[Le Récap des européennes] Et si les Britanniques participaient au vote ?



Actualité


28.02.2019

Jules Lastennet

Au cœur de la campagne cette semaine : le potentiel report du Brexit pour éviter une sortie sans accord laisse planer le doute quant à la participation du Royaume-Uni au scrutin européen. Et aussi : le probable duel entre La République en marche et le Rassemblement national, la lutte contre le changement climatique qui pourrait pâtir d’une poussée des partis populistes, et les tractations qui se poursuivent s’agissant de la tête de liste LaREM.

Et si les Britanniques participaient au vote ?

Et si les Britanniques participaient au vote ? – Crédits : iStock

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Une participation du Royaume-Uni aux européennes est-elle possible ?

Le Brexit n’en est pas à un rebondissement près, à un paradoxe près.

Alors que la date fatidique du 29 mars se rapproche à grand pas et que les députés britanniques ne semblent pas en mesure de s’entendre sur une issue, la probabilité d’un report de la sortie du pays de l’UE progresse. Car si un « no deal Brexit » reste une possibilité, une majorité de parlementaires s’accordent au moins pour éviter cette option. Theresa May l’a ainsi assuré le 26 février : un report du Brexit sera proposé aux parlementaires de la Chambre des communes s’ils n’approuvent pas l’accord trouvé en novembre avec l’UE et s’ils rejettent également une sortie brutale.

Brexit : les députés britanniques valident la nouvelle stratégie de Theresa May

A ce stade, la Première ministre ne serait prête à accepter qu’un délai supplémentaire de trois mois, qui courrait donc jusqu’à la fin juin 2019. Une prolongation de courte durée potentiellement insuffisante pour « sortir de l’impasse« , pour reprendre l’expression de la RTBF belge, tant le blocage politique outre-Manche est profond.

Mais cette date est bien l’extrême limite pour que les tractations du Brexit ne viennent pas parasiter les élections européennes. Ces dernières se tiendront du 23 au 26 mai et les eurodéputés élus prendront leurs fonctions à partir du 1er juillet. Or les traités sont formels : tout Etat membre de l’UE doit envoyer des représentants au Parlement européen. Pour le dire encore plus clairement, si le Royaume-Uni fait encore partie de l’Union le 1er juillet 2019, des eurodéputés britanniques devront avoir été élus.

Il s’agirait d’un paradoxe ultime. Un pays membre sur le départ, mais incapable de choisir une voie de sortie concertée, élirait des eurodéputés pour siéger dans une instance européenne. L’idée, qui a de quoi donner le tournis, est pour l’heure rejetée par Theresa May. Par souci de clarté, les Européens souhaiteraient aussi se débarrasser rapidement de ce dossier fastidieux avant le 1er juillet prochain. D’autant plus que selon Michel Barnier, « objectivement, on n’a pas besoin de plus de temps, on a besoin de décisions« . S’exprimant au micro de France Info le 27 février, le négociateur en chef de l’UE a également rappelé que toute demande de report devra être approuvée à l’unanimité des Vingt-Sept et que ces derniers ne manqueront de demander : « pour quoi faire ?« .

Brexit : quels scénarios possibles ?

 Marine Le Pen et Emmanuel Macron - Crédits : présidence russe, Rémi Jouan

Marine Le Pen et Emmanuel Macron – Crédits : présidence russe, Rémi Jouan

Vers une réplique du second tour de la présidentielle ?

A l’instar de tous les précédents sondages, celui mené par Le Monde, le Cevipof de Sciences Po, la Fondation Jean Jaurès et l’institut Ipsos Sopra-Streria et publié le 25 février donne La République en marche et le Rassemblement national largement en tête.

A quoi ressemblera le futur Parlement européen ?

S’appuyant un panel électoral très étendu de 10 002 personnes, l’enquête indique que la formation d’Emmanuel Macron terminerait à la première place avec 23% des voix, devant le parti de Marine Le Pen, qui obtiendrait pour sa part 19,5% des suffrages. « De manière saisissante, les deux finalistes de la présidentielle retrouvent donc à peu près leur score du premier tour« , observe Le Monde. Car si le parti présidentiel vient de connaître des mois difficiles, il compenserait le départ de certains électeurs de 2017 en ralliant une partie de l’électorat des Républicains.

LR n’arriverait en effet qu’en troisième position avec « seulement » 12% des voix, soit un score sensiblement inférieur à celui de la présidentielle, lorsque le parti avait passé la barre des 20%. Ensuite, cinq autres partis parviendraient à atteindre le seuil des 5%, permettant l’envoi de députés au Parlement européen. La France insoumise et Europe Ecologie-Les Verts sont crédités de 8%, Debout la France de 6%, le Parti socialiste et Génération.s de 5%.

Pour Ouest-France, le constat est sans appel : « les vieux appareils sont toujours en panne« . La stratégie élaborée par Laurent Wauquiez « ne paye pas« , à tel point que LR risque fort de voir ses électeurs se déporter vers LaREM, le RN, voire même Debout la France. Une analyse que partage Slate, qui se montre tout aussi tranché en qualifiant François-Xavier Bellamy, tête de liste du parti, « d’encéphalogramme plat de la droite aux européennes« . La nomination de ce dernier comme tête de liste du parti n’a en effet provoqué « aucun électrochoc dans l’opinion« .

Elections européennes : qui sont les têtes de liste en France ?

Le Parti socialiste se trouve pour sa part en pleine traversée du désert, avec la possibilité de ne pas même envoyer d’élus à Strasbourg. Tandis que « les excès » de Jean-Luc Mélenchon et ses mauvais choix vis-à-vis des Gilets jaunes feraient perdre aux Insoumis plus de la moitié des suffrages obtenus en 2017, soutient également Ouest-France.

Selon le même sondage, trois Français sur quatre se déclarent « intéressés » par le scrutin européen. Toutefois, seuls 42% des sondés se disent certains de se rendre aux urnes. Parmi ces électeurs, un sur deux seulement aurait déjà fait son choix de manière définitive, rendant l’issue des élections très incertaine.

 

Une poussée de l’extrême droite aurait un impact négatif sur la lutte contre le changement climatique

D’après une étude réalisée par le think tank allemand Adelphi et publiée le 26 février, la progression annoncée des partis populistes d’extrême droite lors des élections européennes serait de nature à « renforcer leur capacité à saborder les politiques climatiques et énergétiques » de l’UE. Comme l’explique Adelphi, qui a étudié les positions des 21 principaux partis populistes d’extrême droite en Europe ainsi que les votes de leurs députés au Parlement européen, « la moitié des votes contre des résolutions pour le climat » provient de cette partie de l’hémicycle.

L’environnement et le climat dans l’Union européenne

Sur la question du climat, cohabiteraient trois catégories de partis d’extrême droite, précise l’étude, dont la Deutsche Welle (média allemand) se fait l’écho. D’abord ceux qui sont « dans le déni » et qui « réfute[nt] ou du moins sème[nt] le doute » sur les travaux scientifiques mettant en évidence la responsabilité humaine. En font partie : le FPÖ autrichien, les Démocrates suédois, l’AfD allemande et le UKIP anglais. « Contester le changement climatique est un élément clé de leur profil« , conclut l’étude.

Au sein de la deuxième catégorie se trouveraient des formations nettement plus « prudentes« , en ne prenant pas de « position explicite » sur le sujet. C’est le cas de la Ligue de Matteo Salvini, de Droit et justice en Pologne et du Rassemblement national en France, énumère Adelphi. Enfin, de plus rares partis soutiendraient la lutte contre le changement climatique, à l’instar du Fidesz de Viktor Orban ou du parti nationaliste finlandais. Même si cela ne signifie pas que le gouvernement hongrois ait jusqu’à présent pris des mesures fortes au plan national, ajoute l’étude.

Enfin, les raisons de ce positionnement climato-sceptique sont nombreuses. D’une manière générale, les formations populistes tendent à rejeter toute action multilatérale. Plus spécifiquement, l’AfD et le PiS défendent par exemple la continuation de l’exploitation du charbon, alors que le RN s’est opposé, à la faveur du mouvement des Gilets jaunes, à une augmentation de la taxation sur les énergies fossiles.

 

Agnès Buzyn et Nathalie Loiseau - Crédits : Mutualité française, ministre autrichien des Affaires européennes

Agnès Buzyn et Nathalie Loiseau – Crédits : Mutualité française, ministre autrichien des Affaires européennes

Intenses tractations à La République en marche

La République en marche n’annoncera la composition de sa liste pour les européennes qu’à l’issue du grand débat national, soit pas avant la fin mars. De quoi largement nourrir les rumeurs et les supputations de la presse sur l’équipe qui pourrait être désignée, sachant que le parti d’Emmanuel Macron est annoncé en tête.

A plusieurs reprises, Nathalie Loiseau, ministre des Affaires européennes, a démenti vouloir prendre la tête de liste, mais son nom circule avec insistance. Mme Loiseau, personnalité de la société civile et proche d’Alain Juppé (dont elle a été la conseillère au Quai d’Orsay de 1993 à 1995), serait à même de fédérer toutes les tendances.

Autre figure gouvernementale dont le nom est désormais évoqué pour figurer en bonne place sur la liste LaREM : Agnès Buzyn, ministre la Santé, dont le profil est résolument pro-européen. « J’ai voté pour le président de la République en partie et en grande partie pour son combat européen« , a-t-elle rappelé sur RTL. Dans tous les cas, a précisé l’Elysée, les ministres qui feront partie de la liste devront démissionner de leur poste et avoir l’intention de siéger au Parlement européen. Un remaniement du gouvernement est donc envisageable.

Vers un Parlement européen très divisé (notre Récap’ du 21 février)

Enfin, l’idée d’un trio ou quatuor de personnalités pour conduire la liste LaREM est toujours d’actualité. D’après Libération, elle est défendue par Daniel Cohn-Bendit, qui participe activement à l’élaboration de la campagne du parti. S’agissant de la stratégie, le journal indique qu’Emmanuel Macron souhaiterait s’inspirer de celle de Nicolas Sarkozy en 2009 lorsque, chose rare, un président en exercice est ressorti victorieux d’une campagne européenne. L’UMP ne s’était lancé que les dernières semaines, plaçant le thème de « l’Europe qui protège » au centre de son argumentaire. Précisément ce que le parti présidentiel prévoit de faire.

D’ici là, l’heure est aux alliances en France (avec certains écologistes, Agir, les radicaux valoisiens ou encore les amis d’Alain Juppé) et en Europe (avec les libéraux déjà présents au Parlement européen ou encore avec le nouveau parti polonais Wosnia).

 

 Et aussi :

Génération.s dévoile 30 candidats. L’appel de Benoît Hamon aux autres partis de gauche à participer à une votation citoyenne afin de constituer un programme et une liste commune pour les européennes est resté sans réponse. Génération.s a donc annoncé, le 26 février, ses 30 premiers candidats pour les européennes. La liste n’est pas encore ordonnancée, même s’il ne fait guère de doute que l’ancien candidat à la présidentielle devrait en prendre la tête. Parmi les autres personnalités présentes figurent : les eurodéputés sortants Guillaume Balas et Isabelle Thomas, le président du Samu social Eric Pliez, l’ancienne présidente de Médecins du monde Françoise Sivignon, ou encore Sarah Soilihi, transfuge de La France insoumise.

« Nous sommes la liste écologiste et de gauche. C’est le visage de la société que nous voulons« , a déclaré Benoît Hamon. Comme l’explique Le Monde, le parti devrait faire campagne sur l’égalité femmes-hommes, la solidarité envers les migrants, la transition écologique ou encore la création d’un ISF européen. « Les Etats-nations ne sont plus à la dimension des problèmes que l’on doit résoudre. Les Etats-nations sont trop faibles, impotents« , soutient M. Hamon. « Nous considérons que l’Europe nous donne une liberté d’agir que les Etats-nations ne nous donnent plus. C’est le bon niveau, et il y a une urgence de lutter contre ceux qui ont dévoyé l’UE« .

Le Mouvement 5 étoiles en difficulté. En Italie, le décrochage du Mouvement 5 étoiles, arrivé largement en tête lors des élections législatives de mars 2018 avec 32,7% des voix, se confirme. Deux semaines après sa déroute lors des élections régionales dans les Abruzzes, le parti a été balayé le 24 février en Sardaigne. En 2018, le M5S y avait recueilli 42% des voix, un an plus tard le parti fondé par Beppe Grillo est redescendu à seulement 11%. Les élections européennes s’annoncent par conséquent délicates et cruciales, car dans le même temps la Ligue de Matteo Salvini, avec qui le M5S partage le pouvoir, a le vent en poupe. Or les deux partis sont en « désaccord sur un grand nombre de sujets« , à commencer par le traitement des demandes d’asile, note The Telegraph. Dans ce contexte, Matteo Salvini pourrait être tenté de rompre la coalition après les européennes pour s’emparer seul du pouvoir à Rome.

 

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