Huawei tente de rassurer l’UE


Il n’y a jamais eu aucun vrai « problème de cybersécurité » à Huawei, assure un représentant de la firme chinoise.

Lors du congrès mondial de la téléphonie de Barcelone, le président de Huawei pour l’Europe occidentale, Vincent Pang, a réfuté fermement les allégations d’espionnage d’État qui pèsent sur son entreprise depuis quelques mois.

Décideurs politiques et chantres de l’industrie mondiale se sont donnés rendez-vous à Barcelone pour la grande messe de la téléphonie. Avec une des plus grandes délégations, Huawei a renforcé sa présence au congrès. Selon les informations obtenues par Euractiv, l’administration américaine, très critique de la firme chinoise, a pour sa part envoyé une vingtaine de représentants à l’événement.

Washington tente de faire pression sur les Européens pour qu’ils empêchent Huawei de participer au développement de l’infrastructure 5G de l’UE. La société de téléphonie est accusée par les États-Unis d’avoir une « porte dérobée » permettant au gouvernement chinois de mener des opérations d’espionnage.

L’Europe plus conciliante

En Europe, l’attitude vis-à-vis de Huawei est plus mitigée. La semaine dernière, le directeur du Centre national de sécurité britannique (NCSC) expliquait par exemple qu’aucune preuve confirmant une infraction sécuritaire n’avait été fournie au gouvernement britannique.

La commissaire européenne au numérique, Mariya Gabriel, a aussi adopté un ton plus conciliant. Tout en soulignant l’importance de la cybersécurité des infrastructures de 5G, elle a indiqué que « personne ne gagnait à prendre des décisions prématurées fondées sur des faits incomplets ».

En filigrane, on entrevoit la distance encore à parcourir pour arriver à une position commune sur l’influence que Huawei pourra avoir sur les marchés européens. Un diplomate européen a confirmé à Euractiv que la croissance de l’entreprise chinoise en Europe  ne dépendra pas seulement de leur irréprochabilité cybersécuritaire, mais aussi de la politique de concurrence qu’adoptera l’UE à l’avenir.

Dans une récente interview avec Business Insider, la commissaire à la concurrence, Margrethe Vestager, a déclaré que l’UE devait déterminer si l’utilisation des produits Huawei « pouvait présenter un danger » et que la « discussion devait être fondée sur des faits » qui « ne sont pas encore complètement connus ».

En ce qui concerne la pression exercée sur les régulateurs de l’UE par ses homologues américains, la commissaire assure que toute décision sur l’implication de Huawei dans l’UE sera déterminée uniquement par les représentants de l’UE, « quels que soient les pressions ou les conseils que nous recevons ».

Contrôle judiciaire en Pologne

Cependant, Huawei fait actuellement l’objet d’un contrôle judiciaire en Pologne, allié inébranlable de Washington. En janvier, l’entreprise chinoise a été victime d’allégations d’espionnage en Pologne après l’arrestation d’un employé, Weijing W, également connu sous le nom de « Stanislaw Wang ». Il a depuis été relevé de ses fonctions au sein de l’entreprise. Certains observateurs ont estimé que la Pologne pourrait interdire les produits de la marque chinoise.

Selon un représentant de Huawei,  cette arrestation pourrait s’inscrire dans le cadre d’une initiative plus large visant à faire pression sur certains États membres de l’UE afin de freiner le progrès de la firme en Europe.

Dans ce contexte, le vice-président américain Mike Pence s’est rendu en Pologne à la mi-février et a félicité Varsovie pour son engagement à « protéger le secteur des télécommunications de la Chine ».

Après l’arrestation de Weijing W, Huawei a tenté d’apaiser le gouvernement polonais en lançant l’idée d’établir un centre de cybersécurité dans le pays. Tonny Bao, directeur de la filiale polonaise de Huawei, a déclaré lors d’une conférence de presse que la société était « prête à établir un centre de cybersécurité en Pologne si les autorités acceptent cette initiative comme une solution fiable ».

Euractiv a donc voulu en savoir plus sur l’état d’avancement de ce projet. Bien qu’il n’ait pas révélé si des mesures concrètes avaient été mises en place jusqu’à présent, Vincent Pang assure que tout est fait pour collaborer avec les autorités. En règle générale, « nous sommes plus qu’heureux de travailler » avec les gouvernements qui voudraient collaborer, ajoute-t-il.

Contrairement à la Pologne, certains États membres, comme l’Italie et le Royaume-Uni, ne se sont pas émus des tensions qui se sont créées autour de la firme chinoise. Or, de telles divergences sur les questions de cybersécurité ne rendront service à personne, a souligné Mariya Gabriel. « L’Europe doit avoir une approche commune, sinon il y a un risque de fragmentation. »

De son côté, Vincent Pang a également affirmé qu’une approche internationale serait préférable à une approche uniquement européenne. « Nous voulons unifier les normes de sécurité pour tout le monde », a-t-il dit. « Nous voulons traiter tout le monde de la même façon. »



https://www.euractiv.fr/section/economie/news/not-one-single-cybersecurity-issue-huawei-says/