli.

« Les droits des personnes LGBTIQ+ font partie des droits de l’homme, et chacun devrait pouvoir en jouir pleinement », a-t-elle conclu.

https://www.euractiv.fr/section/soci-t/news/lgbtqi-strategy-to-protect-rainbow-families-extend-eu-crimes-to-homophobic-speech/