Plan de relance européen : quelles sont les prochaines étapes ?

Valentin Ledroit

Le 21 juillet 2020, les chefs d’Etat et de gouvernement européens s’accordaient autour d’un plan de relance exceptionnel de 750 milliards d’euros destiné à surmonter la crise du Covid-19. Plusieurs étapes politiques, législatives et administratives doivent encore être franchies avant que les Etats membres ne perçoivent ces fonds.

Pour financer ce nouvel instrument intitulé « Next Generation EU« , d’un montant de 750 milliards d’euros, les 27 Etats membres ont décidé de s’endetter en commun. Avant de lever un tel emprunt, la Commission européenne devra y être autorisée par l’ensemble des parlements nationaux.

Le plan européen va ainsi financer des programmes nationaux dans l’ensemble des Etats membres, sous forme de subventions (390 milliards d’euros) et de prêts (360 milliards d’euros). Chaque pays peut ainsi compter sur une enveloppe partiellement prédéfinie, et qui dépend notamment de sa population, de son PIB par habitant et de son taux de chômage avant le début de la pandémie, de 2015 à 2019 (les 30 % restants versés en 2023 dépendront quant à eux des baisses du PIB et de l’emploi observées sur 2020, pour tenir compte de l’impact économique de l’épidémie de coronavirus).

Ainsi, la France devrait recevoir environ 40 milliards euros pour alimenter son plan de relance. Baptisé « France Relance » et présenté le 3 septembre par le Premier ministre Jean Castex, celui-ci est doté de 100 milliards d’euros. Il doit financer 70 mesures réparties en 3 piliers : transition écologique, compétitivité et innovation, cohésion sociale et territoriale.

De « Next Generation » à « France Relance » : quels liens entre les plans de relance européen et français ?

Le plan français, comme celui des 26 autres Etats membres, doit respecter un certain nombre de critères, esquissés par le Conseil européen de juillet 2020 puis précisés par la Commission européenne. 37 % des dépenses doivent être allouées aux objectifs environnementaux européens, dont la neutralité carbone à horizon 2050. 20 % doivent quant à eux être destinés à la digitalisation de l’économie. Enfin, la Commission rappelle que les plans nationaux « doivent fournir une explication détaillée de la manière dont les recommandations par pays sont prises en compte« . Dans le cadre du Semestre européen, celles-ci fournissent des orientations sur les réformes structurelles, les politiques budgétaires et la prévention des déséquilibres macroéconomiques.

Budget : que sont les recommandations par pays de l’Union européenne ?

Entre le 15 octobre et le 31 décembre dernier, les plans des Etats membres, une fois adoptés au niveau national, ont été discutés avec la Commission, avant leur dépôt formel. Durant cette période, ces projets ont pu être ajustés afin de répondre aux critères établis par les institutions européennes.

Les discussions ont eu lieu au niveau politique, entre la présidente de la Commission et les chefs d’Etat et de gouvernement, mais également sur le plan technique, grâce à une task force dédiée coordonnant les services de la Commission sur ce sujet.

Le programme de relance allemand

L’Allemagne a présenté le 3 juin 2020 un programme national à hauteur de 130 milliards d’euros. Deux objectifs transparaissent : « stimuler l’offre et la demande » et « moderniser l’économie allemande, en particulier son industrie automobile ».

Plan de relance et budget pluriannuel : que contient l’accord trouvé au Conseil européen ?

Voici une chronologie des prochaines étapes du plan européen.

Du 1er janvier au 30 avril 2021 : transmission des plans définitifs à la Commission

Chaque Etat membre transmet son programme de relance définitif à la Commission européenne. Au bout des deux mois dont elle dispose pour une première évaluation, celle-ci est soumise au Conseil de l’UE qui les valide tour à tour à la majorité qualifiée.

Si un Etat membre considère qu’un plan national ne respecte pas les critères définis, il peut demander la saisie du Conseil européen. Un dispositif mis en place pour satisfaire certains Etats « frugaux », qui demandaient initialement un droit de veto. Les versements devraient également être suspendus en cas de non-respect de l’Etat de droit par un Etat membre, un mécanisme sur lequel la Cour de Justice de l’UE devra probablement se pencher au préalable. Le sujet a fait l’objet d’intenses débats, la Hongrie et la Pologne y étant peu favorables, avant un accord trouvé en Conseil européen le 10 décembre 2020.

Eté 2021 : versement des premières subventions ?

La Commission européenne ne pourra lever d’emprunt et verser les premières subventions aux Etats membres qu’une fois que les parlements nationaux l’auront autorisée à le faire, et que les plans nationaux seront validés par le Conseil. Ce qui, estime une source à Bruxelles, pourrait être achevé à l’été 2021 au plus tôt. Le refus de certains plans par le Conseil – ceux-ci devront alors être révisés – voire le risque que certains parlements ne donnent pas leur aval d’ici là, ne sont pas exclus.

Les parlements nationaux – et régionaux dans certains cas – doivent effectivement autoriser l’Union européenne à relever son plafond de ressources, afin qu’elle puisse emprunter en ayant une garantie suffisante. Au-delà des difficultés techniques et politiques, le délai est court puisque les ratifications similaires prennent en moyenne 13 mois. Les dirigeants européens gardent aussi en mémoire le rejet en 2016 du traité commercial avec le Canada (CETA) par l’un des 39 parlements consultés, celui de la région wallonne.

2021-2022 : versement de 70% du montant de « Next Generation EU »

Les premiers paiements européens destinés à financer les programmes nationaux sont attendus au printemps – été 2021.

Plan de relance européen : comment les subventions seront-elles réparties entre Etats membres ?

2023 : versement des 30% restants du plan

A partir de cette date, l’UE commence également à rembourser les intérêts de l’emprunt.

D’ici 2023 : instauration de deux nouvelles ressources propres

Le Conseil européen du 21 juillet 2020 a demandé à la Commission de présenter d’autres propositions au cours du 1er semestre 2021, pour instaurer d’ici 2023 une taxe carbone aux frontières et une taxe sur le numérique. Autres pistes évoquées : l’utilisation du marché carbone (système d’échange de quotas d’émission) éventuellement étendu à l’aviation et au transport maritime, ainsi qu’une taxe sur les transactions financières.

2028 : l’emprunt européen commence à être remboursé

Le remboursement du capital de l’emprunt doit s’étaler sur 30 ans, jusqu’en 2058.

Les précédentes échéances

Le Conseil de l’UE et le Parlement européen devaient voter le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027, auquel était adossé le plan de relance, avant la fin de l’année. Mardi 10 novembre 2020, les équipes de négociations sont parvenues à un accord, après dix semaines de pourparlers. Un accord que la Hongrie et la Pologne ont dans la foulée décidé de bloquer. En cause, leur refus de lier le versement des fonds européens au respect de l’état de droit.

Le 10 décembre, lors d’un nouveau Conseil européen, les deux dirigeants ont accepté une proposition de compromis de la présidence allemande. Les autres chefs d’Etat et de gouvernement avaient pendant un temps évoqué la possibilité de recourir à divers dispositifs pour poursuivre la mise en place du plan de relance à 25. Le Parlement européen a officiellement adopté le cadre financier pluriannuel en session plénière le 16 décembre.

Le 1er janvier 2021, une nouvelle taxe sur le plastique est entrée en vigueur. Elle fait partie des nouvelles ressources propres, indépendantes des contributions financières des Etats membres, mises en place pour financer le plan de relance. Elle est calculée sur le poids des déchets plastiques ménagers et non ménagers non recyclés, à hauteur de 80 centimes d’euro par kilogramme.

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