Le Brexit, une opportunité pour restructurer la finance européenne ?


Le président de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, voit dans le Brexit une opportunité pour Paris et la finance européenne. Mais beaucoup reste à faire avant mars 2019 pour les plus petits acteurs de la finance.

L’accord trouvé  sur les termes du divorce entre l’UE et le Royaume-Uni doit encore être approuvé par toutes les parties. Le risque de « no-deal » reste bien présent, y compris à l’esprit des autorités financières. Le 24 novembre, le président de la Banque de France, François Villeroy de Galhau a rappelé la réalité de cette hypothèse devant les régulateurs français de la finance : « Dans un contexte encore incertain, nous devons nous préparer à cette situation », a-t-il insisté.

L’incertitude demeure mais l’après-mars 2019 est tout de même vu comme une opportunité pour le futur de la finance dans l’UE.

« Le Brexit peut aussi être une opportunité pour restructurer le système financier européen, s’enthousiasme le banquier français. Il n’y aura pas une City unique pour le continent, mais plutôt un réseau polycentrique intégré de places financières », imagine-t-il.

Paris bien placé pour l’après-City

La City était jusqu’à présent le cœur du réacteur des marchés financiers européens. Après la décision des britanniques de quitter l’UE, la « capitale économique » allemande Francfort était déjà vue comme l’héritière logique de sa cousine anglaise.

« Après le Brexit, il y aura plusieurs pôles financiers dans l’UE, comme aux Etats-Unis avec New-York, Chicago et Boston. Paris a tous les atouts pour devenir le pôle marchés. Il y a des grandes banques sur place et un gisement de personnel très qualifié », a-t-il fait valoir.

La place de Paris bénéficie du Brexit

Les géants de la finance accélèrent les préparatifs, et la place parisienne a déjà remporté l’adhésion de plusieurs grandes banques. De quoi se placer comme la première place de trading européenne post-Brexit, selon le Financial Times, relayé par notre partenaire, La Tribune.

Ce paysage accueillant pour les établissements financiers, « assez exceptionnel en Europe », selon Xavier Parain, secrétaire général adjoint à l’Autorité des marchés financiers (AMF), a déjà séduit le groupe HSBC. Le mastodonte international a décidé d’établir dans la capitale française sa nouvelle tête de pont pour ses activités européennes.

Perte du passeport européen

Là où ce grand acteur de la finance a réussi à prendre les devants par rapport au Brexit, d’autres entités, plus modestes, n’ont pas anticipé le changement. « Les acteurs de grande taille sont bien préparés au Brexit. Les petits, non, s’inquiète le gendarme financier. Un certain nombre d’établissement s’y prennent à la dernière minute. »

Ce trimestre, deux fois plus de dossiers d’agrément arrivent sur les bureaux des autorités financières qu’en temps normal. L’agrément, délivré par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), permet à une société de gestion d’exercer son activité dans un pays sans y être implanté. Les sociétés britanniques sont obligées d’en passer par là puisqu’elles vont perdre l’accès au passeport européen.

Refus des « coquilles vides »

« Il y a encore une cinquantaine de dossiers en cours de traitement, c’est très tard. On s’efforce d’être prêts pour fin mars », explique Bernard Delas, vice-président de l’ACPR. Pour lui, « la seule vraie parade à ce problème est le transfert des portefeuilles à une entité française, mais nous refusons absolument l’optimisation réglementaire ».

La grande crainte des autorités européennes est la « coquille vide ». Soit une entité créée dans un pays de l’UE pour rester juridiquement à l’intérieur du marché unique, mais sans les moyens humains et matériels d’exercer réellement une activité.

L’UE veille à ces pratiques trompeuses de relocalisation avec « une cohésion remarquable », comme le fait remarquer Xavier Parain de l’AMF. Cette unité doit servir à avancer sur l’union bancaire pour François Villeroy de Galhau, qui exhorte les gouvernements français et allemands à respecter l’agenda de Meseberg fixé en début d’été dernier.



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